Last night I did a thing I'm not proud of

Outch, ma tête.

C'est la première pensée qui traverse l'esprit de Cirilla, vautrée dans son lit, avec la distincte impression d'être allongée sur la proue d'un bateau traversant une océan déchainé. Avec le mal de mer qui va avec. Ses doigts s'agrippent à la couverture qu'elle rabat plus haut pour cacher les rayons d'un soleil ingrat de ses yeux endoloris de sommeil et d'alcool. Seulement remarque-t-elle deux bras agrippés fermement à sa taille, et un corps nu contre le sien. Elle fronce les sourcils, essayant de se retourner discrètement et sans réveiller l'inconnu qui la prenait pour un nounours, curieuse de savoir avec qui elle avait terminé la nuit. Mais les grognements agacés de l'individu en question la dissuadèrent rapidement de toute tentative de fuite ou de reconnaissance. Un peu rancunière, elle ne peut s'empêcher de penser j'espère que Caden a tout entendu, avant de tenter de récupérer quelques minutes de repos en s'installant plus confortablement, poussant la main loin de son ventre dont les courbes nouvelles lui déplaisent profondément. Elle n'était pas du genre à complexer, mais force lui était de constater qu'elle avait pris du poids. Cirilla, plus relaxée, se rendort avec un dernier ronronnement, apaisée par l'idée que son coup d'un soir ne serait plus là d'ici quelques heures, quand il se réveillerait et réaliserait qu'il n'était pas dans son lit.

Quand elle se réveille quelques heures plus tard, la journée est déjà bien entamée, et elle sent un liquide couler sur son visage. Désorientée, ses paupières papillonnent et elle fait un effort pour regarder qui l'a si sauvagement sortie de son rêve bienheureux.

Et se retrouve nez à nez avec un pénis.

Horrifiée, elle se demande si on vient de lui uriner dessus et se redresse d'un coup, prête à défendre vertu et honneur à la force de ses poings. Elle ne doit pas faire bien peur, du haut de ses 1 mètre 59, mais elle sait se battre (l'avantage d'avoir eu un grand frère) et elle n'hésitera pas à taper là où ça fait mal. Qui ose la réveiller ?
Première constatation, ce n'est heureusement pas avec de l'urine, mais avec un verre d'eau qu'on l'a sortie du royaume des songes.
Deuxième constatation, ce n'est pas un inconnu qui se trouve dans sa chambre, mais Abel Rhodes, nu.
Troisième constatation, elle n'est pas dans sa chambre, mais dans ce qu'elle suppose être la chambre d'Abel.
Elle ne s'éternise pas en observation, sinon pour s'apercevoir que ses habits sont bels et biens jetés au petit bonheur dans tous les coins de la pièce, et les vagues souvenirs de sa nuit lui reviennent. C'est consternée, et énervée comme jamais, qu'elle regarde Abel.

« PREMIÈRE CHOSE. Je crois que tu n'as pas encore très bien compris, Abel, mais je ne suis pas du matin. Ni de l'après-midi. Ni même du soir. Si je dors, il est HORS DE QUESTION qu'on me réveille. » elle illustre ses propos d'un doigt pointé sur le torse du Rhodes, avec une expression qu'elle espère menaçante en dépit des derniers relents d'alcool qui circulent dans son sang.
« DEUXIO » reprend-elle, toujours aussi en colère, et à deux doigts de l'étrangler « J'espère pour toi que tu as une EXCELLENTE explication pour ton état et mon état de dénuement, et que cette explication ne commence pas par 'nous avons' et fini par 'couché ensemble', parce que je suis d'une humeur exécrable ».
Finalement, elle pose un bras vaguement pudique sur sa poitrine en pinçant ses lèvres.

Elle sent le regard libidineux d'Abel sur son corps, s'en embarrasse. Elle n'est pas habituée à cette dynamique entre eux, et en est rapidement agacée. Une erreur nocturne ne lui donnait pas le droit de prendre des libertés avec elle, et pourtant ceux qui la connaissaient la savaient impudique et décomplexée. Juste, pas pour lui. Elle prend cependant un malin plaisir à élever la voix pour voir Abel grimacer malgré lui de sa gueule de bois bien méritée. « Toutes mes excuses. Tu vas te remettre du choc causé par ce non respect de ton autorité ? Parce que j'aie peur d'avoir une mauvaise nouvelle pour ton humeur exécrable et toi... »  rétorque-t-il d'un air railleur. Elle inspire, expire, fait des exercices de relaxation pour ne pas lui arracher une partie de son anatomie. Il n'a pas besoin de confirmer ce qu'il s'est passé, des flashs de la nuit précédente lui reviennent, et avec eux un mal de cœur atroce. Jenna allait la tuer. Caden … Elle n'ose penser à la réaction de Caden s'il apprend qu'elle a couché avec son frère. Elle a beau lui en vouloir, elle n'est pas pour autant cruelle, et ce qu'elle venait de faire relevait de la méchanceté pure et simple. La seule chose qui ne la retient de gifler Abel est l'idée qu'il ne veut probablement pas que leurs ébats s'ébruitent. Cirilla réfrène une envie de régurgiter les quelques aliments qui se trouvent encore dans son estomac, sans savoir si c'est l'alcool, le regret, et ou la tête d'Abel qui lui donne la nausée. Probablement les trois. En particulier le dernier.

« Mais si ça peut te rassurer, sache que moi aussi j'aurais préféré passer la nuit avec n'importe qui plutôt que toi. Même dormir dans un box et avec mon cheval. » rajoute-t-il, confirmant son impression première : il était aussi gêné qu'elle et tentait de le cacher derrière des railleries. Mais elle ne peut pas laisser passer une occasion de le mettre en défaut, et ricane en baissant les yeux d'un air peu impressionnée « Pourtant ce n'est pas ce que ton corps me dit. Si ton pénis était davantage au garde à vous il crierait 'Heil Hitler'. Ce serait flatteur s'il n'était pas si petit ». En effet, le sexe d'Abel est dressé fièrement telle la proue d'un navire, dieu bénisse les gaules matinales. Elle lui jète un coup d'oeil circonspect « En plus, je n'ai que quelques vagues souvenirs d'hier, mais tu n'avais pas l'air de vouloir être ailleurs ». Ce n'est pas un mensonge, elle a l'impression de l'avoir entendu louer ses prouesses mais ne saurait situer précisément quand et pourquoi il avait balancé cette révélation. Bien sûr, elle se garde bien de parler de ses propres paroles élogieuses, pour garder le peu d'orgueil qu'il lui restait encore.

Il repose son verre et se penche vers elle. Pendant quelques secondes, elle se demande s'il va tenter de l'embrasser, et si priver le chef des cavaliers de ses parties génitales est une offense punissable de mort au ranch. Heureusement ; ce n'est que pour lui murmurer, goguenard « Au passage, jouer l'effarouchée pudique te sied mal, tu ferais mieux de remonter un peu les draps si tu veux te donner l'air plus crédible. ». Ok. Puisque c'est ce qu'il désirait. Elle laisse retomber ses bras et les écartent d'un air provocateur « Vas-y, rince toi bien l'oeil, parce que c'est la dernière fois que tu as l'occasion de me voir à poils ». Comme si c'était son genre d'être effarouchée. N'importe quoi. Elle se dirige vers le miroir et peigne ses cheveux d'une main, tout en attrapant une chemise d'Abel pour s'essuyer le visage, avant de la jeter négligemment à terre. Elle essaye de se souvenir comment ils en étaient arrivés là, sans succès.