à ma place | nino

+ Après une soirée riche en émotion, Nino n’avait malheureusement  pas réussi à regagner la mine et après avoir rôder un moment dans le ranch à la recherche d’un endroit où crécher, il avait finalement opter pour la paille de la grange comme matelas. Loin d’être un lit de luxe, cela faisait néanmoins parfaitement l’affaire au vu de son état et après s’être assuré de laisser une petit bol d’eau à son petit chiot, le brun s’était laissé tombé dans les bras de Morphée. Trop assommé pour se réveiller, l’éclaireur ne bougea pas d’un iota malgré la vie qui commençait doucement à reprendre autour de lui et par chance, personne ne poussa la porte du bâtiment avant que les premiers rayons du soleil de pointèrent leur nez à travers les planches en bois des murs. A cause des bruits environnants, le petit chiot commençait doucement à couiner sûrement curieux de savoir ce qui se passait de l’autre côté. « Hmm.. Poutine, arrête de pleurer... » Encore à moitié endormi, Nino essayer de regrouper toute son énergie pour enfin bouger son derrière, ce qui dura un peu plus longtemps que prévu.

Alors qu’il se frottait doucement les yeux, la porte de la grange grinça, indiquant ainsi que quelqu’un pénétrait dans les lieux. Incapable de réellement jauger l’heure qu’il pouvait être, Nino resta immobile dans l’espoir que les différents matériaux agricoles entreposés le camouflaient suffisamment pour ne pas avoir à justifier sa présence. Comme le soleil donnait directement sur l’entrée, l’ancien moniteur de snowboard ne parvenait pas à distinguer autre chose qu’une silhouette féminine et quand cette dernière le remarqua, il était déjà trop tard pour ne pas jouer les squatteurs surprises. Néanmoins, même s’il était un peu gêné d’avoir passé la nuit dans un endroit sûrement pas convenu pour cela, il se doutait de ne pas être le seul dans cette situation -du moins c’était ce qu’il s’imaginait d’après les souvenirs de fin de soirée. « Je.. Je vais... » La gorge un peu sèche et la bouche pâteuse, Nino peinait a prononcer une quelconque explication et alors qu’il cherchait du regard sa gourde, il fut saisi par la voix familière qui l’interpella.

De toutes les personnes au monde, Fran était sûrement dans les dernières qu’il souhaitait voir au réveil, surtout après une soirée si difficile. Sans surprise, cette dernière s’amusait déjà de sa position, visiblement ravie d’être en position de force. Épuisé et pas forcément enclin à faire la conversation, Nino se contenta d’attraper sa gourde pour se désaltérer, en espérant au passage que la blonde passerait sa route. Seulement, c’était mal connaître Fran, la plus chieuse des chieuses, qui adorait se faire détester. Immobile, elle revenait sur la soirée et plus précisément sur la manière dont il l’avait soigneusement évité. Une remarque qu’il ne comprenait pas vraiment, après tout elle devrait être la première heureuse de ne pas s’être retrouvée obligée à parler avec lui. « Pourquoi j’éviterais une pimbêche comme toi ? » Leurs manières de fonctionner n’étaient clairement pas similaire et si au mall il avait essayer de comprendre, il avait après ce jour totalement abandonné l’idée. Fran était quelqu’un d’hystérique et finalement, il aurait mieux fait de suivre les conseils de son meilleur ami. D’ailleurs, alors qu’elle caressait doucement la tête du petit chien en joie de voir une nouvelle tête, la crimson le questionna une nouvelle fois au sujet de Joey, ce qui le poussa presque à se demander si cette dernière n’avait pas une obsession pour lui. « Il te manque tant que ça pour que tu fasses une fixette pareille ? » De toute manière, Nino n’avait pas la moindre idée d’où pouvait bien se trouver son frère de coeur après cette nuit de perdition. Soit ce dernier somnolait aussi dans un coin, soit il était rentré sagement à la mine pour dormir dans un vrai lit.

S’il avait su que son réveil serait orchestré par Fran, il aurait sûrement traverser le chemin qui le menait jusqu’à la mine en pleine nuit. Une réalité qui permettait au moins de mesurer à quel point il n’appréciait pas la blonde et ce malgré l’amitié qu’ils avaient pu avoir autrefois. « Poutine, viens ici. » Encore trop jeune pour être réellement obéissant, le chiot se contenta de regarder son maître avant de finalement s’allonger sur le dos pour présenter son petit ventre. Un comportement qui en d’autres lieux l’aurait sûrement fait sourire, mais malheureusement aujourd’hui rien ne semblait lui sourire. Bien décidé à ne pas s’éterniser, Nino regroupa ses quelques affaires dans son sac à dos tout en veillant à remplir de nouveau le récipient qui servait de gamelle d’eau à sa boule de poil.

+ Usé par la nuit qu’il venait de passer, Nino sentait son cerveau tambouriner dans sa boîte crânienne sans la moindre retenue. Si la douleur en elle même restait plus que gérable, il devait avouer que la voir combiner à la présence de Fran relevait désormais plus de la torture qu’autre chose. Néanmoins, malgré sa bonne volonté, il n’avait pas vraiment le choix de composer avec, à moins bien sûr de déclencher un scandal à une heure si matinale chez leurs nouveaux alliés. Le genre de conflits qu’il préférait largement éviter, au moins pour son groupe, malgré la tentation plus que présente. Comme la blonde ne lâchait pas l’affaire, Nino se voyait forcé de rentrer dans son petit jeu, sans avoir pu émerger totalement. « Désolé de t’annoncer que cela ne lui manque pas vraiment. » Si Joey se tenait dans la grange, l’échange ne se déroulerait clairement pas ainsi et curieusement, il était certain que l’autre ne ferait pas autant la maline si cela avait été le cas. Néanmoins, même s’il aurait apprécié la présence de son meilleur ami dans la pièce, ce n’était malheureusement pas le cas et il fallait se faire violence pour encaisser une nouvelle fois le caractère hystérique de la crimson.

Une fois relevé, l’éclaireur passa rapidement sa main dans ses cheveux, histoire des coiffer un minimum et surtout de retirer la paille qui aurait pu s’y glisser. Une fois prêt à repartir, le brun tenta de rappeler son chien qui lui ne semblait pas vraiment d’accord avec cette proposition. Heureux de se faire papouiller, Poutine présentait désormais allégrement son ventre à la jeune femme qui le lui rendait bien. Trop gentil pour retirer son chien de cette dose de douceur, Nino poussa un soupire avant de finalement se reposer résigner sur la botte de paille. Alors qu’il fouillait dans son sac à dos, Fran s’hasarda sur une question rhétorique vis-à-vis du lien qui reliait l’animal et le mineur. « Oui. » Une confirmation qu’il affirmait avec fierté, avant de finalement lever les yeux en l’entend prétendre que la bête à poil préférerait rester à ses côtés.

Plus malin qu’elle, Nino ignora la provocation et extirpa finalement de son sac son paquet de clopes pour venir en glisser une entre ses lippes. Malgré la gueule de bois évidente qu’il se tapait, l’éclaireur se voyait mal se passer de son petit rituel du matin qui restait certainement son plus gros vice. Une fois la précieuse allumée, il reposa ses yeux sur l’animal qui semblait aux anges entre les mains de la blonde. Ce bref moment de sérénité lui faisait presque apprécier le charme de la grange, mais c’était sans côté l’endurance de la crimson. Pour une raison étrange, cette dernière s’amusait de sa relation avec Idyl qu’il ne cachait au final pas vraiment. Dans la soirée, ils s’étaient effectivement offert un petit moment d’intimité dans les draps de la brune, mais il ne voyait pas du tout en quoi ça concernait Fran. « Jalouse Swanson ? » Amusé, il lui adressa un sourire moqueur persuadé qu’elle profitera de l’occasion pour venir encore une fois les critiquer pour des vérités extrapolées et mal interprétées.

+ Apprendre que Fran et Idyl étaient amies ne l’étonnait pas vraiment et pour dire vrai, il devait même admettre que les deux jeunes femmes possédaient finalement un caractère assez similaire. Cependant, à l’instar de la blonde, l’ancienne militaire ne lui piquait pas ses vivres et ne lui promettait rien de plus que ce qu’elle pouvait offrir. Malgré ce que semblait penser la rideuse, leur relation était aussi simple que saine et si elle restait qu’un plan cul, cela ne sous-entendait pas qu’il ne prenait pas un minimum soin d’elle. Idyl comptait, pas parce qu’il avait des sentiments pour elle, mais simplement parce qu’elle occupait une place dans sa vie, un détail qui dans ce monde comptait. « Contrairement à ce que tu sembles penser, je ne suis pas le croque-mitaine. » Une réalité que la blonde continuait de refuser corps et âme, et ce malgré le comportement pacifique qu’il adoptait avec elle -bien que l’envie de l’envoyer péter ne manquait pas.

Blasé par le comportement puéril de la blonde, Nino extirpa en soupirant son briquet de la poche arrière de son jean avant de finalement se faire reprendre comme un enfant. Pas si stupide qu’elle le pensait, l’éclaireur ne comptait effectivement pas fumer dans la grange, mais simplement s’assurer qu’il avait de quoi l’allumer pour la savourer au niveau de l’entrée. Trop fatigué pour répondre, le brun se contenta de lever les yeux au ciel, avant de traverser le lieu et ainsi s’adosser au cadre de la porte qui donnait sur un ranch tournant un peu au ralenti. La soirée n’avait pas été compliqué que pour lui et à en voir les quelques riders éveillés, ils n’allaient pas passer une journée très productive. Pour ce qui était de la sienne, l’éclaireur comptait avant tout faire un tour du ranch pour ramasser les quelques miners encore endormi avant de reprendre la route de la mine pour veiller à ce que tout le monde soit rentré.

Une fois sa cigarette allumée, Nino ferma un instant les yeux pour profiter de la chaleur du soleil, avant d’être de nouveau coupé par la crimson. Moins agressive qu’auparavant, la blonde s'intéresse de prêt à l’animal ou plus précisément à sa provenance. Croiser des petits chiens dans ce genre n’était pas commun, surtout aussi jeune. « Poutine ? Je l’ai trouvé dans un restaurant canadien en bord de route, il était pas en forme, mais visiblement il va mieux. Pourquoi ? » Malgré une fierté évidente dans sa voix, Nino restait sur ses gardes, persuadé de se voir encore une fois critiquer par la blonde qui adorait le provoquer sans raison. Néanmoins, comme elle se montrait plutôt généreuse avec la boule de poils, il osait imaginer qu’elle se montrait simplement curieuse vis-à-vis de son compagnon qui à défaut d’être utile à la survie, savait redonner le sourire.

+ Moins agressive que lors de leur dernière rencontre, Fran semblait soudainement vouloir lui accorder le bénéfice du doute et ainsi écouter sa version des faits. Un revirement de situation un peu tardif aux yeux de l’éclaireur qui hésita d’ailleurs à offrir une quelconque réponse. Après la trahison et les insultes passées, la blonde ne méritait clairement pas autant d’attention et si Joey s’était lui aussi trouvé dans la grange, il aurait sûrement coupé court à l’échange. Seulement, à l’inverse de son meilleur ami, Nino savait se contrôler et faire preuve de maturité quant-il le fallait, même face aux personnes qui ne le méritait pas forcément. De plus, après avoir espéré tant d’année avoir cette conversation, il ne pouvait tout bonnement pas se retirer aussi rapidement -du moins sans le regretter immédiatement. Parler n’engageait à rien, et avec un peu de chance il parviendra peut-être à rendre l’autre un minimum coupable face à ses actes.

Une tâche qui s’avérait difficile quand on connaissait l’insolence de la blonde, qui au mall s’était presque vantée de son hold-up surprise. Une mauvaise blague qui malheureusement restait au travers de la gorge des deux garçons, sans jamais réellement s’atténuer. Le manque d’explication n’avait que aggravé et alimenté la haine ressentie à l’égard des Swanson et aujourd’hui peut-être, ils parviendraient à refermer quelques plaies ouvertes. « Parce que j’étais pas très fier de ce que j’avais fait ? Je voulais pas que vous pensiez qu’on était dangereux. » Pour Nino, tuer un être vivant restait, peu importe la nature de cette personne, un acte cruel et difficile à accepter. Seulement, comme Fran avait débarqué le lendemain sans prévenir chez eux, on ne pouvait pas vraiment dire que le brun avait réellement réussi à digérer complètement l’information. Faute de savoir géré, il avait finalement préféré se taire, persuadé que le temps aiderait.

Malheureusement, c’était sans compter sur la découverte macabre de la trop curieuse Fran qui au lieu de venir lui poser directement la question, avait préféré fuire comme une lâche. Le genre de comportement que le loyal et fidèle Nino ne concevait pas, même avec la meilleure volonté du monde. « Puis au final on s’est dit que c’était plus simple de garder ça secret, étant donné que ça datait d’avant votre arrivée. » Le passé appartenait au passé, tous les survivants s’accomodaient en général plutôt bien de cette règle officieuse, à commencer par la blonde dont il ne connaissait finalement que trop peu de chose. « On aurait peut-être fini par vous en parler, mais malheureusement on a pas eut ce droit. » Une conclusion ironique qu’il ponctua d’un sourire cynique, avant de lui tourner légèrement le dos pour profiter de la chaleur du soleil.

+ Hargneuse et visiblement bien décidé à lui faire porter le mauvais rôle, Fran continuait de gratter en surface pour tomber sur la caverne d’Alibaba. Malheureusement pour elle, l’éclaireur, bien loin du dessin qu’elle peignait de lui ne pouvait tout bonnement pas lui offrir ce qu’elle semblait profondément souhaiter. Ni lui, ni Joey n’étaient de dangereux psychopathe en herbe et si elle le pensait vraiment, elle ferait sûrement mieux de passer son chemin, plutôt que de risquer sa vie pour des broutilles. Un paradoxe qui collait parfaitement à la blonde et que le plus âgé essayait de lui faire comprendre, tout en gardant son calme. Plus détaché que lors de leur conversation au mall, Nino prenait son temps pour formuler ses réponses, histoire de conserver ce semblant de calme qui régnait encore dans la grange. « Oui, enfin ça change rien au fait que je l’ai quand même tué. » Violeur ou pas, il restait avant tout un être humain abattu de sang froid comme un vulgaire lapin. Savoir s’il l’avait mérité ou non importait finalement peu au brun, qui désormais devait vivre avec son choix sur la conscience. Contrairement à ce que la crimson pensait, Nino n’avait tué que deux être humains depuis la fin du monde, à savoir sa mère pour lui abréger ses souffrances et ce parfait inconnu pour l’éviter de faire le mal. Un compte qui pourrait paraître bien maigre pour la plupart des vivants, mais qui pour lui était déjà trop important.

Honteux d’afficher déjà deux meurtre à son actif, Nino s’était effectivement bien gardé de cette information auprès des Swanson, mais cela ne faisait pas de lui le monstre qu’elle semblait percevoir. « Je connais Joey depuis que je suis petit, forcément qu’on vous faisez moins confiance ? » Un manque de confiance qui ne lui semblait finalement pas si blâmable et qui surtout devrait attester de sa culpabilité. Si Fran ne s’était pas enfuie sans crier garde, ils auraient peut-être pu en discuter calmement, autour du feu, comme ils avaient l’habitude de le faire à l’époque. « Non, j’aurai posé la question. » Même si c’était plus facile à dire qu’à faire, Nino était réellement persuadé qu’il serait venu la voir en découvrant le corps. Après tout, ce n’était pas comme si elle avait fouillé la maison et elle avait découvert les cadavres de sept gosses de la région, alors pas la peine d’en faire tout un scandal.

De plus, au-delà de se sentir vexer d’apparaître comme un tueur à ses yeux, Nino était réellement blesser de l’entendre dire à tort qu’il aurait pu la tuer. « Comment tu as pu penser qu’on aurait pu te faire du mal ? » Une déception qui résultait de ces deux mois passés à sympathiser et surtout à contempler l’humanité qui les habitait encore, alors que le monde s’écroulait autour d’eux. Seulement, une fois de plus, Nino avait donné sa confiance au mauvaise personne et en récoltait aujourd’hui encore les résultat.