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 just when I thought things couldn't get any worse...

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Abel Rhodes
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MessageSujet: just when I thought things couldn't get any worse...   just when I thought things couldn't get any worse... EmptyMar 14 Mar - 22:02



Beckett & Abel
« just when i thought things couldn't get any worse...


Son père était mort. Victime supplémentaire de la maladie qui continuait ses ravages en laissant derrière elle des rangées de cadavres, le fait en lui-même n’avait rien de surprenant : affaibli, plus guère capable de grand chose depuis quelques années, il n’avait même pas lutté contre le virus qui l’avait emporté avec lui à l’issue d’une montée de fièvre particulièrement virulente. Mais tout de même, ça lui faisait drôle, à Abel : son père avait toujours un point d’ancrage dans sa vie, un modèle, un élément qui persistait à se tenir présent envers et contre tout. Malgré son absence du devant de la scène, malgré son incapacité flagrante à faire quoi que ce soit d’autre qu’errer dans la demeure familiale comme une âme en peine et un peu hagarde (quand était-il sorti la dernière voir voir ses chevaux pour la dernière fois ? Voir le campement qui s’étendait à ses pieds ? Tellement longtemps qu’il ne pouvait y mettre une date : le patriarche Rhodes était devenu un mythe pour nombre de riders qui ne l’avaient jamais vu une seule fois en plusieurs années, couverture d’anonymat on ne peut plus efficace dans les rares moments où il lui était encore arrivé de s’aventurer à l’extérieur), il était resté là, roc infaillible. Jusqu’à récemment, l’aîné de ses fils avait encore pris le temps, parfois, se se concerter avec lui quant à certaines décisions qu’il fallait prendre : si depuis que sa femme était morte six ans plus tôt, il avait peu à peu cessé de lutter contre la maladie qui rongeait son corps, il avait encore toute sa tête… du moins, parfois, quand il ne passait pas ses journées plongées dans des pensées tournées vers le passé, vers l’avant.
Son père était mort, donc, et à vrai dire Abel ne savait pas bien comment gérer cette nouvelle. Il ne pouvait pas se prétendre surpris au vu des conditions, mais ça restait difficile à encaisser. Et cette fois, il n’y aurait pas Caden pour le soutenir : d’abord, ils étaient restés en froid depuis l’incident du campement, avec la menace d’une discussion risquant de virer au règlement de compte qui planait au dessus d’eux, mais que personne n’avait tenté d’attraper pour l’instant. Ensuite, le cadet n’avait jamais été proche de leur père, pas comme avaient pu l’être Abel, ou Jenna : c’était même exactement l’inverse. Enfin et surtout, il était encore bien trop amoché par son deuil de Cirilla pour se préoccuper de l’état dans lequel pouvait bien être son propre frère.
Ou du moins, c’est ce que celui-ci avait supposé. A vrai dire, il n’avait même pas essayé d’aller lui parler, de tâter le terrain : on était loin de la complicité qu’ils avaient retrouvé lorsqu’il s’était agi de leur mère. Ils n’avaient échangés que quelques vagues mots, avaient brûlé le corps en même temps que ceux des quelques riders (deux, ce matin-là) attrapés par la grippe et qui avaient également passé l’arme à gauche dans la nuit. Pas de sépulture. Pour quoi faire ? Le culte des morts, ça n’avait plus aucun sens depuis l’apocalypse.
Et la nouvelle, encore trop fraîche, n’avait pas eu le temps de se répandre au sein de la petite communauté.
Alors si ses pas l’avaient machinalement dirigé vers l’écurie (la maison lui semblait insupportablement vide), il n’avait pas bien réfléchi à ce qu’il allait faire là-bas. Il était passé devant le bureau de son frère, avait hésité devant la porte close, sa main s’était portée sur la poignée et il avait finalement renoncé, avait passé son chemin pour continuer en direction des boxes. Les chevaux, au moins, ne risquaient pas de juger son haleine qui refluait l’alcool. Des signes d’agitation parvenant du fond du bâtiment lui firent dresser l’oreille et il pressa le pas, intrigué, traversant l’allée pour ressortir par la porte de derrière, là où était aménagé un espace de travail un peu isolé, plus calme du fait que les écuries se dressaient entre lui et le campement. Là, Beckett semblait aux prises avec un cheval rétif à l’air bien décidé de lui causer quelques soucis. Il ne lui fallut pas longtemps pour la reconnaître, la jeune pouliche baie de trois ans : rejeton du cheval de son père, elle était née dans ce monde en plein changement, habituée aux coups de feux, aux mouvements de foule, aux cris et à l’odeur pestilentielle des rôdeurs qui parvenaient parfois à se faufiler dans les pâturages. Habituée à tout ça, oui, mais visiblement pas à se faire tripoter les sabots par son soigneur. Il s’adossa contre le mur, contempla la scène sur une poignée de secondes puis se décida enfin à causer : « T’as encore fait fuir tout le monde, que tu te retrouves seul ici avec un foutu canasson insolent ? » Loin d’être agressive, la pique avait surtout pour fonction de signaler sa présence à l’homme qui, courbé sur le sabot que la jument tentait désespérément de récupérer, essayait tant bien que mal de faire son boulot et n’avait par conséquent probablement pas perçu l’arrivée d’Abel.
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Beckett Wills
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MessageSujet: Re: just when I thought things couldn't get any worse...   just when I thought things couldn't get any worse... EmptyJeu 23 Mar - 2:45

Beckett & Abel
« just when I thought things couldn't get any worse

Le campement était étrangement calme après les événements qui s’étaient déroulés il y a peu – la grippe, microbe bénin, s’était infiltrée jusque dans les failles des cellules des plus robustes d’entre eux pour leur faire tourner la tête, et si Beckett se savait assez débrouillard pour calmer quelques cow-boys aux ardeurs trop échaudées, il n’en dormait plus comme un loir de savoir que le ranch était aussi faillible que l’intrusion des solitaires avait pu le montrer. C’était là les euphémismes qu’il aimait bien déployer pour se convaincre que la vie toute entière n’était pas en train de glisser doucement d’une pente dont on ne revient plus, puisqu’il n’avait pas bien dormi depuis des années, il ne pouvait cependant pas amputer au ranch de lui permettre de se reposer bien mieux que lorsqu’il alternait le sommeil sur les routes avec Elanor, pourtant, il avait failli d’un événement de pacotille pour lui ramener ses anciens réflexes conditionnés par la peur, le moindre craquement de paille dans la nuit le faisait se réveiller en sueur, resserrant ses doigts sur la batte de base-ball qu’il avait trouvé peu avant d’arriver ici. Sans doute aimait-il bien se plaindre, le bougre, mais le ranch était un confort qu’il ne retrouverait pas de sitôt, malgré ce que ses envies de partir loin d’ici pouvaient bien lui souffler au creux de l’oreille, dans l’espoir fou qu’en cavalant assez loin les rôdeurs finiraient par ne plus réussir à le rattraper. Mais, pour éviter de penser à des jours ensoleillés qu’il ne verrait jamais, il préférait encore s’occuper des quelques bêtes qui gambadaient fièrement dans les pâturages, forcer ses mains à s’agiter pour que les dérives de ses synapses se taisent enfin, il était de ceux, bénis, qui pouvaient se contenter de s’agiter pour oublier la misère qui les entoure, et, conscient de sa chance, il s’affairait à chatouiller les sabots d’une jument encore secouée par les tremblements de sa jeunesse, nerveuse à souhait, plus décidée à danser seule que de laisser le maréchal lui prendre la patte. Il attendait, patient, lui tapotait le chanfrein de caresses délicates et laissait son souffle chaud venir caresser son bras, laissait sa voix de charbon résonner aux oreilles de la bête pour y accorder le battement de son cœur d’équidé énervé, laissant le calme de l’arrière des écuries apaiser la pouliche qui réclamait de l’activité. Elle était assez jeune pour n’avoir connu que le chaos, pourtant Beckett et ses mielleries qu’il avait appris sur le tas eurent l’effet bénéfique de la calmer quelques instants, à peine eut-il le temps d’attraper le sabot qui lui semblait suspect et sa râpe que la jument se remis à danser, se tortillant malgré son pied bien fermement ancré entre les cuisses du survivant – mais ce fut la voix d’Abel qui vint faire comprendre à Beckett en quoi ses efforts avait été vain, il avait encore cru, naïvement, qu’il aurait été possible d’être seul quelques instants.

« Elle est pas insolente, c’est toi qui l’énerve, elle pense qu’elle va sortir. » dit-il en libérant la jambe de l’animal, ne souhaitant pas le blesser, recommençant son entreprise de caresse cette fois en laissant ses doigts se balader sur l’encolure de laquelle commençait à s’échapper la sueur de l’énervement. Il toisa Abel quelques instants, hésita à dire quelque chose puis se ravisa avant de se retourner vers la pouliche, se disant, dans un moment d’éclairement, que la sale gueule du leader était peut-être due à tous les événements récents, et qu’il n’avait pas besoin de lui demander pourquoi il puait l’alcool – lui aussi aimait parfois le réconfort d’une gorgée acide qui lui réchauffait le fond de l’estomac. « Elle s’est un peu éclatée la corne, c’est pas grave mais j’préférerais limer avant que ça le devienne. » La jument ne se calmait pas, pourtant, comme si deux hommes autour d’elle étaient trop à supporter, et les quelques douceurs de Beckett n’y firent rien, il se contenta de poser la main sur son garrot alors qu’elle continuait à claquer ses sabots sur le sol au rythme de son envie de s’échapper du guet-apens. Il cherchait encore quoi répondre à la première parole de son supérieur, soi disant qu’il aurait fait fuir tout le monde, ce qui n’était pas vrai, il aurait, certes, bien aimé avoir cette aptitude envers les quelques mouches qui finissaient toujours par le retrouver (même Mallory, parfois, quand elle arrivait encore à le faire travailler à sa place alors qu’il tombait de fatigue) mais se démarquait plus par son aptitude à se cacher d’elles que l’inverse. « Là où j’ai appris à m’occuper des bêtes y’avait toujours un vieux pour les frapper quand elles s’énervaient avec ou sans raison, » la jument, comme si du manque d’activité des deux présences elle se rendait compte qu’elle ne bougerait pas d’ici semblait se calmer, bougeait moins fréquemment quand la main de Beckett était toujours posée avec assurance sur la bosse de sa fin d’encolure « un jour un des chevaux s’est cabré et l’a tellement piétiné qu’on le reconnaissait même plus. » Il tapota l’encolure de la jument avant de venir lui rattraper le sabot qu’elle lui donna cette fois-ci sans faire de manière, habituée à être patouillée par le maréchal, sans doute se disait-elle qu’après la séance de pédicure il la laisserait brouter de l’herbe en pas trop mauvais état en la ramenant au pâturage, ce qu’il aimait bien faire quand il était seul. « Enfin je sais pas trop pourquoi je te raconte ça, c’est pas comme si c’était intéressant – tu me passes la tenaille ? » Il tendit la main en attendant qu’on réponde à sa demande, le vieux Beckett et ses histoires qu’il racontait à tue-tête quand personne ne voulait les savoir, il était comme ces vieux vétérans qu’on mettait au coin du feu avec un plaid sur les genoux, à toujours vociférer sur les temps de guerres quand les petits enfants s’étaient endormis depuis bien longtemps.

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MessageSujet: Re: just when I thought things couldn't get any worse...   just when I thought things couldn't get any worse... EmptyDim 26 Mar - 15:49



Beckett & Abel
« just when i thought things couldn't get any worse...


Si Abel aurait pu, en vieux con de réac’ qu’il était la plupart du temps, s’offusquer de l’accusation porté sur sa présence (dans les mauvais jours, il lui fallait moins que ça pour s’énerver contre une pauvre âme), il s’abstint cette fois de toute réplique acide, et puis Beckett n’avait probablement pas tort, ou alors pas complètement. Il eut un soufflement amusé, rétorqua sur un ton tranquille : « Tu parles, elle a le même caractère que son bon à rien de père, j’espère juste qu’on en tirera quelque chose de bien après son dressage. » Mais malgré ce qu’il en disait, on pouvait déceler une certaine affection dans sa voix : il l’avait vue naître, grandir, et puisque Caden avait collé une balle entre les deux yeux de son précédent cheval, il n’était pas impossible qu’il se charge personnellement de l’éducation de celle-là, qu’il en fasse le successeur de Vasco. Il ne s’occupait plus vraiment de ça à présent, le temps réclamant son attention ailleurs, mais probablement que ça ne lui ferait pas de mal de replonger dans une de ses activités d’avant l’apocalypse. Et puis, les disciplines de monte western avaient prouvé et re-prouvé maintes fois leur utilité en raid ou en combat alors que la souplesse et la réactivité des chevaux avaient plus d’une fois tiré leurs cavaliers d’une mauvaise passe ; quelqu’un qui comme lui avait grandi et baigné là-dedans était plus à même d’enseigner ces rudiments à un jeune cheval.

Se détournant de la scène, le leader avisa la tenaille un peu plus loin, s’en saisit pour la placer dans la main tendue de Beckett. « C’est pas pire que ces histoires qui se traînent dans le campement si tu veux mon avis. » Et puis pour le coup, ça le dérangeait pas vraiment qu’il lui cause comme ça, ça avait au moins le mérite d’orienter son esprit vers des pensées un peu moins noires qui en plus de ça avaient le mérite de ne pas s’intéresser aux autres problèmes d’actualité qui avaient creusé leur nid dans le ranch. « Certains ici mériteraient un traitement similaire, quand je vois comment ils se comportent. A croire qu’ils pensent que mes chevaux valent pas mieux que des vulgaires machines. » Il ne dirait pas qu’il ne s’y était pas attendu : c’était ce qui arrivait, fatalement, lorsque l’on accueillait des gens venus de tout horizon. Certains des riders avaient dû s’improviser cavaliers sur le tas pour suivre les autres, quoique jusqu’à présent Abel avait toujours veillé à ce que ceux qui partaient en expédition de cette manière fassent preuve d’un minimum de compétence, laissant les débutants aux patrouilles intérieure le temps qu’ils cessent de se plaindre des douleurs qu’ils avaient dans le cul. « Mais enfin, d’après Caden je peux pas flinguer quelqu’un simplement pour avoir levé la main sur une des bêtes, à moins de vouloir me récolter une émeute sur le dos. » Le propos se voulait plaisanterie, tout le monde savait pertinemment qu’Abel avait la gâchette sensible mais jusqu’à preuve du contraire il ne s’était pas encore montré assez con pour agir de la sorte. Evidemment que ça grognerait s’il appliquait une punition aussi radicale à l’une de ces brutes aux bras épais et au cerveau un peu engourdi, qu’il gardait dans ses rangs parce qu’ils étaient efficaces pour la sale besogne nécessaire, mais dont il se serait parfois volontiers passé. Ils seraient beaucoup à trouver ça injuste et en soit, ils n’auraient pas foncièrement tort. Alors Abel les punissait autrement mais, parfois, ça ne l’aurait pas dérangé que l’un d’eux finissent avec un crâne concassé.
« Elle bouge plus d’un poil maintenant », il constata entre deux, complètement hors de propos et la main flattant l’encolure de la pouliche de laquelle il s’était rapproché. « Alors tu vois bien, c’était pas ma faute au final. » Mais elle gardait l’œil agité, il la devinait bien prête à tenter une nouvelle malice quand on ne l’y attendrait plus, il l’avait déjà vue se comporter comme ça à quelques reprises et ça ne l’aurait pas étonné qu’elle leur serve un de ses petits tours ici aussi.
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MessageSujet: Re: just when I thought things couldn't get any worse...   just when I thought things couldn't get any worse... EmptyJeu 6 Avr - 17:19

Beckett & Abel
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La tenaille ne mit pas longtemps à arriver dans la main de Beckett alors qu’Abel vociférait sur l’étalon dont la jeune pouliche descendait – il ne semblait pouvoir communiquer qu’avec colère ou sarcasme, comme si la politesse lui était étrangère, mais, entre lui et les murs de silence dans lesquels se complaisait Beckett, sans doute les conversations seraient riches. Ils ne s’étaient jamais vraiment parlés si ce n’était les formalités du camp, parfois lui faisait-il savoir que tel ou tel cavalier avait la mauvaise manie de défoncer les pieds des chevaux, sans vraiment savoir comme ils pouvaient faire, mais Beckett s’en était accommodé, à faire son petit tour chaque matin pour s’assurer que tout allait bien, prévenir les éclats avant qu’ils ne s’infectent et qu’à défaut de perdre quelques précieux médicaments s’il en restait, ils en viennent à perdre une monture inestimable. Il écoutait Abel se plaindre contre les mauvais traitements que les cavaliers pouvaient parfois infliger aux chevaux tout en s’appliquant à faire sauter les quelques bouts de cornes dans une courbe pas trop dégueulasse, rattrapa sa râpe afin d’accorder le tout alors que la fente que l’on devinait à la pointe du sabot avait disparu. « C’est vrai que les gars d’ici sont pas connus pour leur délicatesse, ni pour leur intelligence. » C’était sans doute pour ça que Beckett se fondait si bien parmi les cavaliers, pas de grandes discussions pour l’endormir à table, personne pour lancer des débats sur les prochaines règles de vie à adopter, rien qu’une masse informe de grands crasseux courbant l’échine devant la famille Rhodes, préférant la simplicité de la soumission qu’au bordel que pouvait être la démocratie. Obéir était bien moins fatiguant que de tenter de s’organiser en groupe, et, d’autant de critiques que Beckett pouvait entendre sur ceux qui habitaient la grande maison, il ne les trouvait pas particulièrement injuste. « Là où je travaillais avant, les bêtes valaient plus chers que les employés, alors c’est sûr que si on faisait mal notre travail on était viré. Mais si tu vires tout le monde pas sûr qu’il reste assez de gens pour faire tourner le ranch. Et si tu les tues tu vas faire fuir ceux qui restent. » Et les nouveaux n’arrivaient pas en assez grand nombre pour remplacer toutes les brutes d’un coup. Beckett, lui qui avant aimait tant se bagarrer dans les arrières salles un peu glauques des bars, n’avait jamais réellement levé la main sur une des bêtes dont il s’était occupé. Quand celle-ci était trop nerveuse et qu’elle ne se calmait pas, bien sûr, il lui était arrivé de tirer un peu sur leur longe pour leur remettre les idées en place, leur rappeler qu’elles avaient un licol autour de la tête, mais sans plus. A vrai dire, il détestait ça, entendre une bête crier, parce que quand les pochtrons des bars étaient trop saouls pour se rendre compte que leur nez était en sang, ou trop fiers pour se retenir de gémir comme des fillettes, les animaux, eux, criaient à la mort dans des notes stridentes qui lui glaçaient le sang et lui résonnaient dans les os. Il n’aimait pas ça, non, ces cris là, alors il ne faisait rien pour les provoquer. « T’inquiètes pas qu’elle refera des siennes, elle aime bien ça, bouger sans réfléchir. » Il laissa échapper la sabot après un dernier coup de râpe, laissant encore sa main s’attarder sur l’encolure de la jument, maigre et unique récompense qu’il avait à lui fournir d’avoir été sage, à défaut d’avoir des friandises dans la poche à lui faire croquer. « Mais elle est pas si bête que ça, c’est sûr que t’en tireras quelque chose. » Avec l’amplitude de ses allures, Beckett mettrait sa main à couper que même les infectés aux jambes les plus dégourdies n’auraient pas le temps de la voir partir qu’elle aurait déjà disparu derrière la ligne d’horizon, le seul problème, c’était qu’il allait falloir trouver un cavalier avec les mains assez fermes pour la contenir quand il faudrait la laisser immobile. « Tu vas trouver le temps pour la dresser ? En ce moment t’as l’air un peu… fatigué. » laissa-t-il hasarder en restant près de la jument, et, par défaut, près du Rhodes à la mine défaite et cernée, il ne se risqua pas à demander si le frère avait la même tête de déterré que lui, surtout pas après ce qui s’était passé quelques jours plus tôt. S’il avait eu vent de quelques rumeurs, Beckett ne se doutait pas de tout ce qui pouvait bien se passer dans cette maison qui lui était inconnue, était étranger à la peine des Rhodes et ne voulait pas la partager, mais, quand il avait tout parié sur les chevaux de la famille Rhodes pour la course de la survie, il préférait les savoir en état de franchir la ligne d’arrivée qu’au bord de l’implosion.
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Abel Rhodes
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MessageSujet: Re: just when I thought things couldn't get any worse...   just when I thought things couldn't get any worse... EmptyMer 12 Avr - 22:30



Beckett & Abel
« just when i thought things couldn't get any worse...


Il avait une logique imparable, Beckett, mais il ne lui apprenait rien de nouveau. On avait beau médire sur son attitude, Abel était encore heureusement suffisamment lucide pour ne pas avoir systématiquement besoin d’un Caden lui murmurant à l’oreille ce qu’il convenait de faire, ou de ne pas faire comme par exemple, buter tout le monde. Parce que oui, il avait besoin de main d’oeuvre, pas la peine de se voiler la face sur ça : c’était bien beau d’avoir la terre et les ressources nécessaires, mais encore fallait-il des personnes pour les entretenir et ce n’était certainement pas lui qui y parviendrait à la seule force de ses deux bras. « Elle a l’excuse de la jeunesse, elle peut bien profiter tant qu’elle en a l’opportunité. » Il haussa les épaules, continua : « Enfin elle finira bien par se calmer, elle comprendra à la longue que ça vaut mieux pour elle. » Pour sûr qu’elle était pas bête, non : il avait eu l’occasion d’en croiser, de ces canassons complètement demeurés qui sautent en l’air au premier battement d’ailes de papillon, se braquant pour un rien et refusant d’exécuter la moindre demande qui nécessitait plus que deux talons plantés dans les flancs. Il pouvait voir rien qu’à l’expressivité de ses grands yeux sombres qu’elle était pas comme ça et puis sa morphologie promettait du potentiel, il l’avait vue déjà se pavaner dans les pâturages, elle lui plaisait bien. Et si t’enticher d’un cheval pouvait l’aider, parfois, à se trouver de meilleure humeur, personne n’irait cracher dessus.

« Si jamais t’avais pas encore remarqué, c’est pas franchement la grande joie en ce moment dans le coin. » La réplique était un peu amère, sonnait comme un reproche qu’il savait injustifié. Fatigué, certes, comme tout le monde ici, quoique certainement plus que d’autres : le poids de son pouvoir lui pesait lourd sur les épaules. On pouvait bien prétendre qu’il aimait ça (évidemment que c’était le cas), il n’empêche que ça n’avait rien d’une promenade de santé, qu’il n’était pas ici simplement pour donner une poignée d’ordres le matin et se rouler ensuite dans le luxe de sa demeure. Toute cette misère qui n’avait de cesse de lui tomber sur le coin de la gueule, de gangréner le campement et de pourrir insidieusement ses survivants, ça lui cassait le dos, sauf qu’il n’y avait personne pour le soulager un peu de ce fardeau. S’il prenait des mauvaises décisions, tout lui revenait en pleine face, et même les bonnes n’étaient pas appréciées parce qu’on le jugeait trop sévère, trop intransigeant – et c’était vrai, certes, mais ce n’était pas que pour le plaisir de voir quelques poignées de larbins lui lécher les pieds qu’il se comportait de la sorte. « Que je sois en pleine forme serait étonnant. Il y en a déjà bien assez pour penser que je me la coule douce pendant qu’ils triment à ma place… » Abel laissa tomber quelques éclats fatigués d’un rire sans joie, regrettant de ne pas s’être accompagné de sa bouteille pour venir chercher l’oubli jusqu’ici. L’alcool le rendait plus loquace qu’à l’ordinaire ou, du moins, moins prompt à s’agacer d’une remarque mal placé ; même s’il en avait déjà bien assez dans le sang à l’heure actuelle, siffler quelques gorgées supplémentaires ne lui aurait certainement pas déplu, histoire d’oublier la migraine qui lui cognait derrière les tempes et le manque de sommeil qui lui rappelait qu’il était trop vieux pour enchaîner les nuits blanches.
Quant à Beckett, il faudrait bien qu’il supporte l’humeur morose de son leader, homme difficile à congédier quand il avait décidé de prendre ses aises quelques part. Abel ignorait tout de ce que l’autre homme pensait de lui, avait cessé de se soucier de ce genre de détails depuis longtemps déjà. Encore qu’il eût pu tomber sur pire choix du hasard : au moins ces deux-là n’avaient-ils jamais eu un mot plus haut que l’autre au cours de leurs quelques échanges. De fait, ils n’avaient jamais vraiment pris le temps de se causer plus que ça, le quinquagénaire étant du genre solitaire et à ne pas faire trop de vagues.
Peut-être pour ça qu’il choisissait de garder sa compagnie pour l’instant, au moins sa discrétion n’était-elle pas indisposante. « Il faudra bien que tout finisse par se calmer à un moment, alors oui j’aurais le temps ensuite. (l’espoir, cette douce illusion) Elle me fera changer d’air, ça sera pas une mauvaise chose. » Une main enroulée autour de la corde du licou, l’autre frottant le chanfrein entre les deux yeux, elle disait rien pour l’instant, parce qu’elle avait bien pigé qu’on l’emmerdait plus trop. Le silence flotta quelques longues secondes, pas désagréable, ça faisait pas de mal d’en profiter un peu.



j'ai l'impression que c'est grave tout nul, j'aime pas trop ce que j'ai écrit donc si tu n'as pas assez de matière pour rep hésite surtout pas à me le signaler, que j'essaye de te pondre un truc mieux just when I thought things couldn't get any worse... 125484057 faut le faire boire plus pour qu'il raconte un peu de la merde
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MessageSujet: Re: just when I thought things couldn't get any worse...   just when I thought things couldn't get any worse... EmptyDim 30 Avr - 2:42

Beckett & Abel
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« Je suis pas sûr que ce sera la grande joie à nouveau un jour, que ce soit ici ou ailleurs. » laissa-t-il échapper, empli de sa sagesse ridicule du défaitiste s’étant accommodé de sa condition, son dos courbé n’ayant jamais été autre que celui d’un fuyard pour améliorer sa situation, mais ici, courir s’installer un peu plus loin n’éloignerait pas les hordes et les vagabonds, plus d’amas de lumières urbaines à l’horizon pour le pousser à changer d’air. Beckett s’était fait à l’idée de mourir, peut-être pas ici, mais comme ça, une arme à la main, sans doute une balle dans la tête pour ne pas fouler la terre avec sa carcasse pourrissante mais laisser le sol l’absorber jusqu’à redevenir poussière. Trop vieux pour continuer à survivre jusqu’à ce que la crise ne soit résorbée, juste assez jeune pour protéger quelques instants les nouvelles générations porteuses d’espoirs et leur faire miroiter les souvenirs d’un monde à reconquérir – juste assez stupide pour s’en accommoder et réussir à en dormir la nuit. « Les gens sont tout le temps mécontents, tu leurs donnes de quoi dormir, manger et s’occuper et ils viennent encore se plaindre, ils oublient que tout ça c’est un travail d’équipe. Sans nous t’es rien, sans toi le ranch est réduit en cendres dans deux jours. » Guidés d’une main de fer, les cavaliers en étaient déjà à se sauter à la gorge, Beckett n’avait pas besoin de se triturer les méninges pour savoir qu’à la minute où Abel serait mis hors-circuit, ce serait une armée de coq fiers et crasseux qui se battraient jusqu’à la mort pour récupérer un simulacre de pouvoir, aveuglés par la soif de diriger plutôt que l’ambition noble d’emmener le clan des cavaliers vers un avenir meilleur. Si le Rhodes n’avaient pas l’habit d’un noble philosophe des lumières voulant éclairer le peuple, et encore moins les moyens, il avait au moins le mérite d’arriver à garder le ranch à flots, en quelque sorte. Il ne voulait pas imaginer la chute de la famille autoproclamée royale, de l’endroit qu’il aurait  à quitter pour se rendre ailleurs, il n’avait pas envie de se battre ni de parier sur un cavalier qui ne serait pas assuré d’arriver à maîtriser les autres, il s’accrochait au confort précaire de la situation et détestait toute idée de changement, lui qui se complaisant tant à l’idée d’un jour se saisir de son sac et de laisser toutes les intrigues de la région derrière lui. Sa visite à Olympia encore fraîche dans sa mémoire, c’était l’amertume qui consumait son être de penser qu’il ne pourrait pas profiter de sa petite protégée pour se glisser dans un autre campement, ville qu’il ne détestait qu’à cause de la princesse échappée – il avait pourtant bien cette idée de se rendre jusqu’à la carrière et ses étales de fortune, se trouver un coin assez calme pour en supporter le bruit, peut-être bien réussir à se faire une place en bricolant quelques trucs, ou bien revendre son alcool à des éclopés contre une tente confortable. Au lieu de continuer à penser à ce non-sens auquel il ne voulait donner possibilité, il s’accrocha aux mots d’Abel qui présageait un avenir supportable, à défaut d’être meilleur, avant de se laisser aller dans le silence que seul les reniflements de l’équidé venait perturber.

Il en avait fini avec la jument, mais Abel s’était accroché à son harnachement et lui caressait la tête, les yeux dans le vide, si bien que le maréchal n’osait pas faire un geste pour signifier qu’il fallait la ramener au pâturage – mais pour l’instant la pouliche se laissait faire, presque détendue maintenant que Beckett ne l’embêtait plus à lui occuper un antérieur – et il ne se sentait pas l’envie de laisser le Rhodes seul, envahit d’une vague d’altruisme qu’on ne lui connaissait que trop peu. Beckett au cœur tendre qui voulait bien faire mais n’avait aucune idée de comment agir, ni quoi dire, si bien qu’il en sortit sa flasque d’alcool maison pour en prendre une gorgée, laisser le mélange acide venir réchauffer son estomac et lui libérer l’esprit de ses pensées simples. Il hésita quelques instants avant de la tendre à Abel, figure d’argile qui semblait en avoir déjà assez consommée, mais les cernes ornant le dessous de ses yeux et la moue de son visage le poussèrent à essayer de partager, se demandant si l’autre en avait plus besoin que lui. « T’en veux ? T’as l’air… d’en avoir besoin. » Puis, après une hésitation de quelques secondes, « plus que d’habitude. » Il n’appelait pas à la confession – se doutait que les problèmes d’Abel, même s’ils devaient le concerner un peu, étaient bien plus grand que lui – ne voulait pas proposer son épaule pour recueillir des larmes qui ne couleraient pas, espérait ne pas faire de vagues, ne provoquer aucune colère ni élan d’amitié.  Il voulait juste être un gars parmi les autres, un gars qui était là, qui était dans les bonnes grâces pour ne pas se faire conspuer à la première saute d’humeur. « C’est sûr que les choses finiront par se calmer. Toute façon ils auront pas assez de force pour s’entre-tuer jusqu’au bout. » Et lui pas assez de patience ni d’alcool pour regarder le spectacle jusqu’au dernier acte.
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MessageSujet: Re: just when I thought things couldn't get any worse...   just when I thought things couldn't get any worse... EmptyDim 14 Mai - 23:36



Beckett & Abel
« just when i thought things couldn't get any worse...


« Tu parles d’une putain de bande d’ingrats, ouais. Ils se rendent pas compte que râler dans les moments difficiles c’est pas ça qui va arranger leurs problèmes. » L’alcool lui déliait trop la langue, autrement Abel se serait rendu compte que cracher sur l’ensemble de ses cavaliers devant l’un d’eux n’était pas une bonne idée, même s’il ne s’agissait ici que de Beckett et que l’homme allait d’ailleurs dans son sens, du moins c’était là l’impression qu’il lui donnait à travers ses paroles. Et il avait besoin de les entendre, lui, ces foutues paroles. Il aimait à croire qu’elles étaient vraies même s’il savait bien sûr que ce n’était pas le cas, qu’il n’était pas le seul à être capable de faire tenir en un seul morceau ce campement qui menaçait d’éclater au prochain problème sérieux. Si une bande de raclures comme ces enfoirés de chacals était encore capable de subsister en dépit du bon sens qui aurait voulu les voir exterminés en moins de six mois, alors n’importe qui investi de suffisamment d’autorité et d’un minimum de savoir relatif à l’entretien des cultures serait capable de reprendre les rênes derrière lui. Oh ils seraient sans doute plusieurs à se battre pour le sacro-saint trône et ses privilèges, mais quelqu’un en sortirait forcément vainqueur, et pourquoi alors ne ferait-il pas mieux que lui ? Pour aujourd’hui, il préférait encore le nier, acquiescer sagement aux affirmations que le maréchal-ferrant lui faisait en se laissant flatter l’ego et se persuader qu’il disait vrai. La flasque lui passa sous le nez et il ne la bouda pas, décrochant plutôt sa main du licol pour s’en emparer sans vraiment d’hésitation tandis qu’un merci filait droit d’entre ses lèvres.
Dégueulasse, lui inspira sa première gorgée, mais il était trop habitué à son luxe personnel et s’il n’était pas satisfait de cet alcool bricolé, peut-être aurait-il mieux fait de se ramener ici avec une bouteille de son cru. La tronche qu’il tira exprima sûrement le fond de sa pensée, puis il décida de s’en foutre et s’en envoya une nouvelle rasade, de toute manière à son stade il cherchait plus les effets de la boisson que son goût puisqu’il avait plus dans l’optique de se saouler que de faire une dégustation des produits du terroir. « Tu devrais pas les sous-estimer, c’est comme ça qu’on en arrive à permettre aux conneries de se produire. Ils ont pas besoin de force, ils ont juste besoin d’être assez stupides pour s’étriper sans penser aux conséquences inéluctables. » Il suffisait de pas grand chose, un mec qui crevait dans le tumulte sans personne pour s’en soucier et voilà un rôdeur qui s’invitait à la fête. Ce n’était pas du défaitisme d’envisager pareil scénario, mais simplement un réalisme désagréable qui avait été maintes et maintes fois justifié par le comportement de l’humanité toute entière au cours de ses sept dernières années. Abel ne les avait pas vécues, toutes ces histoires, parce qu’il était bien resté cloîtré dans ses terres et s’était occupé à en faire quelque chose susceptible de survivre à cette catastrophe, mais il n’était resté ni sourd ni insensible à certains récits qu’on lui avait rapporté.
Le goulot trouva une nouvelle fois encore le chemin de ses lèvres alors qu’il se fichait bien d‘abuser de la générosité de son interlocuteur, c’était son problème pour lui avoir proposé, et puis qui sait peut-être qu’il le lui revaudrait une autre fois. Plus que d’habitude. La remarque lui flottait encore dans la tête. Il croyait pas si bien dire, Beckett, mais en même temps c’était probable qu’il y avait pas besoin d’être fin observateur pour s’en rendre compte. « Mon père est mort. » C’était balancé comme ça, avec une nonchalance qu’il était encore loin d’éprouver, mais la lassitude l’habitait trop pour qu’il y mette les accents et sa tristesse se débattait dans l’alcool ingurgité. Il lui tendit finalement la flasque, comme pour trinquer à la nouvelle alors que ça devait lui en toucher une sans faire bouger l’autre, à son compagnon, mais ça lui importait peu : Abel n’était pas venu ici pour chercher de la compassion, du réconfort encore moins, il ne pensait d’ailleurs pas en avoir besoin.
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MessageSujet: Re: just when I thought things couldn't get any worse...   just when I thought things couldn't get any worse... EmptyLun 5 Juin - 23:02

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Abel ne se fit pas prier pour attraper la flasque qu’on lui tendait, en lâchant le licol de la bête comme pour mieux savourer la première inhibition – même si les quelques déglutissements de son visage montraient bien que la gnôle fabriquée n’était pas totalement à son goût. C’était sûr que dans sa maison, il devait encore avoir des bouteilles hors de prix, des noms dont la simple évocation auraient fait saliver tous les gars du coin. Beckett, lui, avait réussi à négocier quelques fruits pour pas trop cher et s’était débrouillé avec, et le résultat n’était pas trop mal, assez pour boire peu et vite être ivre. Parfait pour que la flasque lui dure plus longtemps. Parfait pour réussir à s’endormir sans se perdre dans son cerveau pendant des heures. L’acidité des fruits macérés cachait tout le reste du goût, agressait les papilles et les brûlait encore quelques secondes après avoir avalé la gorgée, mais cela n’empêcha pas Abel d’en reprendre une deuxième, plus généreuse, ce qui sembla lui délier la langue. Personne ne supportait les cavaliers, et les cavaliers ne supportaient pas entre eux-même non plus, pourtant ils arrivaient encore à cohabiter ensemble, en quelque sorte. La parole sans espoir d’Abel ramena Beckett à son grand questionnement. Qu’est-ce qu’il faisait là ? Il attendait. Il ne savait plus trop bien quoi, maintenant. Une bonne occasion de partir ? Du courage ? Le retour d’Elanor ? Ou bien la mort, peut-être. Ce serait plus simple. Un peu de tout à la fois. Pour l’instant, il attendait, de se décider surtout, se contentait de ce que le ranch lui offrait. C’était assez sans l’être, mais c’était toujours ce dont il s’était accommodé, de sa sueur contre un lit et de la nourriture. Juste assez pour voir demain. Il n’avait rien à rajouter au constat d’Abel, sans doute que la question des cavaliers avait été abordé de tout les côtés, Beckett doutait qu’elle soit une question fertile pour lui, ils étaient ses camarades, sans plus. Il y avait bien quelques âmes qu’il extirpait de cette poudrière prête à exploser, mais ils n’étaient qu’infime parmi la foule des riders.

Il retint un geste pour empêcher Abel de prendre une troisième gorgée, prit par la pensée horrible que le Rhodes allait bien lui finir sa flasque, mais, à la place de sa réserve vide, ce fut une confession inattendue qui l’attendait, et lui fit regretter d’avoir fait une remarque un peu plus tôt. « Ah. » C’était tout ce qu’il trouva à lui répondre, reprenant sa flasque pour la ranger dans sa poche, à l’abri des regards et des convoitises. Il resta les bas ballants quelques instants à regarder Abel pour déceler un quelconque indice de son humeur, savoir si celui voulait être consolé ou laissé tranquille, mais Beckett était plus gêné que désolé de cette nouvelle. Il espérait juste qu’Abel ne se mette pas à pleurer. A y réfléchir, il n’avait pas vu le père Rhodes depuis un bon moment, peut-être bien ne se souvenait-il même pas que celui-ci était encore en vie. Il était devenu un personnage de second plan, facile à oublier, et l’alcool dans les veines d’Abel rendait son comportement difficile à interpréter. « Mes condoléances. » Les politesses furent tout ce qu’il trouva à dire de plus, pour ne pas rester bêtement silencieux. Il ne savait pas trop ce que ça voulait dire, la mort du père, si ça faisait mal ou si Abel faisait semblant. Du sien, il n’avait eu qu’un nom et à peine un vague ersatz de rencontre, de ceux qui venaient habiter chez sa mère il n’en gardait pas un bon souvenir. Peut-être qu’Abel aimait bien son père. Ou même sans cela, peut-être qu’il était habitué à sa présence, qu’il avait peur de retrouver sa maison un peu trop vide. Peut-être qu’il avait bu pour essayer d’être triste mais qu’il n’y arrivait pas. Beckett n’avait pas envie de le savoir, et, de toute façon, ça ne le concernait pas, il préférait le silence, rester dans sa petite ignorance si confortable. Il ne voulait pas savoir que le chef de la meute avait des failles bien réelles, des faiblesses desquelles il aurait été facile d’abuser, il voulait que chaque chose reste à sa place, que tout reste simple, pas besoin de se soucier des piliers sur lesquels ont se repose.
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MessageSujet: Re: just when I thought things couldn't get any worse...   just when I thought things couldn't get any worse... EmptyMar 6 Juin - 18:24



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Ah. La réaction de Beckett, froide et sans réellement d’émotion, lui arracha ce qui pouvait probablement ressembler à un vague sourire amusé. Il ne s’était pas particulièrement attendu à autre chose, venant de lui, avait balancé l’aveu probablement parce qu’il fallait que ce soit dit au moins une fois à quelqu’un et qu’il ne pouvait pas compter sur son frère, isolé dans sa propre peine avec la mort de Cirilla ou sa sœur, absente pour il ne savait combien de temps encore. Il fallait qu’il vide son sac, même si celui-là ne contenait que quatre malheureux mots (“mon père est mort”) car ils pesaient des tonnes, chacun d’en eux. Maintenant qu’ils avaient été lâchés, cependant, il n’y avait rien à dire, plus rien à rajouter.
Comme probablement tout le reste du camp, Beckett s’en battait les reins, du patriarche : au mieux, la nouvelle en se répandant soulagerait les cavaliers d’un Rhodes en moins, au pire ils continueraient leurs affaires sans s’en sentir le moins du monde affectés. Abel ne pouvait pas s’offusquer pour ça, comprenait parfaitement que la mort de ce vieillard impotent n’affectait que ceux qui en étaient proche, plus grand monde autrement dit. « Bah, fallait bien que ça arrive un jour. » Il haussa les épaules, affectant à merveille une nonchalance qu’il n’éprouvait pas vraiment, mais Beckett ne lui était pas assez proche pour qu’il s’ouvre davantage à lui et surtout il ne voulait pas qu’on le prenne en pitié, Abel, surtout pas. Les gens crevaient, ici, c’était les sales conséquences de l’épidémie, des rôdeurs avant ça, de ce monde qui partait en couille et même les Rhodes, bien à l’abri dans leur grande baraque, n’étaient pas épargnés de cette fatalité.

Le maréchal-ferrant n’eut pas un mot pour lui, pas la moindre tentative de réconfort, et il lui fut reconnaissant pour ça : il ne cherchait pas à ce qu’on le console, du moins n’attendait pas cet effort là de la part d’un de ses hommes, l’aurait d’ailleurs probablement mal pris : il n’était pas de ces personnes qui avaient besoin de s’appuyer sur autrui pour se sentir mieux (ou du moins le croyait-il, mais en ce cas précis cela revenait au même). Abel était venu ici pour être seul à la base, cuver sa bouteille pour repartir d’un bon pied, prétendre que tout allait bien dans la mesure des possibles. Tant pis pour l’autre, qui avait dû supporter sa présence imprévue.
« Fais-moi penser de te revaloir ça un jour », il désigna d’un doigt la poche où la flasque avait disparu, enchaîna dans la foulée : « Ça te changera de cette gnôle infâme, crois-moi. » Gnôle qui tapait sec, mine de rien, ou peut-être était-ce parce qu’il avait déjà largement abusé avant de venir ici, il n’en savait trop rien. Dans tous les cas, il ressentait l’effet de l’alcool qui déjà s’attaquait fourbement à altérer ses réflexions, son attitude. Suffisamment lucide, néanmoins, pour comprendre que c’était là le moment adéquat pour se retirer, il finit par abandonner Beckett à ses occupations sur ces dernières paroles, le laissant enfin à sa solitude pour retrouver la sienne, et espérer qu’elle ne soit pas de trop courte durée.


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