Sujet: you only hate the road when you're missing home Ven 5 Jan - 8:00
malini abel « you only hate the road when you're missing home»
Les lignes sur la carte qui s'étendait devant elle étaient définitives, planifiées au jour près, se courbaient et se chevauchaient jusqu'à attendre un unique point : Coosada, Alabama. Une bourgade insignifiante pour beaucoup, mais dont le nom était une obsession grandissante pour la recruteuse qui depuis plusieurs semaines ne rêvait que de voir le panneau qui indiquerait son entrée dans le village. Coosada, berceau de son enfance et de son adolescence. À peine un millier d'habitants pour alimenter les statistiques et les ragots de ce coin perdu qui semble encore figé dans les années 90. Elle se souvient d'une vie au ralenti, elle se souvient que rien d'extraordinaire ne s'y était produit, que la gazette locale n'avait rien à raconter à l'époque et ne déblatérait que sur les récoltes de maïs. Puis elle a été élue Miss USA et ce simulacre de ville en avait fait une fierté. Enfin un événement pour renouveler les racontars des vieilles au marché. Coosada. Il n'y avait rien à y faire à l'époque et l'activité n'a pas dû augmenter depuis. Pourtant, Malini rêve de cette destination et elle n'a plus que ce nom à la bouche. Le pauvre Bass doit connaître chaque mètre carré de son quartier par coeur maintenant. Elle n'a fait que parler encore et encore des souvenirs, de sa maison, de tous les trésors qui s'y cachent peut-être encore et sur lesquels elle aimerait mettre la main pour pouvoir commencer à enfin faire la paix avec elle-même.
Elle aimerait partir le plus tôt possible, mais la date n'était pas fixée car il fallait d'abord affronter une épreuve colossale : réussir à avoir l'approbation d'Abel. Même si elle promettait de revenir, pourrait-il comprendre ses motivations ? Lui faisait-il assez confiance pour ne pas broncher ? Elle avait tout prévu, un argumentaire bien détaillé, des plans et des explications, mais même l'exposé le plus factuel et raisonnable ne pouvait tenir face à l'entêtement de l'aîné des Rhodes. Comment lui faire avaler qu'elle partait un mois voire deux ? Et qu'elle y allait en plus avec Bass ? Connaissant Abel, il trouverait sûrement le moyen de l'interpréter comme une sorte de reproche personnelle, juste pour avoir une raison de se mettre en colère et de se vexer. Alors elle triture la carte entre ses doigts en entrant finalement dans le bureau d'Abel, ayant réussi à décrocher un moment avec lui entre deux vagues d'accalmie au ranch. La pièce ne fait que renforcer la puissante vague de nostalgie, car elle est très semblable au bureau qu'occupait son propre père et où il tenait ses comptes, tard le soir, sirotant un whisky. Lui aussi est quelque fois flou dans son esprit, n'apparaît qu'a travers des bribes de souvenirs qu'elle aimerait attraper et fixer devant elle, des bribes dont elle est sûre de retrouver l'intégralité une fois les yeux posés sur une photo de sa famille, une fois les doigts caressant le bureau en chêne construit des mains de son père.
"Abel, merci de me recevoir." Le ton est formel. Elle ne sait pas avec quelles pincettes le prendre, ni si elle doit adoucir le terrain avant de lâcher la nouvelle ou si elle devrait procéder directement à l'annonce. Pourtant la réponse était évidente : ni le leader, ni elle n'était des adeptes du pot autour duquel on tournait, ils préféraient les échanges directs. Alors à peine installée, elle se lance sans même prendre la peine d'une inspiration. "J'ai un projet depuis quelques temps. Un projet d'ordre personnel que j'ai besoin d'accomplir pour me sentir mieux. J'aimerais retourner en Alabama. Pas définitivement ! Je reviendrai bien sûr ! Mais j'ai besoin d'aller visiter la maison dans laquelle j'ai grandi, récupérer des souvenirs et apprendre peut-être une bonne fois pour toute ce qui est arrivé à ma famille." Le discours est mécanique, récité presque au mot près et ne laisse pas paraître toutes les émotions que ce projet a engendré. Elle ponctue finalement sa requête avec un timide : "Ça pourrait prendre un mois. Voire plus." Le tout, maintenant, c'est de ne pas baisser les épaules face à Abel. Deux sphères brillantes de détermination fixent désormais le chef des cavaliers pour scruter sa réaction, pour essayer de grapiller des miettes d'approbation ou pour anticiper la colère monumentale dans laquelle il pourrait rentrer. Elle doit l'avouer, elle n'a absolument aucune idée de l'issue, elle qui d'ordinaire se targue de connaître un peu Abel au point de prévoir toutes ses réactions.
Sujet: Re: you only hate the road when you're missing home Dim 21 Jan - 21:44
Malini Abel « you only hate the road when you're missing home »
Abel n’avait pas la moindre idée des raisons pour lesquelles la recruteuse avait demandé à le voir (d’ordinaire, elle ne s’embarrassait pas de ce genre de requête et il était mieux habitué à la voir débarquer sans crier gare), mais sa curiosité ne s’était que trouvée renforcée par l’attitude de la recruteuse lorsqu’elle s’était avancée dans le bureau. Oh, il ne s’était jamais targué de la connaître vraiment, Malini, mais il en savait néanmoins suffisamment sur elle pour déceler la tension, la nervosité, toutes ces petits choses qui le faisait déjà deviner que ce qu’elle avait à dire – demander ? – n’allait pas être quelque chose de moindre importance.Ce qui, d’office, le jeta dans une attitude sur la défensive alors même qu’il ne savait pas bien encore à quoi fallait-il qu’il s’attende. Un sourcil se haussa brièvement devant le remerciement – avait-il seulement eu le choix ? Oui, sans doute, mais il savait que l’indienne, lorsqu’on lui refusait quelque chose, ne s’arrêtait généralement pas à ça – puis l’empressement qu’elle mit à s’installer, à reprendre la parole alors que lui-même n’avait pas encore ouvert la bouche.
Le silence s’installa et s’étira sur quelques secondes quand elle acheva enfin de dire tout ce qu’elle avait à dire alors qu’Abel se contentait de la considérer, elle et ses propos, dans un mutisme uniquement souligné par le regard fixe qu’il posait sur elle. Malini voulait partir. Bien, une chose au moins dont il n’était que très moyennement surpris. Au moins prenait-elle le temps de le mettre au courant, ce qui à défaut d’assurer une quelconque validité à sa promesse de retour, prouvait qu’elle avait encore un minimum de considération pour lui. « Je vois que tu sembles avoir déjà tout préparé », il commença d’abord, la voix soigneusement neutre et ne trahissant pas (pas encore) la moindre de ses émotions. Bien sûr qu’il était soupçonneux. Mais il n’avait pas l’intention de l’agresser d’entrée de jeu, pas réellement désireux de la braquer alors que ce qu’elle était en train de lui dire n’avait rien d’anodin. Pour autant, la question lui brûlait la langue alors puisqu’elle ne s’était pas embarrassée de pincettes pour lui annoncer son projet, autant calquer sa conduite. « Est-ce que tu m’affirmes que tu reviendras pour que je te laisse partir sans que tu aies besoin de regarder par dessus ton épaule, ou est-ce que c’est réellement ton intention ? » Oh, il ne pourrait jamais l’empêcher de partir et ils en étaient tous les deux très conscients, mais ce qu’il pouvait faire en revanche était de lui donner la chasse, ce n’était pas tous les jours qu’il laissait des cavaliers partir de leur plein gré sans leur faire regretter sévèrement ce manque de fidélité. « La dernière fois que j’ai envoyé quelqu’un partir un mois, il lui a fallu plusieurs années pour revenir ici. Et ce n’est pas exactement un petit trajet, pour retourner chez toi. » Ce n’était pas un refus, ou pas encore en tout cas. Mais, dans l'immédiat, Abel manifestait clairement une certaine forme de réticence à l’idée de devoir se séparer de sa recruteuse en chef, Malini était parmi ses meilleurs éléments ici et sa perte n’était pas exactement du genre qui passerait inaperçue. Il avait besoin de savoir au moins qu’elle ne lui mentait pas, quoi qu’il puisse se passer ensuite et l’avertissement dans ses yeux était plutôt clair à ce sujet.
Sujet: Re: you only hate the road when you're missing home Dim 28 Jan - 23:14
malini abel « you only hate the road when you're missing home»
Le silence s'éternise et se referme griffe par griffe sur ses nerfs lacérés, sur elle toute entière pour l'engloutir dans cette tension qui précède les grands conflits. Il n'esquisse aucun signe qui trahirait ses pensées et pour la recruteuse, c'est presque pire que s'il s'était mis en colère tout de suite. Qu'on ne se méprenne pas, sa demande était raisonnable en soi et elle comptait bien aller au bout de son envie, mais l'approbation d'Abel avait quelque chose de crucial dans le processus. S'il la laissait partir, il la laissait aussi revenir. Alors que si elle était partie du jour au lendemain, sans prévenir, elle n'aurait pas donné cher de sa peau si elle lui faisait l'affront de revenir. Finalement, il énonce presque trop calmement qu'elle semble avoir tout préparé. Pourtant il n'en était rien. Tout ce qu'elle avait, c'était une idée de route, l'appui de Bass et un épuisement psychologique qui la poussait à sortir prendre l'air. Le mois de décembre avait fini d'user Malini, déjà nostalgique de sa famille. S'occuper des victimes du vaccin, perdre Mallory qu'elle avait commencé à apprécier à force de la former, perdre par la même sa solution de recruteuse de remplacement en son absence... Les circonstances ne jouaient pas vraiment en sa faveur et elle ne se doutait pas qu'il faisait le même calcul dans son esprit.
Elle n'ose pas afficher le sourire las qui lui démange pourtant le coin des lèvres. Va-t-elle revenir ? C'est bien son intention, c'est bien ce qu'elle a affirmé à Bass, c'est bien ce qu'elle se répète intérieurement... Mais regardez ce monde... Il y aura toujours une part d'incertitudes. Les routes ne seront plus jamais sûres et les périples seront peuplés de survivants, de morts, de pillards et de bêtes en tout genre et c'était pas avec une arme jamais entièrement chargée et sa hachette qu'elle viendrait à bout de tout. Alors elle ne fait jamais de promesses Malini. Quand elle part, elle ne dit jamais qu'elle reviendra. "J'ai l'habitude des routes maintenant, je compte pas me perdre au Canada." Mais contre argumenter – avec sarcasme de surcroît – n'est pas vraiment la solution, alors elle reprend sur un ton un peu plus doux, un peu plus rassurant. "Bien sûr que je reviendrai Abel. Peu importe ce que je trouverai là-bas, ma vie est ici maintenant." Ici, près de Silas. Et elle a presque envie de lui en vouloir de croire, même pendant quelques secondes, qu'elle pourrait abandonner le garçon pour toujours. "La route est dangereuse, je sais, mais je ferai toujours en sorte de revenir." Et il y a ce dernier détail aussi : elle ne sera pas seule. Bass l'accompagne, et il ne serait peut-être pas venu si c'était pour abandonner complètement Olympia. Elle n'aurait pas eu le coeur de le lui demander de toute façon, mais aurait-elle eu le coeur de briser le sien encore une fois ? La réponse à cette question l'effraie quelque peu. "Je pars avec Bass. A deux, on a plus de chances de s'en sortir de toute façon." Elle énonce, comme si de rien n'était. Il y avait deux choses qui pourraient bien agacer le leader sans qu'il en soit surpris pour autant : elle affirmait qu'elle partirait, peu importe ce qu'il avait à en dire, et en plus elle partait avec un olympien qu'il ne portait pas forcément dans son coeur. Et c'était plus qu'un euphémisme de le dire.
"Enfin bref." Elle étend devant lui la carte qu'elle tenait entre ses mains. Les traits rouges étaient marqués ci et là avec une idée approximative du temps de marche entre chaque distance et avec les bourgs et villes marqués au fur et à mesure. "C'est la route qu'on compte prendre." Du doigt, elle pointe Coosada sur la carte, espérant naïvement que ça ferait suffisamment diversion pour qu'il ne fasse pas de remarques sur son compagnon de voyage.
Sujet: Re: you only hate the road when you're missing home Ven 16 Fév - 1:23
Malini Abel « you only hate the road when you're missing home »
Un pâle sourire, sans joie, étira ses lèvres alors que Malini évoquait le Canada. Abel n’était guère d’humeur à goûter à cette plaisanterie et fort heureusement la recruteuse s’en tint là ; aussi ne prit-il pas la peine d’y rétorquer, lui laissant l’opportunité de continuer sur sa lancée au lieu de déclencher un micro conflit. « Je ne parlais pas des dangers de la route » lâcha-t-il simplement au détour d’une pause. On pouvait faire toutes les promesses du monde, aucune ne vaudrait quoi que ce soit face à un rôdeur prenant le dessus, ou le flingue d’un individu mal intentionné. « S’il y a bien quelqu’un, ici, capable de tirer son épingle du jeu sur un aussi long trajet, c’est sûrement toi. » Simple constat plutôt que compliment, après tout ce n’était pas sur un simple coup de tête qu’il l’avait recrutée. Abel, toutefois, accepta de ne pas remettre en doute les paroles de la cavalière, accepta la sincérité qu’il lui semblait trouver dans sa voix, le ton plus radouci et le regard qui ne vacillait pas. Malini méritait au moins qu’il lui accorde le bénéfice du doute, et qu’il s’abstienne de chercher la petite bête dans les tournures de ses phrases. Malini méritait sa confiance ou, en tout cas, une partie de ce qu’il était encore capable de donner à quiconque.
« Ferguson ? » Il haussa un sourcil interrogatif et derrière ce simple mot se cachaient bien d’autres questions, qu’elle n’aurait sans nul doute aucun mal à déchiffrer. Pourquoi se choisir un olympien en guise de compagnon de voyage, pourquoi lui et surtout depuis quand Malini, l’une des personnes les plus solitaires ici et apte à survivre de cette manière, estimait avoir plus de chance avec un binôme ? Une partie de cette réponse était évidente, le reste ne le concernait pas vraiment et il n'avait pas l'intention de lui tirer les vers du nez sur ce sujet. Au moins la recruteuse, dans sa lubie soudaine, ne le privait-elle pas de l’un de ses hommes – il pouvait bien lui autoriser ce voyage, mais plus difficilement laisser filer avec elle quelqu’un d’autre qui avait plus d’utilité ici qu’avec elle sur les routes. Quant au frère de Jamie, s’il ne le connaissait pas réellement et l'appréciait encore moins – réciproque, il le savait, en avait l’habitude et s’en fichait –, il lui fallait admettre qu’il faisait probablement partie de cette petite, toute petite poignée d’olympiens pour qui le leader des cavaliers éprouvait du respect. Malini aurait pu choisir pire compagnon de voyage que celui-ci, et Abel ne serait pas parmi ceux à regretter sa mort éventuelle au cours du trajet. Gardant toutefois ses remarques pour lui, il tourna son attention vers la carte qu’elle aplanissait sur son bureau, étudiant le chemin décidé, ne pouvant pas après tout prétendre qu’il n’accordait aucun intérêt à ce qu’elle avait bien l’intention de faire là-bas. « Tu devrais éviter Brenham. » Il releva finalement les yeux vers elle après quelques longues minutes de silence perdues dans la contemplation du trajet marqué en rouge. « Aux dernières nouvelles, il y avait un groupe assez important qui s’en était approprié la partie ouest. » Et peu importe que ces dites nouvelles ne soient pas fraîches, datées d’une semaine ou d’un mois, le risque était présent. Et toujours plus important quand il concernait d’autres survivants car, si l’objectif des rôdeurs était simple à concevoir et donc à parer, on ne pouvait pas lire aussi aisément dans l’esprit des autres vivants. Peut-être qu’ils étaient morts, peut-être qu’ils étaient pacifiques. Peut-être que non. Abel repoussa la carte vers elle du bout des doigts, ses yeux rivés à ceux de l’indienne. « Tu peux lui faire confiance, Malini ? Tu es sûre de ça ? » Bass, évidemment. Et à vrai dire, Abel aurait eu moins de réticence à savoir qu’elle partait seule,, pour ce qu’il savait ce qu’elle valait, elle. « Vu la distance que t’as à parcourir, t’as un sacré paquet d’imprévus qui vont probablement te retomber sur la gueule. La dernière chose dont t’as besoin, c’est d’une raison supplémentaire pour être ralentie… »
Sujet: Re: you only hate the road when you're missing home Ven 23 Fév - 22:50
malini abel « you only hate the road when you're missing home»
Abel et Malini commencent à avoir un sacré passif ensemble, un passif fait de petites querelles, de disputes plus violentes et de quelques moments de complicité autour de l’éducation de Silas. Un passif lourd à porter parfois, surtout quand les discussions aussi sérieuses les tordent tous les deux. Si elle ne le comprend pas toujours, si elle n’est pas non plus d’accord avec lui la plupart du temps, ça n’empêche pas la recruteuse d’apprécier le leader du ranch, et de ce fait, ça ne lui fait pas forcément plaisir de lui balancer sa requête à la figure. Elle entend dans sa voix les questions qu’ils ne posent pas et les réticences qui se sont immédiatement dressées au moment où elle avait formulé sa demande. Et c’est grâce à ces mêmes connaissances qu’elle est parvenue à déchiffrer la surprise de savoir qu’elle partait accompagnée, et pas de n’importe qui. Elle hoche la tête pour confirmer, bien que la question fût plutôt rhétorique. Bass Ferguson, oui, celui qui avait réussi à ravir son cœur et à la pousser à changer. Bass Ferguson encore, qui n’avait jamais faibli devant Abel quand d’autres ont tendance à changer de trajectoire – possiblement une des raisons pour laquelle Abel n’est pas le premier fan du recruteur.
Mais l’aîné des Rhodes s’arrête là, à la grande surprise de Malini qui préfère alors ne pas s’enfoncer sur cette voie. Au lieu de ça, il contemple la carte pendant que la recruteuse l’observe, un peu sur la retenue, un peu décontenancée face à l’absence de réaction du leader. Elle qui pensait s’attendre à tout ne s’attendait finalement pas à ça. Il l’avait habituée à être plus cassant, plus méfiant… Peut-être finalement lui accordait-il le crédit qu’elle attendait depuis longtemps de sa part ? Une grande nouvelle. Elle hoche la tête quand il lui prodigue de précieux conseils sur son trajet, note mentalement le nom de Brenham, mais elle n'en baisse pas moins sa méfiance. Un acte justifié quand finalement la question presque redoutée sort. Juste après vient une pâle tentative d'expliquer son raisonnement, mais la recruteuse n'entend pas vraiment cette justification. Elle joint ses deux bras au-dessus du bureau et se penche, comme pour confesser quelque chose. Elle n'a aucune idée d'où lui sort cette posture, mais elle est presque sûre que c'était tout ce que ses professeurs faisaient quand ils voulaient discuter d'un sujet sensible : c'est un peu la pose du pédagogue. Et avec la même voix douce, comme si elle s'adressait à Silas plutôt qu'à Abel, elle affirme : « Je lui fais entièrement confiance. » Et tout comme lui, dans une tentative d'expliquer par la raison une réponse qui lui est venue spontanément, elle ajoute. « Il a l'habitude de l'extérieur aussi, il tient bien la route et il sait très bien se défendre. On a eu l'occasion de se croiser plein de fois en dehors des murs, et on fonctionne bien ensemble. » Et aussi et surtout, elle a besoin de lui, de son soutien, de sa présence et de ses bras pour s'endormir la nuit. « Il ne va pas me ralentir. Et il n'est pas une menace. »
Lèvres scellées en un demi-sourire supposé être rassurant, l'Indienne observe son vis-à-vis sans pour autant être sûre que ses réponses soient vraiment celles auxquelles il s'attendait. Avec Abel, il semblait souvent y avoir deux niveaux de conversation, celle verbalisée et celle qu'il cachait dans son esprit où il jugeait des réponses à des questions qu'il ne posait pas. Alors elle tente le tout pour le tout : « S'il y a quelque chose d'autre qui t'inquiète vraiment dans tout ça, on devrait en parler maintenant. » Parler à cœurs ouverts, parler impressions et inquiétudes.
Sujet: Re: you only hate the road when you're missing home Jeu 15 Mar - 17:57
Malini Abel « you only hate the road when you're missing home »
S’il y avait quelque chose d’autre qui l’inquiétait ? Evidemment que c’était toujours le cas, la paranoïa constante de laquelle il était affublée ne venait jamais sans son lot de regards par-dessus l’épaule et pensées aptes à le maintenir éveillé toute une nuit durant. Les inquiétudes, Abel en éprouvait treize à la douzaine quotidiennement, pour sa propre vie, celle de son fils, de ses proches, de son ranch. Mercy était partie à Austin et avait mis quatre mois pour en revenir. Jamie était parti en traque et avait disparu plus d’un an. Alors bien sûr qu’il s’inquiétait du départ de Malini, ou de son non-retour plutôt. Pour chaque personne en qui il avait foi et qui s’éloignait du ranch, c’était une opportunité de plus à saisir pour ses détracteurs, une disparition propice, une mort malencontreusement rencontrée au détour d’un chemin. Il pouvait lui dresser, à Malini, une liste des raisons pour lesquelles elle était susceptible de ne jamais remettre un pied au ranch mais à quoi cela servirait-il ? Rien. Au final elle partirait tout de même. Quant à Bass eh bien, il faudrait bien qu’il se contente de l’opinion que la recruteuse avait de lui ; de toute façon, il n’avait pas réellement son mot à dire et si elle avait parfaitement compris qu’il désapprouvait ce choix alors il n’y avait rien de plus à rajouter. Malini s’en allait pour une mission qui ne concernait en rien le ranch, de ce fait elle pouvait bien se choisir n’importe qui pour faire la route avec elle et du moment que cela n’incluait pas un autre cavalier, alors il n’en avait cure.
Abel haussa les épaules, balayant la proposition de Malini de ce simple geste. « C’est un long voyage, beaucoup de choses peuvent arriver. » En discuter maintenant ne servirait à rien, n’empêcherait rien. Et Abel n’avait pas spécialement de conseils de survie en milieu hostile à donner à quelqu’un qui avait sans le moindre doute des compétences largement supérieures aux siennes dans ce domaine. Si d’aventure il fallait que sa recruteuse se heurte à plus gros morceau qu’elle en cours de route, alors il n’y aurait de toute façon rien qu’il puisse faire. Quant à ses inquiétudes, il préférait les garder pour lui, s’était toujours très bien démerdé avec sans avoir besoin de s’en ouvrir à qui que ce soit. Aujourd’hui n’allait certainement pas faire exception à la règle. « Je te laisse cinq jours de vivres, pour une personne. » Bass se débrouillerait, évidemment, il n’était pas de son clan donc Abel ne lui devait rien. La proposition était honnête, presque généreuse venant de lui, après tout elle ne s’en allait d’ici uniquement parce qu’elle le voulait bien ; il n’aurait même pas été tenu de lui donner un jour. « Le reste, vous vous en chargerez par vos propres moyens. » De toute manière, se surcharger au départ n’était bon qu’à se faire ralentir et se voir transformé en proie facile. « Concernant les munitions… » Le sujet était un peu plus épineux, c’était autre chose. Et si les cavaliers disposaient d’un arsenal tout à fait honorable, il n’en restait pas moins qu’ils n’étaient jamais à l’abri d’un conflit, d’une attaque soudaine. « Tu verras avec Lincoln, il décida au terme de quelques secondes de réflexion. Il saura mieux que moi décider ce qu’il peut te laisser emporter, ou non. » Son stock, sa production après tout. Abel gardait un œil vigilant sur ce que l’armurier faisait, mais avait au moins confiance en lui pour prendre ce genre de décisions. Il n’aborda pas le sujet du moyen de transport, en ce que la réponse était évidente aussi bien pour l’un que pour l’autre et qu’aucune concession ne pourrait être faite là-dessus. Pour autant, il n’en avait pas encore fini avec les questions, et cela se discernait sûrement dans son attitude.
En quelques gestes sûrs, marqués par la rapidité de l’habitude, le leader des cavaliers se roula une clope qu’il ne tarda pas à porter à ses lèvres puis à allumer. « Pourquoi maintenant, Malini ? Après tout ce temps passé ici. Quelle foutue mouche t’as piqué pour que tu te carres cette idée en tête ? » L’espoir, il le comprenait mais… après autant de temps ? En toute honnêteté, les chances étaient minces. Et s’il avait déjà pu assister à bien des retrouvailles tenant littéralement du miracle sur ces dernières années, il ne croyait pas aux chimères pour autant, préférant faire preuve de fatalisme là où d’autres se seraient obstinés sans relâche. « Une explication honnête et sensée serait que tu aies eu des nouvelles récentes, mais c’est pas le cas, pas vrai ? »
Sujet: Re: you only hate the road when you're missing home Mar 27 Mar - 16:43
malini abel « you only hate the road when you're missing home»
Est-ce que c’était de l’inquiétude qu’elle percevait dans le comportement d’Abel ? Qu’est-ce qui le tracassait vraiment ? Qu’elle parte ? Le compagnon qu’elle avait choisi pour sa route ? Le fait qu’elle puisse ne pas revenir ? Il pouvait bien se passer mille choses derrière sa mine fermée, il n’en toucherait sûrement pas un mot à la recruteuse. Parfois, Abel appliquait la loi du silence avec un peu trop de dévouement. Une constante qu’elle pouvait comprendre, elle-même n’ayant pas été la personne la plus loquace ces dernières années, surtout quand il s’agissait d’exprimer ses ressentis. Et finalement, comme à son habitude, il finit par éluder la question, par retourner vers des sujets plus terre à terre pour s’éviter les débâcles à cœur ouvert. C’est fou comme parfois ils se ressemblent. Il expédie le reste de ses instructions, l’air de dire qu’il signait la fin de cet entretien. Malini ne partait peut-être pas avec sa confiance, mais au moins elle avait son accord. Il était même disposé à lui donner des vivres, alors même qu’elle ne demandait rien – elle ne s’attendait pas à autant en entrant dans son bureau. « Merci Abel… Et ne t’inquiète pas pour les munitions. Je partirai avec le minimum. On se débrouillera en chemin. » Comme toujours, comme à chaque obstacle qu’ils n’ont plus le choix de surmonter maintenant.
Elle a envie de rajouter quelque chose, peut-être lui dire que ce qu’il fait compte pour elle ? D’une certaine manière, mais ils n’ont pas l’habitude de parler de ça, pas l’habitude d’être vraiment eux-mêmes l’un face à l’autre. Abel Rhodes a-t-il seulement parfois l’occasion d’être lui-même ? N’est-il pas coincé constamment dans le costume de chef, avec tous les désavantages que ça implique ? Rares sont les fois où il laisse sortir l’homme derrière le leader. Mais chaque masque tombe, les fissures finissent par devenir béantes et les habitudes les plus tenaces peuvent parfois être complètement bouleversées. C’est du moins le sentiment qu’elle ressent quand il lui demande pourquoi. D’aucun dirait que c’est une question légitime, mais elle ne se pose jamais avec autant de justesse entre eux. Un sourire triste peint le visage de la recruteuse quand elle lève la tête vers le plafond et qu’elle se met à imaginer le bureau de son père à la place. « Non, je n’ai aucune nouvelle… Ce n’est pas ça. » C’est plus compliqué, plus étouffant dans sa poitrine que le simple espoir justifié de savoir sa famille en vie. Mais dès le départ elle avait eu du mal à mettre des mots sur la mélancolie qui l’enserrait parfois. La nuit, elle se réveillait sans raison et elle pensait à Coosada, encore plus qu’avant. Le besoin oscillait entre douce lubie et terrible obsession. Elle avait encore en tête l’après-midi à éplucher frénétiquement tous les magazines de l’infirmerie d’Olympia dans l’espoir de trouver un cliché volé de sa famille.
« Imagine… Imagine que tu t’étais réveillé un matin et qu’on t’annonce que toutes les communications radio sont interrompues, que les réseaux de téléphone sont morts, que l’électricité menace de lâcher… Maintenant, imagine que tu es à l’autre bout du pays, loin des personnes qui te sont chères. Imagine que tu n’avais plus Jenna, ni Caden, que t’étais coincé tout seul dans le New Jersey avec Silas seulement. Maintenant imagine qu’il tombe malade et qu’il meurt dans tes bras et que tu ne peux rien faire d’autre qu’espérer errer jusqu’à un endroit un peu plus familier. Tu es seul, tu es désespéré, tu passes des mois comme ça à éplucher la route, sans but. Peu à peu, le visage de ton fils s’estompe, les souvenirs précieux disparaissent lentement. Tu te retrouves avec toi-même et ta douleur que tu renies et qui te rend défectueux. Est-ce que ça ne te rendrait pas fou ? Est-ce que ça ne te donnerait pas envie de retrouver l’endroit où tu as vécu toute ta vie pour essayer de récupérer un peu de la chaleur du passé ? » Elle souffle sa confession d’une traite, la voix parfois hésitante, parfois affirmée. « Y a des matins, je me lève et je suis perdue. Il me faut quelques secondes pour me réajuster à une réalité où on m’a tout pris… » Les yeux fixent ses doigts qui serrent son jean et les ongles ont l’air de déchirer la peau des cuisses malgré la barrière des vêtements. Elle a raconté cette histoire tellement de fois dans sa tête qu’elle espère pouvoir le dire sans pleurer. Surtout pas devant Abel. Et elle prend plusieurs grandes inspirations. « Tu te souviens quand on s’est rencontrés ? Tu m’as demandé où j’allais. Je t’ai dit que je ne savais pas, mais qu’un jour je retournerai en Alabama. C’est maintenant, Abel. »
Sujet: Re: you only hate the road when you're missing home Mar 3 Avr - 19:27
Malini Abel « you only hate the road when you're missing home »
Evidemment que Malini touchait une corde sensible en faisant le parallèle entre sa propre fille, morte, et Silas, et il aurait été absurde de prétendre l’inverse, d’affirmer qu’au fur et à mesure du long monologue de la cavalière, Abel était incapable de se mettre à sa place, de comprendre ce qu’elle lui décrivait. Il avait tendance à oublier, trop souvent, le fait que Malini avait été mère, mais qu’elle n’avait pas eu sa chance, pas son luxe quant au droit de conserver sa famille, sa descendance. Ce qu’il ne risquait pas d’oublier en revanche, était cette expédition en binôme avec Mercy, où il s’était retrouvé nez-à-nez avec un rôdeur qui devait avoir l’âge de Silas et une certaine ressemblance dans la silhouette. Il avait failli se faire tuer ce jour là, d’être incapable de faire face à ce gamin pour ce qu’il n’avait pu s’empêcher de voir son fils à sa place, et de ne pas pouvoir lever son arme contre lui en conséquence. La simple pensée de la mortalité de l’enfant, de la possibilité non négligeable qu’il puisse se faire infecter, suffisait à susciter une terreur noire en lui. S’il venait à le perdre un jour, il ne savait pas, en toute honnêteté, la manière dont il réagirait, ce qu’il ferait ensuite. Fou. C’était possible, oui. Probable, en fait. Et son silence, après la question qu’elle lui posa, valait bien tous les acquiescements possibles. Parce qu’elle savait où frapper juste, Malini, elle ne connaissait que trop bien ce point faible ; elle avait été aux premières loges pour constater l’état du leader du ranch en février de l’année passée…
Abel hocha doucement la tête, les yeux fixés sur le visage de l’indienne. Bien sûr qu’il se souvenait. Ce n’était pas tous les jours qu’il se chargeait, lui, de recruter quelqu’un, ceux-là se comptaient d’ailleurs sur les dix doigts de ses mains même après tout ce temps. Et chacune de ces rencontres l’avait marqué d’une manière ou d’une autre alors ce genre de détails, il ne risquait pas de les oublier. « Mais tu as conscience que tu as plus de chances de retrouver face à des ruines, des cadavres inanimés si tu as de la chance, sinon ils seront juste partis. » Il savait qu’elle s’en doutait, elle n’était pas idiote. Mais il voulait l’entendre de sa propre bouche, être bien certain qu’elle n’était pas aveuglée par une obsession qui avait grandi au fil des ans jusqu’à finir par prendre trop de place pour juste être ignorée, laissée de côté une fois encore. L’espoir… l’espoir pouvait tuer, dans ce genre de cas, si on le nourrissait trop pour ne se retrouver au final que face à un tas de cendre, les poussières de souvenirs passés. « Même si ta famille était encore vivante, elle pourrait très bien avoir quitté la ville, voire l’état. » Par envie ou par choix, mais tellement de choses pouvaient arriver durant autant de temps. « Et tu sais très bien que les probabilités pour qu’ils soient morts, tous, sont plus importantes… pas vrai ? » Il ne cherchait pas à la décourager, non, il n’essayerait pas plus de l’inciter à rester une fois qu’elle avait pris sa décision parce qu’il savait très bien que Malini ne fonctionnait pas de cette manière. Il lui avait donné son aval pour qu’elle s’en aille et, maintenant que c’était chose faite, il se tiendrait à sa parole. Non, ce qu’Abel voulait juste c’était être sûr. Sûr de ce qu’elle faisait, sûr qu’elle n’entretienne pas des chimères, sûr enfin de bien la comprendre, elle. Il avait besoin, pour être bien certain qu’il ne lui ouvrait pas les portes pour la voir s’évanouir dans une quelconque folie. Parce que s’il s’était toujours plus ou moins douté qu’elle finirait par lui échapper un jour, Malini, ce n’était pas de cette manière qu’il avait envie de la perdre. « Qu’est-ce que tu feras, si tu les retrouve ? » Eux, ou une piste à suivre, n’importe quoi. Il n’avait pas oublié son affirmation, asséné avec certitude quelques minutes plus tôt mais, et s’ils étaient vivants, mais qu’ils ne voulaient pas venir ici ? Est-ce qu’elle serait réellement capable de faire demi-tour en les abandonnant sur place, après ce discours plein de ferveur qu’elle venait tout juste de lui tenir ? Peut-être qu’au final, Abel avait bien plus de questions à lui poser, encore, que ce qu’il n’avait semblé au premier abord. Peut-être que son intérêt sur la question, son intérêt pour elle, étaient bien plus poussés que ce qu’il ne voulait bien laisser paraître. Parce qu’il n’y avait pas tant de personnes que ça qu’il avait pris le temps d’apprécier ici, alors, pas étonnant au fond qu’il ne veuille pas la laisser partir sur un coup de tête.
Sujet: Re: you only hate the road when you're missing home Mer 11 Avr - 15:50
malini abel « you only hate the road when you're missing home»
Il y a une certaine pression dans les mots d’Abel, dans la façon qu’il a de s’assurer qu’elle part en toute conscience. Il n’a pas tort de s’enquérir de son état d’esprit cependant, Malini avait déjà, par le passé, entrepris des actions dangereuses et irréfléchies, limite suicidaires même. Alors ce départ, ce voyage en terre natale, ça pourrait être une autre impulsion à mettre sur la liste. Il a raison d’insister, il a raison de la mitrailler de questions sur ce qu’elle faisait et surtout, sur ce qu’elle comptait faire…
Mais pour une fois depuis très longtemps, Malini a les idées claires. Elle sait ce dont elle a envie, elle a monté un plan et elle ne compte pas s’écarter de ce qu’elle a prévu de faire. Elle est prête, physiquement et mentalement aussi. Depuis qu’elle fréquente Bass, depuis qu’il lui a redonné le goût aux plaisirs simples, depuis qu’elle a pris conscience que sa vie n’était pas finie, qu’elle était encore jeune, qu’avoir une famille n’était pas exclu… elle allait mieux. Une famille oui, pourquoi pas ? Nombreuses étaient les femmes à être tombées enceintes et à être allées au bout de leur grossesse sans trop de difficultés… L’idée qu’elle puisse repasser par cette case ne lui avait pas fondamentalement déplu. Et elle était sûre que Bass en serait plus que ravi et qu’il ne partirait pas. Il ne l’abandonnerait pas. Mais ça, c’était pour plus tard, pour d’autres conversations, une fois ce voyage entamé. Ça, ce serait pour quand elle arriverait finalement à lui dire qu’elle l’aime et qu’elle l’aime depuis longtemps déjà.
« Abel… » Elle va pour le rassurer, mais la dernière question lui coupe tout bonnement la parole et lui court-circuite l’esprit. Elle n’y a pas réfléchi à ça, à cette possibilité. Elle commençait à peine à s’habituer à l’idée de ne plus jamais les revoir, mais maintenant il lui mettait sous le nez l’option qui tiraillait les dernières cordes d’espoir et donc l’option qu’elle redoutait le plus. «Je ne suis pas naïve… Je me suis déjà faite à l’idée de ne jamais les retrouver. Ce n’est pas ce que je vais chercher là-bas, j’y vais pour retrouver des souvenirs… Des photos, des bibelots, de quoi me rattacher à quelque chose. » Et si elle les retrouve, eh bien… elle improvisera. Elle pousserait ses deux mondes à entrer en collision s’il le faut, ça ne l’effraie pas finalement. Sa sœur, sa mère, elle trouverait les moyens de les faire venir s’il le fallait. Olympia était un bon argument dans sa poche. Ce n’est pas à Coosada ou dans les parages qu’il y aurait une ville autonome et résistante à la chute de la civilisation.
Les doigts de la recruteuse entreprennent un geste osé, sa main va chercher celle d’Abel, une tentative d’établir un contact bienveillant compte tenu des mots qu’elle s’apprête à lui dire : «Je ne compte pas oublier comme par magie tout ce vous avez fait pour moi ces dernières années. Silas, toi, et bien d’autres têtes dans le coin, vous êtes comme de la famille aussi. » Elle s’arrête, baisse les yeux puis récupère sa main avant de terminer : « Je pourrai pas vous abandonner, si c’est ce qui t’inquiète. » Quelques mots… Bien plus que tout ce qu’ils ont pu se dire ces dernières années, quelques mots qui l’ancrent maintenant dans ce coin perdu au milieu du Texas où elle a passé plus de trois ans. Et les années après la fin du monde comptent triple. Si ça ne répond pas vraiment à sa question, Malini espère au moins que ces quelques mots le convaincront qu’elle tient particulièrement à eux.
Sujet: Re: you only hate the road when you're missing home Sam 5 Mai - 20:27
Malini Abel « you only hate the road when you're missing home »
Il resta raide à son contact, manqua de retirer sa main dans un geste brusque mais contenu à grand peine face à l’initiative imprévue de Malini. Initiative qui lui fit d’ailleurs hausser un sourcil tout à la fois perplexe et surpris, tandis qu’il s’astreignait finalement à l’écouter parler sans bouger davantage. « J’ai besoin de toi ici », il se contenta simplement de rétorquer d’une voix qu’il voulait la plus neutre possible. « Tu es ma meilleure recruteuse. » Il mit un soin tout particulier à ignorer l’allusion à la famille, pas assez sentimental pour accepter la remarque et s’y ouvrir davantage. S’attarder sur les compétences de l’indienne plutôt que sur ce qui faisait qu’il l’appréciait en tant que personne s’imposait, de fait, tout naturellement chez lui afin de masquer le reste, de rester retranché comme à son habitude derrière ses barrières. « Enfin, je me contenterai de ta parole. » Avait-il seulement le choix ? Non, il ne s’inquièterait pas, ou peut-être si elle tardait vraiment trop à revenir. Parce que s’il devait croire ce qu’elle lui disait, alors son absence prolongée ne pourrait signifier autre chose que sa mort, ou toute autre situation fâcheuse du même genre. Quelques secondes s’écoulèrent, silencieuses, durant lesquelles il s’occupa à terminer sa roulée tandis que son regard semblait s’être perdu dans le vague. Puis le cavalier sembla revenir à lui, écrasa le mégot dans le cendrier d’un geste qui avait retrouvé tout son dynamisme et se pencha légèrement au dessus du bureau, les avant-bras croisés et posés sur le rebord de la surface patinée du bois. « Ceci étant réglé, reprit-il dans un but évident de balayer toute cette conversation pour retourner à des sujets d’ordre pratique, dans lesquels il était mieux à son aise, il faudra que tu me désigne quelqu’un pour te remplacer en ton absence. J’ai confiance en ton jugement pour ça alors, je me contenterai d’un nom. Je compte sur toi pour veiller à ce que les dernières personnes que tu as ramenées ici soient placées entre de bonnes mains (double interprétation ici : sous bonne garde, les nouveaux étant généralement étroitement surveillés le temps de leur intégration) avant ton départ et… » Il s’interrompit, la contempla un moment sans rien dire jusqu’à ce que, finalement, un léger sourire s’en vienne retrousser les commissures de ses lèvres. « Bah, je présume que dans la mesure où tu n’avais certainement pas l’intention d’accepter un refus de ma part, tu as déjà commencé à prendre tes dispositions avant de venir me voir, non ? » Le propos n’était pas accusateur, et pas la moindre pointe de reproche ne perçait à travers le ton tranquille de sa voix. Malini était ce qu’elle était et lui… il avait appris à faire avec au fil des ans. « Tu comptes partir quand ? » Abel se doutait bien qu’elle ne venait pas là pour lui annoncer un projet qui serait mis en place d’ici deux mois, et qu’il fallait qu’il s’attende à une réponse du genre “le plus tôt possible” mais avoir une date plus précise était tout de même appréciable. « Silas est au courant ? » Entre le père et l’enfant, ce dernier serait sûrement celui qui encaisserait le plus mal le départ de la recruteuse. Un mois, voire plus. C’était long, pour un gamin de dix ans, et apprendre la nouvelle au tout dernier moment ne le mettrait certainement pas en joie.
Sujet: Re: you only hate the road when you're missing home Ven 11 Mai - 23:33
malini abel « you only hate the road when you're missing home»
Tu es ma meilleure recruteuse. Malini a un sourire en coin. Venant d'Abel, c'était le maximum qu'il puisse faire en termes de déclaration, c'était une marque de respect dont elle se contenterait. Peut-être qu'il valait mieux effectivement rester dans les sentiers battus, dans le côté terre à terre et professionnel même, plutôt que de prendre des chemins plus sensibles. S'émouvoir était une mauvaise idée même, ça pourrait être un frein à son départ. Ce n'était pas maintenant qu'elle devait s'attarder sur ce qui la retenait au ranch, maintenant elle devait laisser son esprit s'évader jusqu'à Coosada et faire le tour de son jardin, de ses souvenirs. Peut-être que la balançoire serait encore debout et qu'elle pourrait s'y poser et se remémorer plus précisément les fois où elle discutait de l'école et de la vie avec sa fille, toutes les deux assises sur une nacelle. Son objectif était fixé, immuable, et Abel s'en doutait évidemment. Aussi, les formalités laissèrent rapidement place à la prise de conscience du leader des lieux. La recruteuse hoche la tête en guise de réponse. Bien sûr qu'elle a déjà prévu le coup, voilà plusieurs semaines qu'elle chine ci et là et des outils et des objets utiles à sa survie. Bass et elle avaient déjà quelques vivres, des préparations à base d'herbes en cas de blessure ou de maladie.
Puis vient la question fâcheuse, la question qui revient toujours entre eux, rappel de leurs responsabilités à chacun. « Non, je ne lui ai encore rien dit. Je voulais attendre ton aval. » Mais ce n'était pas vraiment son accord qu'elle attendait. Elle attendait qu'il soit prêt une fois que la tristesse de son fils irait le chercher comme un exutoire. Malini savait très bien ce qu'en dirait l'enfant. Il ferait sûrement mine de comprendre d'abord, puis il y aurait une colère plus passive qui se manifesterait, un sentiment d'abandon qui prendrait de plus en plus de place, peu importe qu'elle le rassure mille fois chaque jours. Il n'était pas dupe, il connaissait les risques. Le silence qui suivit était d'ailleurs bien plus significatif, ils savaient tous les deux que ça ne se passerait pas forcément très bien comme discussion. « J'aimerais partir le plus tôt possible. Miller prendra les rênes à ma place, j'ai suffisamment travaillé avec lui pour savoir qu'il en est capable. On a déjà planifié ensemble les prochaines campagnes de recrutement, les zones à explorer, celles à éviter. C'est réglé, mais n'hésite pas à revoir les détails avec lui. » Sans s'en rendre compte, elle glissait dans la même stratégie que l'aîné des Rhodes, elle évitait les conversations trop difficiles, les mots trop durs à prononcer et s'en tenait aux faits. Rien que les faits. Les faits ne blessent personne. « J'ai quelques détails à régler à Olympia avec Bass, mais je reviendrai avant de partir. J'ai encore rien dit à Wyatt, mais y a moyen qu'il fasse un feu de joie après mon départ. J'espère que tu lui donneras beaucoup de boulot, comme ça il n'aura pas le temps de se réjouir suffisamment que je serai de retour. » C'est avec un petit sourire aux lèvres qu'elle finit par se lever, préférant mettre fin à cet entretien. De toute façon, il valait mieux le laisser digérer plutôt que d'agiter d'autres mauvaises surprises sous son nez.
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Sujet: Re: you only hate the road when you're missing home