save a horse, ride a cowboy (jamie)

♔ Mallory & Jamie

« a horse with no name

Il s’est enfui. Il l’a bousculée, presque écrasée, et Mallory s’est retrouvée les quatre fers en l’air (avec une sacré frousse) tandis qu’il partait à toute allure vers la rivière. Elle s’est relevée sans prendre la peine de retirer la poussière (et le crottin, assurément) de ses mains et son jean, et est partie à sa poursuite. Le cœur battant, elle s’est lancée sur le terrain inégal sans une once d’hésitation : la perspective de le perdre et de se faire tomber dessus par la suite était bien plus effrayante qu’une simple chute dans le gazon.

Il est facile à voir, le putain de canasson. Il gambade de tous côtés dans la zone surveillée, grignote ça et là, et s’abreuve dans la rivière qui brille un peu plus loin. Et Mallory, elle, essaie de le rattraper du mieux qu’elle peut, parce que mine de rien un cheval au galop ça couvre du terrain en trois coups de cuillère à pot. Ses baskets usés s’enfoncent dans la terre meuble, gorgée d’eau par la dernière pluie, et le vent froid lui mord les joues. Elle ne s’attendait pas exactement à se retrouver en terrain découvert aussi longtemps, et sa veste est probablement encore accrochée quelque part dans les écuries. À bout de souffle, elle s’arrête quelques minutes pour calmer sa respiration et établir une stratégie. Vraisemblablement, se diriger vers lui à toute berzingue en essayant de l’attraper par le licou ne constitue pas une stratégie efficace.

Elle essaie tout.

Elle le contourne, s’approche doucement ou rapidement, prétend se diriger nonchalamment vers un point un peu plus à sa gauche ou un peu plus à sa droite. Il la nargue, c’est certain. Il la regarde, la laisse s’approcher puis l’esquive de quelques pas rapides. Et, très évidemment, personne ne lui vient en aide –c’est qu’elle doit être divertissante, la nouvelle, à courir en rond, le visage rouge et les cheveux en bataille, de la terre et des traînées d’herbe partout sur ses vêtements. Le cheval –elle en est presque à l’appeler rôti, tellement elle est à bout de nerfs- n’est pas sans surveillance : Mallory le suit de près. Sans l’attraper. Elle n’a aucune notion du temps qui passe, seulement l’impression qu’il s’étire à l’infini pour mieux prolonger la torture. Et elle sprinte, court, s’arrête brutalement pour changer de direction. Son pied glisse dans la boue (une fois de plus) et elle se vautre (encore) dans une flaque à l’odeur désagréable, dont elle parvient sans peine à deviner l’origine.

À plat ventre dans la gadoue, elle se relève à quatre pattes, une flopée de jurons à la bouche. Et, bien entendu, la source de sa misère trottine gaiement quelques mètres à peine plus loin. Et puis entrent dans son champ de vision une paire de bottes, qui rejoignent la monture récalcitrante sans aucun problème. « Putain, mais c’est pas trop tôt ! » C’est qu’ils ont dû se poiler, les spectateurs, pendant que Mallory se rétamait dans la merde. Et alors qu’elle s’apprête à poursuivre sa tirade, à insulter copieusement le nouvel arrivant (peu importe qui c’est, ça pourrait être un Rhodes elle s’en fout) elle parvient à se relever complètement et daigne poser le regard sur le nouvel arrivant.

... Et reste sans voix. Clignant des yeux comme un hibou, elle essuie –ou étale, plutôt- une tache de boue qui s’est sournoisement glissée sur sa joue. « ... Jamie ? » elle tente, d'un air à la fois surpris et consterné.

Évidemment fallait qu'ils se retrouvent maintenant.
 

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Pas très fan du trait d’esprit qu’il lui sert alors qu’elle est épuisée et recouverte de boue, Mallory se radoucit considérablement lorsqu’elle reconnaît son sauveur (qui ne tombe pas particulièrement à point, faut bien l’avouer).  La regardant d’un air méfiant, il ne la replace visiblement pas et la rouquine ne sait pas si elle doit en être offusquée ou pas. Mais après quelques secondes, il prononce son prénom et elle se laisser aller à un sourire, prenant avec gratitude la main tendue pour l’aider à se relever. « Si tu savais. Je pouvais plus me passer de toi ! » Ça n’est pas entièrement vrai : après son départ, elle a très bien réussi à se débrouiller. Elle n’irait pas jusqu’à dire qu’elle ça ne lui a fait ni chaud, ni froid, cependant. La compagnie de Jamie était la bienvenue, tout comme son aide pendant le bout de chemin qu’ils ont fait ensemble. Sans lui, peut-être n’aurait-elle jamais franchi les étapes supplémentaires qui lui ont permis de survivre un peu plus longtemps : sa famille et elle n’auraient jamais pillé d’autres groupes. La Mallory d’avant n’aurait jamais pillé d’autres groupes. Mais c’était nécessaire, et sans l’intervention du jeune homme plusieurs mois plus tôt, elle n’aurait probablement pas survécu assez longtemps pour retrouver Indiana.

« Crois-moi, c’était pas mon choix. » Bien entendu, elle a accepté de le suivre ici, de rejoindre un groupe avec lequel elle n’a aucune affinité. Elle ne sais pas encore bien pourquoi, d’ailleurs. Mais il faut bien avouer que de résider dans une enceinte surveillée et protégée est un avantage considérable, qu’elle paye à sa juste valeur. « J’ai l’impression qu’il ne m’aime pas beaucoup » explique-t-elle en jetant un regard noir à l’animal.« Et c’est plutôt réciproque. » Elle ne sait pas exactement où elle a merdé. Elle a à peine eu le temps de le sortir de son box qu’il s’est barré, manquant la piétiner au passage. Pourtant, sans être une cavalière émérite, Mallory aime beaucoup les chevaux. Sa mère l’emmenait régulièrement avec elle lorsqu’elle allait monter à cheval, et la petite fille la regardait avec admiration, assise dans l’estrade de bois qui entourait le manège. Alors inscrite à des cours de danse, elle n’avait jamais commencé l’équitation. Son expérience avec les chevaux se limite encore maintenant à quelques pommes et carottes données sous la supervision de sa mère, ou de quelques tours au pas alors que l’instructeur tenait la longe.

Une fois debout, elle essaie d'analyser l'ampleur des dégâts. Ses vêtements sont recouverts de boue et de traces d'herbe, elle s'est égratigné les paumes en tombant à plusieurs reprises. Elle doit sentir mauvais, un très certain mélange de crottin et de terre humide. Elle est trempée. Sa journée vient à peine de commencer et déjà, elle doit se changer et nettoyer le désastre avant que ça ne reste taché. « C'est ici que tu voulais venir, alors. » chacun avait un but. Mallory n'abandonnait toujours pas la recherche pour sa famille, et lui disait vouloir rentrer. « J'espère que t'as trouvé ce que tu cherchais. » Elle essuie ses mains sur son pantalon, jette un regard à la ronde. Les discussions banales c'est pas vraiment son fort, mais elle est bien prête à y mettre un peu du sien. De toute façon, depuis qu'elle est au ranch elle est constamment entourée et l'attitude porte de prison est plutôt mal vue.

Prise d'un violent frisson, elle recule de quelques pas, vers le campement. L'absence de veste conjuguée à l'humidité de ses vêtements et la morsure du vent sont particulièrement désagréables, et promettent un rhume mémorable. « Tu pourrais m'aider à le ramener ? J'ai pas vraiment envie de refaire un numéro de ski acrobatique... » Et puis, comme ça, peut-être qu'ils pourront discuter encore un peu.

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Même s'ils se connaissent très peu, et qu'ils n'ont passé que quelques jours ensemble, Mallory est contente de voir un sourire sur le visage de Jamie. Elle n'accorde sa confiance à personne, la rouquine -personne sauf lui, peut-être. Il l'a aidée sans rien demander en retour, sinon un partage équitable de leur prises pendant leur courte cohabitation, et Mallory n'est pas prête de l'oublier. Dans ce nouveau monde c'est la loi tu talion qui règne, et le grand blond aurait très bien pu passer son chemin, ou pire encore, la piller comme tous les autres et la laisser là, sans rien (comme Indiana avant lui). Elle n'aurait jamais fait le poids contre lui: il fait bien une tête de plus qu'elle, et bien qu'elle soit agile elle n'est pas très forte.

« C'est pas moi qui ai commencé... » elle se justifie avant de soupirer. Oui, se chamailler avec un cheval paraît ridicule mais elle n'y peut rien Mallory, elle sait qu'il ne s'agit pas d'animaux stupides et celui-là semble être particulièrement déterminé à lui rendre la vie impossible. Elle écoute son explication d'un air dubitatif: si elle n'a pas réussi à le retenir plus tôt, qui dit qu'elle y parviendra maintenant ? L'équidé doit bien faire quatre fois son poids. Mais il sait y faire et bien mieux qu'elle, alors elle prend la longe sans rechigner. Si le canasson décide de se barrer, il pourra toujours lui courir après, elle a déjà assez donné. Au moins, Jamie ne la laisse pas se débrouiller seule et c'est déjà bien.

Elle ne sait pas si c'est la colère qu'elle ressent ou la présence de Jamie à ses côtés, mais elle se met en marche vers les écuries et le cheval suit docilement. Près des clôtures qui entourent les pâturages, ses spectateurs, déçus de ne plus pouvoir se distraire à ses dépens, retournent tranquillement à leurs occupations non sans lui lancer de dernières piques avant de partir. Elle ne les écoute plus. « C'est plus compliqué que ça » elle commence, sourcils froncés. Elle ne sait pas ce qu'elle doit dire, ce qu'elle doit taire. Elle lui fait confiance mais peut-être que ses histoires ne l'intéressent pas tant que ça. Et puis, lui ne lui a rien confié non plus. « J'ai été séparée de ma famille l'an dernier. Il y a quelques mois, j'ai croisé quelqu'un qui m'a dit les avoir vus récemment. » Elle semble hésiter, puis reprend: « En gros, je sais que je peux pas lui faire confiance, et qu'il ment probablement, mais si c'est vrai... ? Je peux pas me résoudre à le planter là. » Elle pourrait lui déballer ce qu'Indiana lui a fait, mais ça ne les avancerait pas beaucoup. Même si sa proposition (régler son cas à Indiana) est plus qu'alléchante, elle sent que ce con serait bien capable de se refermer comme une huître, et à retenir l'information qu'il divulgue au compte-goutte. « Il a proposé de s'arrêter ici, pour pouvoir écumer le coin et se réfugier dans une zone protégée la nuit. J'étais pas emballée mais je dois t'avouer que ça fait pas de mal... » Si le travail sur le ranch est épuisant et ne lui laisse pas beaucoup de temps ou d'énergie pour chercher, il permet au moins de se changer les idées, de penser à autre chose. Et aussi, bien qu'elle ne l'admettra jamais, de reprendre contact avec le monde des vivants. « C'est gentil de t'offrir, par contre. Je garde ça en tête. » Ça la fait sourire, elle aussi, de cette expression un peu inquiétante qu'elle lui a servi, à Indie, lorsqu'elle l'a retrouvé en pleine forêt. Elle n'a toujours pas abandonné son idée de vengeance et, qui sait, peut-être qu'un jour elle aura effectivement besoin de se débarrasser de ce problème.

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« J’avoue, qu’est-ce que je suis douée ! » elle répond en souriant, le cheval trottinant derrière comme s’il ne l’avait pas traînée dans la boue pendant une heure. Elle est loin de savoir monter, par contre. Mais peut-être qu’il a raison, dans un sens : pour quelqu’un qui n’avait aucune idée de comment on nourrit et prend soin d’un cheval, elle en sait beaucoup plus maintenant –les Riders ne lui ont pas uniquement appris à pelleter le caca. Elle est collée aux tâches ingrates mais, d’un autre côté, elle ne sait rien faire d’autre et tout le monde doit commencer quelque part.

Mais le sujet change rapidement et Mallory est de plus en plus hésitante. Est-ce que parler à Jamie, même aussi peu, était vraiment une bonne idée ? Elle ne veut pas douter du jeune homme mais ses expériences passées lui ont appris à être prudente. Lorsqu’il lui demande de qui elle parle, Mallory a un moment d’hésitation. Elle aime avoir le contrôle, et a l’impression d’en céder une partie à Jamie en lui dévoilant l’identité d’Indiana. Et s’il décidait de s’en occuper à sa façon, sans lui en parler ? Bien sûr, elle serait contente d’avoir son assistance au besoin, mais si ça contrecarre ses plans, si ça lui met des bâtons dans les roues, c’est tout de suite moins avantageux.  « Indiana. On est toujours ensemble… Je préfère garder un œil dessus. » Elle ne sait pas pourquoi elle lui raconte tout ça. Dans l’idée de limiter les possibles dégâts, peut-être ? Évidemment, en lui donnant son nom et en lui indiquant qu’ils sont toujours ensemble, Indie sera plus facile à repérer. Mais d’un autre côté, si Mallory le surveille…

« Je sais plus quoi faire » elle avoue, la gorge serrée. Après un an, peut-on encore réellement garder espoir ? « Ça fait un an que je cherche partout. » Elle l’a jamais dit à personne. Indiana ne sait pas à quel point ça la terrorise, à quel point chaque jour qui passe la désespère un peu plus. Et, bien honnêtement, à part Indie elle ne parle pas à beaucoup de gens, alors se confier… Ça n’arrive jamais. Tellement jamais qu’elle se reprend rapidement, et s’empresse de répondre à ses prochaines questions. Avec un air un peu coupable. « C’est peut-être un peu ma faute ? Enfin j’ai peut-être été un peu trop… euh. » Comment dire. « Disons que j’y suis pas allée de main morte quand je l’ai retrouvé. Menaces, tout ça. » Elle toussote un peu, regarde droit devant. « J’ai peut-être laissé entendre que j’allais le buter une fois qu’il ne me serait plus utile ? » Et puis elle y a mis du cœur, Mallory. Quand elle a retrouvé Indiana, elle était tellement contente d’avoir quelque chose à faire, tellement heureuse d’avoir quelqu’un à effrayer, pour oublier ses propres peurs… « Mais il aurait eu des tas d’occasions pour se tailler alors… J’sais pas. Je pense que le ranch était le refuge le plus près. Il est pas très heureux quand on est dehors. » À la merci des éléments, à la merci des rôdeurs. Mais franchement, qui apprécie réellement ça ?

Ils arrivent à la fin du pâturage, là où le campement recommence. La rouquine marche d'un bon pas, autant pour se réchauffer que pour enfin refoutre le cheval dans son box et s'en débarrasser. Mine de rien, elle a déjà perdu beaucoup de temps et il lui faut encore se changer et laver ses vêtements avant qu'ils ne soient tachés. Elle se tait quelques instants, tout en traînant le cheval -dont elle ne connaît toujours pas le nom- vers son box. Une fois la vile créature derrière les barreaux (ou presque), elle se met en chemin vers son petit logis. « Jamie.. ? » elle demande, les sourcils légèrement froncés, l'air pas très sur. « Tu penses que tu pourrais m'apprendre ? À monter à cheval, je veux dire. » Elle sait que c'est beaucoup demandé. Mais c'est un peu la base, quand on vit sur un ranch, non ? « Juste si t'as le temps. Et que t'as envie. » Elle ne sait pas combien de temps elle restera ici mais, dans tous les cas, ça pourrait être très utile de l'apprendre. « Sinon tu connais peut-être quelqu'un d'autre qui accepterait ? » Elle veut pas qu'il se sente obligé, quand même.

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Lorsqu’ils étaient ensemble, Mallory a été témoin de l’attitude de Jamie avec les étrangers. Avec les gens qu’il ne se gênait pas pour débarrasser de leurs affaires, qu’ils le veuillent ou non. Alors quand il lui dit qu’Indiana n’aurait pas fait long feu, s’il avait été à sa place, elle le croit sans hésiter.  C’est en grande partie grâce à Jamie qu’elle a survécu. Seule, elle n’aurait jamais pensé –et encore moins osé- racketter d’autres survivants pour obtenir les biens dont elle avait besoin. Il la conforte dans ses choix et, quelque part, ça lui fait du bien. Elle est prête à faire ce qu’il faut pour survivre mais parfois sa conscience la tiraille un peu. Ça n’est facile pour personne, et sans lois la ligne est plus floue que jamais entre ce qui est bien et mal, entre ce qui est acceptable ou ne l’est pas. « Il a pas tort. Ça fait du bien de dormir entre quatre murs, même si on est à l’étroit. » Et même si, depuis qu’ils sont derrière les dits murs, ses recherches n’avancent pas. « Relativement ? J’te remercie pour le boost de confiance en moi » elle le zieute d’un regard peu convaincu. Déjà, elle ne pense pas qu’Indiana serait très réceptifs à ses charmes. Ils se détestent avec une force plutôt incroyable, et un revirement d’attitude le rendrait immédiatement méfiant. Pour l’instant, Mallory ne voit pas vraiment comment procéder. Indiana serait bien capable de continuer ce petit jeu rien que pour la faire chier, même si elle décide d’abandonner sa vengeance et de lui laisser la vie sauve une fois qu’il aura craché la vérité.

« Il sait pas monter. » Elle l’a bien vu, il est nerveux en présence des chevaux, bien que leur séjour prolongé dans les écuries l’y ait habitué. « Abandonne l’idée, ça fonctionnera jamais. Il va se douter de quelque chose. Et puis je préfèrerais crever que de me rapprocher de cette fouine. » Elle grimace comme pour illustrer le dégoût qu’il lui inspire, avant de se rendre à la construction rudimentaire qui lui sert de demeure. À l’intérieur, il n’y a qu’un poêle bidouillé avec de vieux morceaux de tôle, un lit rudimentaire rembourré de branches de sapin et un espace de rangement sous le toit, où elle a mis ses affaires. Fouinant à tâtons dans l’espace de rangement, elle en tire une petite casserole cabossée, qu’elle remplit d’eau récoltée dans un baril d’eau de pluie, et la place sur le poêle. « Tu peux t’asseoir, si tu veux. » D’un geste vague de la main elle désigne le lit. Il n’y a pas vraiment de chaises ou d’espaces pour se poser : elle se sert de son lit pour s’asseoir, manger, dormir. Elle sort remplir une autre casserole, plus grande, qu’elle pose par terre, et s’emploie à allumer un feu dans son poêle de fortune. « J’peux t’offrir un thé, peut-être ? » elle raille, jetant quelques feuilles de thé du labrador dans la casserole sur le feu. C’est loin d’être un grand thé qu’on déguste avec des sablés, mais c’est plus intéressant que de boire de l’eau chaude, et l’odeur est réconfortante.

Une fois le feu bien pris, Mallory descend le sac qui contient ses maigres possessions. Elle a quelques pantalons, quelques hauts, mais rien d’extravagant. Que le nécessaire, que ce qu’elle peut traîner sur son dos sans que ça devienne encombrant. Elle en sort les premiers trucs qui lui passent sous la main, en plus d’un pull de laine usé en plusieurs endroits. « T’as dit que ça faisait du bien de voir quelqu’un de familier, tout à l’heure… » Elle veut pas être indiscrète, mais faut dire que ça a piqué sa curiosité quand même. « Y’a tellement de gens qui sont partis ? Ou il s'est passé quelque chose ? » Partis, ou morts… Et pendant qu’il répond elle entreprend de nettoyer ses bras, ses mains, son visage à l’aide de la casserole posée par terre. L’eau est glacée, mais le feu commence déjà à réchauffer la minuscule habitation. Elle aurait pu faire réchauffer l’eau d’abord, mais le besoin de se débarrasser du crottin étalé sur son visage se faisait bien trop pressant. Elle se lève un bref instant pour jeter l'eau crasseuse, une fois le plus gros de la boue retiré, puis revient avec de l'eau propre pour repasser avec un bloc grossier de savon artisanal échangé plusieurs semaines plus tôt. Une fois sa peau propre, elle empoigne ses vêtements. « Si tu pouvais regarder ailleurs ça m'arrangerait. » Elle lui tourne quand même le dos avant de retirer ses vêtements souillés (et probablement irrécupérables) et de les remplacer par un ensemble qui, bien que plutôt froid à cause de la température ambiante, a le mérite d'être sec. « T'es parti combien de temps, au juste ? »

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Il lui a proposé de l’aider, mais quelque part Mallory n’est pas certaine que mêler Jamie à tout ça soit vraiment une bonne idée. C’est son problème après tout, non ? Elle devrait être capable de le régler seule. Jamie a ses propres soucis, et puis il en a déjà assez fait pour elle.  « J’vais y penser. » C’est pas qu’elle n’apprécie pas les conseils qu’il lui offre, mais elle se voit mal les suivre dans l’immédiat. Premièrement, elle ne saurait même pas comment draguer Indiana pour le faire parler, et deuxièmement, la torture c’est pas son truc. Elle n’a utilisé ses armes que contre des rôdeurs, et doute fortement arriver à blesser quelqu’un de ses mains, de sang froid. Même si l’envie de planter le brun se fait parfois très forte –il est particulièrement insupportable, quand il s’y met.

Elle tente de changer de sujet en lui posant des questions, mais ça n’est pas très efficace. Enfin, ses réponses ne sont pas très explicites, plutôt. S’il a l’air bavard et extraverti, il est aussi extrêmement discret sur ses motivations –encore plus qu’elle. Elle voudrait savoir de qui il parle, lorsqu’il dit que certains ont la mémoire courte. De quoi il parle, aussi. Mais il faudrait apparemment qu’elle utilise son charme relatif féminin pour obtenir des réponses, parce que Jamie préfère clairement se moquer d’elle plutôt que d’élaborer sur ce qui le liait (et le lie toujours) aux Riders. Moqueries auxquelles elle ne répond pas, parce que faut pas déconner quand même. Elle sait déjà qu’elle n’entendra jamais la fin de cette histoire, et que si elle répond à ses provocations ça ne fera que l’encourager. Ça n’est pas pour rien qu’elle lui a demandé de lui apprendre à monter : il a calmé la bête avec une aisance déconcertante, et il a l’air de comprendre les chevaux bien mieux qu’elle ne pourra jamais le faire. Si le talent naturel ne s’apprend pas, peut-être réussira-t-il au moins à lui transmettre des bases solides pour que ça ne se reproduise pas.

Elle essaie de retenir les bouts d’information qu’elle arrive à grappiller, même si ça ne forme qu’un tableau très vague jusqu’à présent. Elle sait qu’il a quitté le ranch pendant trois ans, qu’il est possiblement allé à l’extérieur du pays, et qu’en son absence beaucoup de choses ont changé. Elle ne peut pas s’empêcher d’être curieuse. Qu’est-ce qui a pu motiver son départ ? Il semble heureux d’être de retour, même après tout ce temps. Et pourquoi aller si loin en dépit des dangers sur la route ? Perdue dans ses pensées, elle s'apprête à l'interroger plus avant lorsqu'il la prend de court: elle aurait bien du se douter qu'il n'allait pas détourner le regard comme un gentil garçon. « Tu devais pas regarder ailleurs ? », elle demande d’un ton qui se veut nonchalant, sans vraiment y parvenir. Après toutes ces années sur les routes, évidemment elle est devenue moins pudique, mais il y a une différence entre se changer avec quelqu'un d'autre dans la pièce, et se changer quand la dite personne en profite pour se rincer l'oeil.  

Elle passe son t-shirt par dessus sa tête, profite de la longueur du haut pour retirer son pantalon et le changer. « T'as raison, ça aurait été tellement plus pratique de me faire zieuter par dix pervers au lieu d'un seul ! » elle s'exclame en s'empressant de remonter son pantalon et d'enfiler son pull, avant de se retourner de nouveau vers lui, les joues rouges. Si plus tôt elle s'est plainte de son manque d'enthousiasme concernant son charme relatif, elle ne s'attendait pas à ce drôle de compliment, qui la déstabilise bien plus que ce qu'elle voudrait admettre. « Oui enfin, je sais pas s'il est aveugle, parce que clairement il a rien vu. On dirait pas mais je me balade généralement pas en culotte devant le premier venu. » Sauf si le premier venu s'appelle Jamie Ferguson, faut croire.

« Faudrait quand même que t'arrêtes de me pousser dans ses bras. C'est limite insultant. » Genre le mec il est seul avec une jolie fille, lui fait comprendre qu’elle est attirante (ou alors elle a mal compris… ?) et il la pousse vers un autre ? N’empêche, il a l’air tellement convaincu de ce qu’il avance qu’elle se demande s’il n’aurait pas raison. Elle soupire, replace ses cheveux sur une épaule. « Alors, comment je procède ? » elle demande en s’approchant, ne s’arrêtant que lorsqu’elle est trop près. Que lorsqu'elle doit lever la tête pour le regarder. Elle hésite. Pose ses paumes sur la poitrine de Jamie. Elle a l'impression d'être ridicule. Il doit bien se foutre de sa gueule, non ? « Ça va ça, ou me foutre directement à poil, c'est mieux ? » elle y peut rien, il est brûlant et elle a chaud et c'était vraiment pas une bonne idée de faire la maligne.

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Elle sait dès le départ que c’est pas une bonne idée. Elle n’était déjà pas à l’aise avec le fait qu’il la regarde, alors aller se jeter dans la gueule du loup comme ça n’était définitivement pas la marche à suivre. Et maintenant, c’est trop tard. Un peu perdue, elle en est à se demander pourquoi les mecs sont tous de telles fournaises ; ou alors c’est peut-être l’embarras qu’elle ressent qui fait monter sa température corporelle à ce point. Elle se sent obligée de balancer une connerie pour reprendre contenance, pour se donner la chance de comprendre ce qu’elle vient de faire. Évaluer l’ampleur des dégâts : vu comment Jamie se remet vite de l’apparente surprise, elle est vraiment dans la merde. Il a l’air parfaitement à l’aise, alors qu’elle lutte pour ne pas effectuer de repli stratégique. Abort mission.

Mais c’est en voyant le sourire suffisant du blond qu’elle comprend à quel point ils ne jouent pas dans la même ligue. Il a l’air de s’amuser comme un petit fou et elle se sent comme une biche devant les phares d’une voiture. Ça va pas du tout. Elle n’a pas l’habitude d’être proche des gens, que ce soit émotionnellement ou physiquement, et ça n’avait jamais posé problème jusqu’à maintenant. Elle se sent crispée, tendue, comme s’il n’attendait qu’un moment d’inattention pour la poignarder dans le dos. Alors que, bon, il va pas la manger, quand même. C’est qu’un jeu, Mallory, un défi lancé sans trop en comprendre les enjeux. Un truc sans importance, sans conséquence. Elle n’est pas en train de se battre pour sa vie. En fait, elle n’est pas dans une situation critique, du tout : il y a franchement pire que d’être dans les bras d’un beau jeune homme, hein. « T'en as déjà assez vu », elle marmonne en levant les yeux au ciel, un sourire narquois ourlant enfin ses lèvres. Sans pour autant être parfaitement à l'aise, la rouquine se détend visiblement.

Il se rapproche, et elle pose l'une de ses mains sur sa nuque, l'autre froissant le tissu de son t-shirt. Toujours égal à lui-même, il ne peut pas s'empêcher de la ramener, et heureusement pour Mallory: ça contribue à briser le sort. Il est beau Jamie, et Mallory n'avait peut-être pas encore compris à quel point il sait en jouer -jusqu'à maintenant. Ce qui l'amène à se demander combien de fois il s'est servi de sa belle gueule pour se tirer d'affaire ou obtenir des informations. Testée et approuvée, la technique, Jamie ? « J'croyais que c'était sexy, les filles dans la boue, tout ça. On m'aurait donc menti... » le reste de sa phrase se perd lorsque la bouche du blond frôle son oreille et qu'il la prend par la taille. Ça l'agacerait presque, la facilité avec laquelle il la déconcentre tout en restant parfaitement maître de lui-même -sans oublier de bien se moquer au passage. Elle sait bien qu'elle ne gagnera pas la partie, dont elle ne saisit de toute façon pas toutes les règles. Sans information à la clé, c'est simplement question de voir qui craquera le premier ? Jamais dans cent ans elle ne réussira à le déstabiliser à nouveau. L'effet de surprise dont elle bénéficiait en le coinçant contre le mur n'a duré que quelques secondes, et puis de toute façon elle en a été victime aussi: l'arroseur arrosé. Elle pense un instant à hisser le drapeau blanc. Et puis, à peine une seconde plus tard, rejette l'idée en bloc. Pas question.  

L'agacement et l'orgueil prennent le pas. « Attends, j'veux voir si j'ai bien compris... » elle se mord la lèvre, fait mine de réfléchir quelques secondes sur la marche à suivre. Élève modèle, elle se hisse sur la pointe des pieds, prenant appui sur son torse pour placer, elle aussi, sa bouche tout près de son oreille. « Je te murmure un truc », elle commence d'une voix feutrée, essayant autant que possible d'en effacer le sarcasme. « Apparemment, ça peut être une connerie, c'est qu'une excuse pour glisser. » Joignant le geste à la parole, elle repose doucement les talons par terre sans se détacher, profitant du mouvement pour effleurer sa joue. Ses lèvres caressent doucement sa peau, de la pommette au coin de la bouche, où elle s'arrête de justesse, manquant de déraper. « Et là, je pose ma question ? » elle souffle, avant de planter son regard dans le sien, un air de défi au fond des yeux.

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Elle ne s’attend pas à prendre le pas sur Jamie. Elle ne veut tout simplement pas le laisser gagner si facilement. Elle fait un effort Mallory, elle sort de sa zone de confort. Tuer des rôdeurs, pas de soucis. Pelleter du caca, aucun problème. Mais jouer les femmes fatales, c’est clairement pas dans ses habitudes et, face au jeune homme, elle se sent ridicule. Comme un chaton qui sort les griffes face à un tigre. Il a toujours une parade, toujours quelque chose à redire. Il a probablement plus d’expérience qu’elle dans le domaine, mais ça reste frustrant pour Mallory, qui s’est lancée sans le savoir dans quelque chose qui dépasse (et de loin) le seul besoin d’être belle. Il faut savoir jouer, savoir charmer. Et mis à part singer ce que fait Jamie, elle n’a aucun autre atout que son joli minois.

Et pourtant, c’est loin d’être désagréable, malgré la frustration et l’agacement qu’elle ressent chaque fois qu’il lui sort un de ces sourires supérieurs. Comme au moment présent, alors qu’il la trouve trop présomptueuse ; mais c’est lui le professeur, non ? Forcément, s’il ne lui donne pas toutes les étapes… Elle ne peut pas tout deviner toute seule. Et c’est ce qu’elle fait, elle tâtonne, elle avance à petits pas, essayant de trouver comment jouer. Elle n’est pas même certaine de pouvoir se fier à ses réactions pour savoir si ce qu’elle fait a un effet ou pas: il est en parfait contrôle. Elle est vraiment si nulle que ça ? C'est ce qu'il semble insinuer, avant de le lui dire, carrément. « Pas convaincante ? Tu veux qu- » elle a à peine le temps de s’insurger, que le monde se retourne et que son dos percute le mur. Ça y est, elle est foutue. Il n'a même pas encore rouvert la bouche qu'elle sait qu'elle a perdu.

Ses mains de chaque côté l’empêchent de sortir. Contrairement à Jamie, qui aurait pu la dégager à tout moment, Mallory peut difficilement le pousser de là. Il a une bonne tête de plus qu’elle, et pourrait probablement la soulever à une main s’il en avait envie. « … Ce n’est pas dit qu’il va se laisser faire et que t’auras la main pour faire ce que tu veux. » Par contre, Jamie, il a clairement la main pour faire tout ce qu’il veut. Elle a l’impression d’être une marionnette au bout de ses doigts. Ou, plutôt, une poupée de chiffon, vu comment ses genoux menacent de céder sous son poids lorsqu’il glisse la main sous son haut, directement sur sa peau. Elle a complètement perdu le peu de contrôle qu’elle avait sur la situation et peine à se raccrocher à quoi que ce soit pour reprendre pied. Jamie ne la ménage décidément pas et elle sent qu'il n'a même pas encore véritablement commencé à jouer. Pour chaque étape qu'elle franchit, il corse la difficulté et Mallory sait qu'elle ne parviendra jamais à le rattraper. Ça n'était pas faute d'essayer, pourtant. Il continue, taquine la peau pâle du bout des lèvres, et lorsqu'il s'arrête enfin près de son oreille, Mallory recommence à respirer. Bien que ce soit difficile, il faut parfois savoir admettre sa défaite et juste l'idée de ce qu'il pourrait inventer pour la faire craquer la convainc d'abandonner (même si, au fond, ça ne serait pas pour lui déplaire - c'est bien ce qui l'inquiète). Elle appuie sa tête contre le mur, se laisse le temps de quelques inspirations pour rassembler ses idées, éparpillées entre la main sur sa peau brûlante et son corps pressé contre le sien. « Ça n'avait pas l'air de te déplaire non plus... Ou je me trompe ? » elle rétorque innocemment, cherchant son regard jusqu'à le trouver. Elle reste silencieuse un moment, refusant d'en dire plus, de peur de trop en dévoiler. De toute façon, la manière dont elle a évité la question y a tout aussi bien répondu que s'il elle avait été franche. Il a gagné. Mais ça, ils le savaient tous les deux depuis le début.

« C'est bon, je me rends », elle concède finalement, haussant légèrement les épaules, avec l'air nonchalant de ceux qui s'en fichent (c'est faux). Profitant des derniers instants de la partie, elle approche son visage du sien, ne s'arrêtant que lorsque leurs bouches se frôlent. « Merci pour la leçon » elle murmure tout contre ses lèvres, avant de se laisser aller à un sourire en coin. Elle sait pas si elle doit rire ou avoir honte, mais tant qu'à perdre la face autant le faire la tête haute. Et puis, sans vraiment réfléchir, elle franchit l'espace qui les sépare encore pour l'embrasser doucement, presque timidement, ses mains fines agrippées au tissu de ses vêtements. Parce que tant qu'à en profiter...

♔ Mallory & Jamie

« a horse with no name

Elle ne comprend pas d’où vient soudainement cette attitude froide. Il n’était pas si indifférent, plus tôt, et elle ne parle même pas de leur proximité récente. Elle se réfère plutôt à leur rencontre dans les pâturages, et leur discussion avant d’entrer dans la cabane. Elle ne saisit pas mais se dit que pour le moment, ça n’a que peu d’importance. Et au bout du compte, la question importante est ceci : est-ce qu’elle en a envie ? Tout ça ne mène à rien, elle le sait. Les dernières minutes n’étaient qu’un jeu, que le résultat d’un défi stupide qu’elle –bien évidemment- perdu. Ce qui est en train de se passer à présent est légèrement différent. Si Jamie les qualifie de choses sérieuses, Mallory est loin d’être d’accord. C’est une partie d’un jeu différent, c’est tout. Un jeu auquel ils n’ont pas fixé de prix, mais qui en reste un. Elle voudrait bien se targuer d’être supérieure, de ne pas perdre ses moyens dès qu’on lui agite un corps dénudé sous le nez, mais elle se doit bien d’admettre que Jamie lui plaît et qu’elle ne détournera certainement pas le regard. Elle prend son temps d’ailleurs. Il ne s’agit pas de réfléchir ou de faire mine d’hésiter, mais simplement de profiter du spectacle qui s’offre à elle –qui sait si elle aura une autre occasion pareille ? L’invitation est lancée mais rien ne dit qu’elle se répétera.

Sans un mot, elle soulève l’ourlet de son propre t-shirt (déjà froissé par les soins du grand blond), et après une hésitation à peine perceptible, le fais passer par-dessus sa tête pour le laisser tomber à ses pieds. Et puis peut-être qu’elle prend son temps pour le faire languir, elle sait pas trop elle-même –les protocoles de ce genre de situation lui sont plutôt inconnus- mais elle retire son jean sans  se presser, avant de l’abandonner sur le sol. Le contraste entre la température ambiante et la chaleur de son corps la fait frissonner. Elle est étrangement nerveuse, Mallory. Si Jamie avait réussi à la mettre à l’aise plus tôt, elle ne sait plus trop quoi faire de son attitude et a le sentiment fugace d’être prise pour une idiote. Elle franchit néanmoins l’espace qui les sépare en quelques pas : pourquoi perdre du temps à réfléchir, après tout ? Elle en a envie, il en a envie, ça devrait suffire, non ?

Les mains posées à plat sur ses abdominaux, elle le pousse doucement mais fermement, plus pour l’inciter à bouger que pour le bousculer. Elle veut juste qu’il recule un peu, de quelques enjambées, jusqu’à ce que l’arrière de ses genoux frappe le rebord du « lit » qui borde le mur. Elle avance jusqu’à ce qu’il soit obligé de s’y asseoir et que, pour une fois, elle le domine en hauteur. Les doigts sous son menton, elle l’incite à lever la tête, pose le regard sur ses lèvres un peu trop longtemps avant de le plonger dans les yeux océan. Sans gêne, cette fois, elle lui donne un baiser qui n'a rien d'innocent, et qui ne laisse certainement pas planer le doute sur ses intentions. « Et maintenant, j’ai la main pour faire ce que je veux ? » elle s’enquiert avec un éclat de rire dans la voix, laissant ses mains glisser le long de son cou, jusqu’à suivre le tracé des clavicules et de se poser juste dessous, à la hauteur du cœur. « Ou bien j'ai pas compris le principe ? »

♔ Mallory & Jamie

« a horse with no name

Elle aime le regard qu'il porte sur elle. D'un coup elle ne se sent plus gauche, plus inférieure. Elle a l'impression de jouer sur un pied d'égalité lorsqu'il l'attire à lui, lorsqu'il répond à ses piques en lui souriant. Quand il répond à son baiser avec la même ferveur. Mallory ne réfléchit plus, se contente de se laisser porter par la vague, par l'instinct. Elle profite du moment au lieu de vouloir s'en détacher, recherche la proximité de Jamie au lieu de chercher à l'esquiver.

Il ne lui laisse pas la main mais ça, ça ne l'étonne pas le moins du monde. Il a beau prétendre vouloir lui « enseigner » sa technique, il ne parvient pas à lâcher prise assez longtemps pour la laisser faire ce qu'elle veut. La rouquine lui cède l'initiative sans opposer de résistance ; elle ne saurait pas comment faire, de toute façon. À ce genre de jeu elle ne prétend pas connaître quoi que ce soit. Elle préfère amplement laisser Jamie lui apprendre les règles au fur et à mesure.

***

Elle se réveille en plein milieu de la nuit, parce que quelqu’un parle à côté de son oreille. D’abord confuse, ne sachant pas trop s’il s’agit d’un rêve ou de la réalité, elle capte néanmoins une bonne partie de la phrase et met plusieurs seconde à l’analyser. Rassemblant tout son courage, elle répond, d’une voix endormie : « Quand j’irai laver mes vêtements. » Puis, après un bâillement : « Tu viens avec moi. Faut que tu me réchauffes après, et que t’empêches qu’on me réchauffe sans ma permission. » Se frottant les yeux d’une main, elle pivote pour s’appuyer sur lui, et fronce légèrement les sourcils. « Et puis y’a pas de raison pour que j’sois la seule à souffrir. » Elle se rendort quelque part après cette courte interruption dans sa nuit, bien au chaud contre Jamie. Le départ de celui-ci reste nébuleux à son réveil : s’est-elle réveillée aussi ? L’a-t-elle salué ? Elle ne pourrait même pas le dire. Lorsqu’elle émerge définitivement, le feu est mort et la place à ses côtés est glaciale –comme la température hors des couvertures.

Grommelant un truc inintelligible (même pour elle-même), elle enroule les couvertures rêches autour de son corps et quitte le lit, s’agenouillant devant le feu complètement mort dans l’espoir de pouvoir le rallumer sans trop d’efforts. Elle n’a pas l’habitude de partager son lit, mais pourrait s’habituer très vite à ne plus se réveiller pendant la nuit en grelottant. Et pas qu’à ça, pour être honnête. Une main à peine sortie de son burrito de tissu, elle construit son feu d’une main habituée, avant de l’allumer et de se planter devant jusqu’à sentir la chaleur sur son visage.

Et puis elle s’habille, embarque ses vêtements sales dans un sac avec du savon et descend à la rivière, en espérant réussir à faire partir les taches que le crottin et la boue ont laissées partout –et en croisant les doigts pour ne pas trop en avoir dans les cheveux.