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 and i don't want to forget how your voice sounds (bemy)

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MessageSujet: and i don't want to forget how your voice sounds (bemy)   and i don't want to forget how your voice sounds (bemy) EmptyMer 22 Mar - 17:23

Benny & Romy
and i don't want to forget how your voice sounds

of water - materialising

octobre 2011. Il fait noir, dehors. Même la journée. Le soleil a beau briller j'vois que du sombre, partout, tout le temps. Comme quand maman fermait les volets, comme quand elle s'enfermait dans sa chambre pour ne plus penser. Sauf que moi, je pense. Je pense à elle, et à ces monstres, ces horreurs qui sont partout, qui ne devraient pas exister. Je suis roulée en boule dans ce qui nous sert de lit avec Benny, parce que comme ça, j'oublie quelques instants que j'existe, je peux me dire que tout ça n'est qu'un mauvais rêve, que ça finira par passer. Puis ça revient, toujours, la réalité, et j'ai l'impression que mes poumons emprisonnent tout l'air que j'ai pu récolter et que j'étouffe, incapable de respirer. Alors j'appelle à l'aide, parce que la respiration lourde de Benny collé à moi n'a pas réussi ce soir à me bercer.
'Benny, j'ai peur...'
Il ne répond rien. Je n'ai pas souvent l'occasion de l'entendre parler, il n'est pas loquace. Il s'exprime autrement, en se rapprochant de moi pour me serrer très fort contre lui, enveloppant mon corps minuscule de ses gros bras qui pourraient me broyer. Puis, lentement, sa voix rauque commence à chantonner un air, un air qu'il a lui-même inventé. Je ferme les yeux pour l'écouter, et il n'y a soudain plus que nous, plus de rôdeurs, plus de sang, plus d'horreurs. Juste lui puis juste moi, qui n'a plus peur dans ses bras.



janvier 2017. Benny est parti maintenant, mais il est encore partout; il n'y a pas la moindre cellule dans son corps amaigri qui ne l'appelle pas, qui ne se tord pas d'agonie à l'idée qu'elle ne le retrouvera peut-être jamais. Cinq mois qu'elle ne l'a plus vu, deux mois qu'elle erre sans but, dispersant ses croquis partout où elle le peut, bouteilles à la mer dans une marrée noire dans laquelle elle s'enfonce. Le restaurant. C'est certainement la seule solution, mais à chaque fois qu'elle imagine y mettre les pieds, elle a l'impression que des mains viennent la saisir à la gorge pour venir l'étouffer.
Elle veut pas y retourner, parce qu'ils pourraient l'y attendre, cette fratrie de vermines. Dieu seul sait si le jour où Romy a retrouvé sa liberté, le groupuscule qui les a attaqué leur a définitivement réglé leur compte. Et si par hasard ils sont encore en vie, ce dont Romy est intimement persuadée, revenir au restaurant ressemble de trop prêt à se jeter dans la gueule du loup. Elle ne veut pas mourir, mais retrouver Benny est son unique priorité, quitte à être négligente. Alors une après-midi, quand ça fait deux jours qu'elle n'a rien trouvé à se mettre sous la dent, elle se dit que quitte à y passer, autant tout tenter. Épuisée, elle se décide à se mettre en marche, et le soleil ne va pas tarder à se coucher au moment où elle atteint sa destination. Elle tremble, parce qu'elle sait que c'est un couteau à double tranchant: ce qui l'attend, c'est l'Eden ou l'enfer. Son Benny ou ces salops. Le pire serait le rien. L'absence de qui que ce soit, pas le moindre mot. Être de nouveau entre ces murs remplis de souvenirs sans retrouver leur principal protagoniste. Observer les dessins placardés au mur sans l’œil fier de Benny à ses côtés. Non. Plutôt crever. Plutôt souffrir avec ces malades qui l'ont enlevée que de vivre ça.
Sa respiration se coupe aussitôt qu'elle arrive devant le restaurant, et des larmes lui montent aux yeux. Elle devrait être forte, mais elle n'y parvient pas. Elle reste un moment à l'écart, cachée dans la forêt qui lui fait face, cherchant un signe pour approcher.
'Sois là, je t'en supplie...'
C'est un murmure qui dépasse la frontière de ses lèvres. Elle prend une grande inspiration, puis, armée de son couteau, elle avance, traverse la route déserte et usée par les intempéries, monte les escaliers de bois pour atteindre la terrasse et, face à la porte, elle se fige. Son cœur se met à battre à vive allure quand elle lit le message inscrit sur le bois: 'Mot de passe?'
Sa gorge se noue et elle ne réalise pas tout de suite, ne comprend pas immédiatement ce que ça veut dire. Puis elle se souvient des mots de Benny, du code à utiliser si jamais ils étaient séparés et qu'ils tentaient de se retrouver. Délivrée, elle ouvre la bouche, cette fois pour chantonner cette même mélodie qu'il lui fredonnait pour la rassurer, priant de toutes ses forces pour entendre de nouveau sa voix rauque se joindre à la sienne.
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