kill or be killed

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erin rodrigo
« kill or be killed »

La gueule de la nouvelle, elle lui revenait définitivement pas – Levi, qu’ils avaient dit les autres. Forcément que le prénom lui évoquait rien, puisqu’il s’en serait sûrement souvenu s’il l’avait déjà croisée en venant ici et Rodrigo, il traînait sa grande carcasse dans le coin depuis suffisamment longtemps pour connaître toutes les tronches qui se pliaient aux ordres de Lazare.
A plusieurs reprises déjà au cours de la soirée, il l’avait observée avec insistance et sans paraître le moins du monde se formaliser qu’elle s’aperçoive des regards appuyés. Dans son dos ça en avait fait ricaner certains, de le voir s’intéresser aussi ouvertement à une gonzesse qu’avait sûrement même pas la moitié de son âge, mais personne ne s’était essayé à lui en faire la remarque face à face alors, il avait rien dit. Pas plus qu’il ne lui avait causé, à elle : enfermé dans un mutisme maussade qu’on lui connaissait bien, il s’était contenté de fouiller sa mémoire à la recherche de ce que lui rappelait cette gueule d’ange. Vainement. Ça l’avait agacé.

Ils étaient arrivés tard à l’avant-poste, trop tard pour espérer repartir en sens inverse le jour même et la situation avait un petit côté contrariant indéniable mais ils feraient avec, parce qu’ils n’avaient tout simplement pas le choix. On ne pouvait jamais prévoir avec certitude si le trajet allait être sans risque ou non et, au vu des troubles auxquels ils s’étaient heurtés à l’aller il semblait mieux avisé de ne pas tenter le diable en sachant que la nuit les surprendrait de toute manière avant qu’ils n’aient le temps de revenir à l’aéroport.

Les derniers rayons du soleil éclaboussaient les alentours d’une lumière jaunasse quand le guetteur se glissa dans la pièce où la plupart des autres se trouvaient après un repas frugal, l’agitation manifeste dans sa gestuelle et l’expression de son visage.
Un homme, à priori seul. Pas un rôdeur, non, mais un fouille-merde ça en revanche… il avait semble-t-il déjoué les pièges discrets disséminés çà et là dans les parages de l’avant-poste et s’était de toute évidence approché trop près de celui-ci. Il était bien entendu hors de question de le laisser retourner d’où il venait : si la localisation de la base était dévoilée, ils n’auraient d’autre choix que celui de l’abandonner et Lazare n’apprécierait certainement pas cela…
Dans un même mouvement, ils furent plusieurs à se lever, décidant dans la seconde et sans avoir besoin de se concerter au préalable qu’il allait falloir aller battre les fourrés sans tarder. La nuit, ici encore, était à redouter : pister un homme qui savait ce qu’il faisait n’était déjà pas chose évidente de jour. Il faudrait faire vite.
Deux binômes se formèrent aussitôt et Rodrigo, loup solitaire, se vit sans volontaire pour le flanquer. Aucune importance : il vérifia brièvement ses armes, et puis, alors que les chasseurs s’apprêtaient à partir en battue, sa pogne s’abattit lourdement sur l’épaule de Levi, attirant son attention à lui sans autre forme de procès. « Tu viens avec moi, la nouvelle. C’est le moment de montrer ce que tu vaux ; allez, magne-toi le cul. » Ce n’était ni une question ni une proposition et il n’attendit d’ailleurs pas de réponse avant de sortir avec les autres sans un regard en arrière pour elle.

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février 2019 + Installée sur une des chaises de la pièce principale de l’avant-poste, Erin finaliser l’inventaire, comme on lui avait demandé de faire. Si cette tâche pouvait paraître peu palpitante, elle lui permettait néanmoins de mieux comprendre le fonctionnement des lieux, mais aussi les ressources et armes qu’il comptait. Consciente de se trouver encore plus ou moins en période d’essaie, Erin faisait preuve de rigueur et de minutie, espérant ainsi attester de sa valeur pour ce nouveau groupe. Même si elle restait pour le moment la nouvelle, Levi commençait à créer des liens avec les occupants principaux des lieux, ce qui lui permettait de se sentir relativement à sa place. Cependant, à chaque fois qu’une nouvelle tête passait la porte de la bâtisse, la quarrie se retrouvait forcé de prouver son honnêteté, et bien plus souvent son dévouement pour la cause. Heureusement pour elle, la plupart semblaient convaincus par sa performance, sans quoi elle aurait sûrement déjà eut des ennuis. Absalom n’avait visiblement pas rapporter ses critiques auprès du groupe principale, ce qui l’arrangeait bien pour le moment. Cela dit, d’après ce qu’on lui comptait sur le garçon, il ne représentait pas vraiment une menace pour son intégration au groupe, étant donné qu’il détestait souvent par principe les nouveaux ou nouvelles.

Si par son jeune âge et par sa carrure peu imposante Absalom ne l’inquiétait pas, l’homme qui se tenait dans son dos lui commençait légèrement à la stresser. En effet, sans même le regarder, Erin savait que celui qui se nommait Gabriel la guettait du coin de l’oeil, sûrement curieux de savoir qui elle était. Bien qu’elle puisse comprendre les doutes des partisans, elle aurait apprécié un peu moins d’insistance, histoire d’oser se retourner sans croiser son regard. Avant qu’il arrive, certains membres avaient déjà parlé de lui, parfois en bien, parfois en mal et tous s’accordait à dire qu’il n’était pas vraiment la personne la plus chaleureuse du monde. A sa manière, Gabriel en imposait et elle devait avouer qu’elle se sentait légèrement intimidée face à l’idée d’être peut-être dans le collimateur de ce dernier. Néanmoins, loin d’être du genre à se laisser faire, Erin se redressa légèrement sur sa chaise, avant de finalement se retourner en refermant le cahier. « Voilà, c’est terminé pour aujourd’hui. » Mécaniquement, elle tendit l’inventaire à la femme qui s’en occupait habituellement, afin que cette dernière puisse vérifier, si elle le souhaite, le travail effectué.

Une fois le carnet rendu, elle croisa rapidement le regard de l’homme, avant de finalement entendre un des guetteurs s’inviter avec hâte. Le souffle court, il expliqua qu’un individu inconnu avait été repéré non loin de l’avant-poste. Rapidement, les occupants du poste s'organisèrent, visiblement tous bien fixés sur qui devait rester et qui devait partir en chasse. Comme personne ne lui avait expliqué son rôle dans cette situation, Levi resta assise, observant en silence le départ qui s’annonçait. Seulement, c’était sans compter la lourde de main qui échoua sur son épaule, visiblement bien motivée à la faire quitter sa chaise. Gabriel voulait la voir à l’oeuvre, et qui plus est en extérieur, ce qui était pour le coup une première pour elle depuis son arrivée dans la tribu. « Ok. » De toute manière, l’homme ne lui laissait pas d’autre choix, commençant déjà à filer de la pièce. Sans plus attendre, elle attrapa sa veste qui reposait sur un meuble vétuste, et emboita le pas aux petits groupes qui s’extirpait de l’avant-poste.

Hache à la main, elle suivait Gabriel qui visiblement était devenu son binôme pour la battue. D’abord silencieuse, la plus jeune observait l’autre avec curiosité, comme pour jauger la personne qu’il pouvait bien être. Les rumeurs sur le brun allaient de bon train, suffisamment pour qu’il apparaisse comme un membre intéressant et convenable. Se rapprocher de personnes comme lui pourrait lui donner des informations précieuses sur Lazare et son groupe, mais aussi pourquoi pas de plus grande chance d’être invité dans leur véritable base. Ainsi, elle devait se montrer utile pour la communauté, que ce soit sur le camp, mais aussi dans l’adversité. Fort heureusement, il se trouvait que la nature était clairement plus son fort que la cuisine et le ménage. « Par là ? » Du bout du nez, elle pointa une trace de pas qui jonchait le sol et qui pourrait bien appartenir au fameux trouble-fête recherché.

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erin rodrigo
« kill or be killed »

Avec les deux autres équipes, ils se concertèrent brièvement quant à la répartition des tâches et de la meilleure manière de procéder afin de ne pas risquer de laisser l’individu leur filer entre les doigts. Il existait toujours un risque, bien sûr, mais chacun des hommes et des femmes qui s’étaient portés volontaires pour partir à la chasse à l’homme avait une confiance crâne en ses capacités.
A l’exception d’une seule qui, elle, n’avait simplement pas eu le choix.
Tandis que les deux autres équipes improvisées s’en allaient déjà en quête de leur objectif, Rodrigo entendit Levi s’approcher et se retourna vers elle, jaugeant brièvement l’attitude de la jeune femme, l’arme qu’elle avait choisi d’arborer. Son attention s’attacha à son maintien de cette dernière et il s’estima satisfait : certaines personnes exhibaient leurs armes comme ils auraient porté un sac de course, d’autres le faisait d’une manière telle que l’objet devenait l’extension de leur bras, le danger mortel pour qui s’y frotterait. La différence pouvait paraître pratiquement indécelable pour qui ne savait pas lire l’attitude de quelqu’un, pour qui n’avait pas été formé à reconnaître le danger chez autrui…

Ainsi Levi passa-t-elle son premier examen avec succès en l’espace de quelques secondes seulement : elle savait se battre, les preuves restaient toutefois à être faites. Ne restait qu’à espérer qu’elle ne lui serait pas un poids mort dans l’entreprise, pour ce qu’il avait en horreur les boulets et les incompétents.

Rodrigo se mit en branle sans rien ajouter de plus, sa binôme sur ses talons puis bientôt à ses côtés. Il aurait pu, à ce moment, et maintenant qu’ils n’étaient plus que tous les deux, la passer à un interrogatoire de son cru, la prendre entre quatre yeux et enfin parvenir à comprendre d’où ce visage de petite princesse blonde lui était familier. Mais dans un premier lieu, l’homme s’intéressait mieux à son comportement, sa manière d’agir dans la situation qu’il lui avait imposée sans autre forme de procès. Le silence, qui pouvait peut-être paraître lourd à quelqu’un d’autre que lui, ne le dérangeait pas une seule seconde, bien au contraire.
Ensemble, ils se rendirent à proximité du lieu indiqué par le guetteur et commencèrent à remonter la piste en se basant d’abord sur les propos de celui qui avait aperçu l’étranger. Un gars malin, à priori. Trop, pour son propre bien, ou pas assez puisqu’il avait relâché sa vigilance un peu trop tôt. Dans tous les cas, guère plus qu’un futur cadavre en sursis selon Rodrigo : il était impensable qu’il puisse repartir d’ici avec une information aussi précieuse entre les mains.

La question de Levi attira son attention et il se tourna vers ce qu’elle lui désignait, pour finalement secouer la tête en signe de négation. « Il a dévié tous nos pièges, il peut pas être aussi con pour laisser une trace aussi nette. » Ses yeux quittèrent les empreintes pour revenir sonder ceux de la jeune femme. « Fausse piste. Réfléchis mieux. » Le ton de sa voix était âpre, peu amical bien qu’il ne soit cependant pas à la réprimander pour ça. « Tu sais chasser ? Il demanda, abrupt. Attendit un signe d’acquiescement, avant de continuer : cherche un passage d’animal récent. » Dans les espaces mixtes et boisés des plaines, il s’agissait là d’une des manières les plus simples de se déplacer si l’on voulait rester discret et ne pas non plus emprunter l’asphalte défoncé des vieilles routes. Quelqu’un de suffisamment compétent pouvait aussi se déplacer sans laisser trainer derrière lui le moindre signe, mais alors celui-là ne s’exposerait pas au regard d’un guetteur… En comparaison, se mouvoir en laissant croire à un animal était autrement plus simple.
Mais aucun de ceux-là ne se serait risqué récemment dans le coin si un humain s’y trouvait, ainsi toute marque encore fraiche ne pourrait qu’être l’œuvre de leur visiteur indésirable.
Et Rodrigo attendit, le regard scrutateur rivé à elle et à ses moindres faits et gestes. Il aurait pu l’épauler, chercher lui aussi – il savait faire – mais c’était elle qu’il voulait voir à l’œuvre. Et l’urgence ne pressait pas leur avancée, en ce que l’urgence n’était bonne qu’à les aveugler : les autres lazarus allaient monter un périmètre et le rabattre à l’intérieur jusqu’à ce que l’individu se retrouve privé de tout échappatoire. D’une manière ou d’une autre, ils l’attraperaient.

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février 2019 + Dans l’ombre de l’homme, Levi espérait se faire légèrement remarquer dans cette chasse à l’homme, histoire de prouver sa valeur et sa force. Seulement, idéalement, elle apprécierait ne pas être dans le binôme qui trouverait la proie, ce qui ne la poussait pas forcément à faire preuve de rigueur. Du moins, c’était avant que le plus âgé ne souligne son manque de vigilance, attestant que l'inconnu ne pouvait pas avoir passé les pièges tout en laissant des traces aussi évidente. Un peu vexée de se faire reprendre, la chasseuse pinça légèrement le nez, avant de s’accroupir légèrement pour analyser plus en détail l’environnement. Durant ses années de traques avec les Jackals, elle avait appris à écouter la nature, tout comme en chasse où elle se montrait plutôt débrouillarde. Après quelques seconde de silence et de repérage, elle se redressa sur ses talons, avant d’avancer dans une toute autre direction, certaine de son choix. Sans prendre la peine de vérifier sur l’homme la suivait, elle s’enfonçait à travers les arbres, avec une prudence accrue, persuadé que l’intru devait encore rôder dans le coin. Quelque part, elle espérait que ce dernier était très bien caché, et qu’ils finiront par rentrer bredouille.

Soudainement, un craquement de branche l’interpella à l’est, et avant même qu’elle ne pivote sur elle-même, une silhouette masculine prenait ses jambes à son cou. Ne disposant pas d’armes à feu, la chasseuse pressa le pas, pour une course effrénée. Vive, elle tenait la distance avec la proie, jusqu’à ce que cette dernière disparaisse de son champs de vision, indéniablement caché derrière un tronc d’arbre épais. « Sors de là ! » Comme personne n’avait tiré depuis le début de la rencontre, Erin avait conclu que l’individu ne possédait pas d’arme à distance, ce qui minimisait les risques. Le nombre faisait la force et en sentant le brun arriver dans son dos, elle comprenait que le piège se refermait doucement. Avec un peu de chance, l’intru allait peut-être réussir un coup de maître pour s’échapper, seulement consciente de ne pas pouvoir faire faux bon à sa mission, elle ne pouvait plus rien y faire.

D’un vague coup de tête, elle indiqua un arbre en particulier à Gabriel, afin de prendre chacun un côté. Coincé, l’homme ne pourra pas fuir, la chasse touchait à sa fin, les chiens arrivaient. Puis alors que la silhouette de l’homme arrivait dans son champs de vision, Erin bloqua légèrement, reconnaissant doucement un visage bien connu. Certes, Eddie Ware n’était pas un ami, c’était même une des petites raclures qu’elle avait chopé en train de chaparder dans le cabanon de Whilelmina, mais il restait non seulement une connaissance, mais surtout un quarrie. « Erin ?! » Perplexe, elle regarda l’autre homme, soucieuse de perdre automatiquement de la crédibilité. « Je m’appelle Levi. » Rester dans le rôle semblait-être la meilleure chose à faire, même si quelque part, une légère boule au ventre commençait à naître.

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erin rodrigo
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Rodrigo n’obtint pas de réponse à ses propos – il n’en attendait pas spécialement de toute manière – mais elle sembla subitement renifler une piste et s’engagea aussitôt dessus sans lui en faire part au préalable cette fois. Et s’il aurait pu repasser derrière elle, passer au crible ce qu’elle avait pu (ou cru) voir, il ne s’en embarrassa pas : la certitude soudaine dont elle faisait preuve était, à ses yeux, un indicateur suffisamment bon de la justesse de son raisonnement.
Maintenant quelques mètres de distances avec elle – il n’avait pas besoin de la coller, juste de rester sur ses traces –, son regard s’attacha à l’environnement, palliant à celui de la jeune femme qui, elle, avait à se concentrer sur autre chose. Ils se déplaçaient avec silence et rapidité et la traque n’eut pas le temps de s’éterniser en longueur qu’ils furent récompensés de leurs efforts tandis que leur gibier, pressentant sans nul doute l’imminence des chiens de chasse, prenait la fuite sans plus aucune précaution. Vive, la gamine fut prompte à la réaction et lui-même ne tarda pas à presser l’allure, peu disposé à lambiner alors que la proie était à portée de main.

Au geste de Levi pour lui désigner l’emplacement du planqué, il acquiesça d’un très léger hochement du menton et, d’un même accord tacite, les deux pisteurs refermèrent le filet. Acculé contre l’arbre, l’inconnu les dévisagea tour à tour et, parce que Rodrigo avait son attention vissée sur lui – le corps tendu, prêt à l’attaque si cela s’avérait nécessaire –, il ne put manquer l’expression d’incrédulité sur le visage de l’autre. Et le prénom. Erin ?
Ses sourcils se froncèrent ; dans sa main, le couteau dégainé un peu plus tôt se trouva soudaine prisonnier d’une poigne beaucoup plus crispée. Et son regard glissa lentement du fuyard vers sa camarade, prêt à laisser exploser une colère aveugle découlant directement de son incompréhension. « C’est quoi ce bordel, Levi ? » Presqu’aussitôt, son attention retourna au troisième larron. « Tu la connais ? » L’attitude hostile, la voix pas moins. L’inconnu, lui, ne manqua pas de remarquer la porte de sortie potentielle que pouvait lui offrir ce rebondissement imprévu. « Oui, il lâcha en reprenant un peu plus de contenance, comme si ce savoir lui offrait un minimum de pouvoir. On te croyait morte. » Il s’était tourné vers Levi, identifiant visiblement Blondie comme sa carte de survie potentielle, celle qui ne manquerait pas de prendre sa défense face à son partenaire beaucoup plus antipathique.
Ou peut-être cherchait-il simplement à causer un flou, se créer une porte de sortie ? Rodrigo était déconcerté, quoique cela se traduisît surtout chez lui par une expression qui n’augurait rien de bon sur le visage, parce qu’il détestait ne pas comprendre mais que ce qu’il devinait tout de même lui indiquait que quelque chose, ici, sentait particulièrement mauvais.

Il fut fautif de laisser son attention se relâcher un peu trop, d’accorder soudainement trop d’importance à Levi et pas assez au captif. Une opportunité que l’autre ne manqua pas de saisir, bondissant à sa gauche avec la nette intention de reprendre sa course folle – de toute évidence, la fuite lui semblait plus sage qu’une confrontation au corps-à-corps – tandis que le mexicain s’apprêtait à formuler une nouvelle question à l’intention de la gamine.
C’était, cependant, sous-estimer la vivacité de réponse du lazarus.
L’instant d’après, le téméraire se retrouvait à se vautrer par terre, embrassant à pleine bouche l’humus des sous-bois. Rodrigo ne lui laissa guère plus le temps que de se redresser sur un coude tandis qu’il s’en venait le surplomber, posant un genou à terre pour se retrouver pratiquement à califourchon sur son dos. D’une main, il lui attrapa la tignasse pour le forcer à relever la tête, de l’autre il glissa la lame du couteau de chasse contre la gorge ainsi offerte. « No me jodas. J’ai pas envie de rire, là. » L’avertissement valait tout aussi bien pour lui que pour Levi, en témoigna le regard qu'il posa brièvement sur elle comme pour appuyer ses propos, tandis que le fil de sa lame chatouillait méchamment la carotide du prisonnier. « Tu viens d'où ? »

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février 2019 + La situation pouvait difficilement être plus délicate qu’à cet instant précis. Sa présence chez Lazare restait assez nouvelle, et même si le premier test avait été un succès, sa place restait encore à faire. Gabriel était indéniablement un membre qu’il ne fallait pas décevoir, et avec ce foutu Eddie dans les parages, sa couverture risquait sérieusement de sauter. Bien sûr, elle pourrait parfaitement se retourner vers le brun, afin de le prendre par surprise, mais les risques étaient assez gros. Non seulement, il risquait de prendre rapidement l’avantage, mais surtout, qui lui ferait confiance après la mort mystérieuse d’un homme de son calibre dans la forêt. Indécise, elle optait pour le silence, fixant du regard la proie, qui sans surprise cherchait un échappatoire dans le regard de la blonde. Consciente que Gabriel l’observait, Levi gardait un visage fermé, comme si rien ne pouvait l’atteindre, comme si la mort d’un des siens ne comptait pas. Un mensonge qui lui serrait sans surprise l’estomac, d’autant plus en observant que l’attention du plus âgé ne se portait que sur le quarrie.

Si l’homme de main préférait écouter ce que disait Eddie, cela sous-entendait forcément qui ne lui faisait pas confiance, encore moins qu’avant. Une position délicate qu’elle ne savait pas forcément comment gérer, elle qui d’habitude restait plutôt en retrait. Seulement, ici, hors de question de laisser son sort ou celui de la carrière entre les mains d’un petit revendeur d’Angelus. « De la carrière… Erin, je t’en supplie. » L’étaux se refermait doucement sur elle, et sans même qu’elle ne le réalise, la peine se transformait doucement en colère. « Erin est morte. » Sa mission ne pouvait pas se terminer ainsi, elle ne pouvait pas décevoir Aaren, elle se le refusait.

Agacée par la tournure des événements, Levi prenait les choses en main, condamnant au passage la pauvre âme égaré qui avait eu le malheur de se promener un peu trop loin de chez-elle. Seulement, à y réfléchir un peu plus, les chances qu’ils en sortent tous les deux indemnes étaient assez maigre, si bien que cela ne valait sûrement pas le coup de mettre la carrière dans une situation délicate. Ce mode de pensée ne lui ressemblait pas vraiment, du moins, pas à celle qu’elle s’était efforcée d’être depuis son départ du ranch et quelque part, ce retour en arrière l’effrayait légèrement. Malheureusement, les dés étaient lancés, et d’un regard assuré et sauvage, elle interpella le plus âgé. « Si tu as des questions, tu peux me les poser, mais en attendant on a une mission. » Loin d’être une gamine fragile, Levi était une guerrière, et même si elle fuyait bien souvent cette réalité, elle restait présente.

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erin rodrigo
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La Carrière… Et doucement, les quelques pièces du puzzle s’emboitèrent afin de fabriquer un début d’esquisse. Son regard resta rivé sur Levi tandis qu’elle répondait à la supplique de l’inconnu et, alors qu’il l’observait avec une attention soudainement beaucoup plus accrue, il se rappela enfin d’où lui venait cette sensation de déjà-vu qui l’énervait tant depuis qu’il avait posé les yeux sur elle pour la première fois tout à l’heure. « Vraiment ? » il demanda d’un ton dangereusement calme. Erin. Il se souvenait de ce prénom, oui, il s’en rappelait de la même manière que l’on se rappelle de quelque chose entendu d’une oreille distraite lorsqu’on vient vous le répéter une seconde fois. Il avait été à la Carrière quelque fois après tout, et avait eu tout autant d’occasion de se mêler à sa faune locale.

Levi le rappela à l’ordre et il se hérissa instinctivement face à cette attitude, détestant qu’elle se permette cette attitude envers lui. Et pourtant il n’était pas vraiment son supérieur, dans la hiérarchie des Lazarus, ou sinon par son ancienneté et pour ce qu’elle était, en ce qui la concernait, guère plus qu’une recrue encore fraîche. « T’es pressée ? il rétorqua, une pointe de sarcasme acide dans la voix. Elle va pas aller bien loin, la mission. » De fait, le fugitif était toujours à terre et le mexicain maintenait la menace du couteau sous sa gorge, raisonnablement convaincu que cela dissuaderait toute nouvelle tentative d’échappée.
Rodrigo avait des questions, oui, et pas l’intention d’attendre plus que cela. Et puisque sa compagne venait si aimablement de lui permettre de les lui poser, il n’allait certainement pas s’en priver – il ne l’aurait fait dans aucun des cas, de toute manière. « Je veux des explications, Levi. » Et je les veux maintenant, termina son regard assombri. « Il t’a suivi ? Ou c’est toi qui l’a amené ici ? » Parce que son esprit refusait d’accepter que tout ceci ne soit qu’une simple coïncidence, elle était nouvelle et il n’avait aucune raison de traîner dans les parages, or le seul lien visible qu’il pouvait faire était le fait apparent qu’ils semblaient se connaître – et qu’ils venaient tous deux de la Carrière. Mais quant à cet élément en particulier, il ne souhaitait pas la mettre au pied du mur de suite, préférant plutôt attendre de voir de quelle manière comptait-elle se justifier de la présence de cet intrus qui, tout compte fait, n’était inconnu qu’à lui.

Elle, elle avait l’air relativement calme compte tenu de la situation. Une image de façade ? Ou bien n’avait-elle réellement rien à se reprocher, corroborant en cela les affirmations qu’elle avait tenues au prisonnier ? Rodrigo était suspicieux de nature, cela lui avait permis de rester en vie tout ce temps durant, peu disposé à reconnaître son innocence dans une histoire qui lui semblait beaucoup trop floue.
Et peut-être avait-il tort : il saurait le reconnaître si tel était le cas, pas du genre à se cacher derrière un ego surdimensionné et la certitude d’avoir toujours raison. Encore faudrait-il, pour ce faire, qu’elle sache l’en convaincre. « Dis-moi c'est juste de lui dont faut s'occuper… ou toi aussi ? » La menace sous-entendue était on ne pouvait plus claire. Et il la tuerait au moindre signe d’hésitation qu’il lirait dans son regard, ou il n’hésiterait pas à tenter le geste en tout cas – la possibilité d’un échec n’était pas à écarter car ce serait alors du deux contre un, même si l’autre était pour l’heure complètement à sa merci.

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février 2019 +La situation s’envenimait doucement, et si elle ne faisait pas preuve de prudence et d’intelligence, elle pourrait bien être en train de pousser son dernier souffle. Loin d’être complètement stupide l’homme de main de Lazare comptait bien mettre au clair la situation et surtout faire passer une nouvelle épreuve à la blonde. Consciente de jouer sa vie, Erin gardait son calme avec un sang-froid sans pareil, comme le ferait Levi. En effet, même si elle se retrouvait en mauvaise posture, elle restait une nouvelle recrue et comme beaucoup, elle avait forcément appartenu à un groupe par le passé, ce qui ne faisait pas forcément d’elle un ennemi. Certes, la nouvelle ne tombait pas au bon moment et encore moins aux côtés du membre de la tribu le plus compréhensif. Erin ne connaissait pas suffisament Gabriel pour prédire ses réactions, si bien qu’elle restait sur ses gardes au cas où un coup de couteau partirait un peu trop vite. « Il m’a suivi ? J’en doute, ça voudrait dire qu’il est dans les parages depuis mon arrivée, ça me paraitrait gros et drôlement bien jouer pour un dealer. » Son assurance laissait penser qu’elle disait la vérité, un bon début dans son petit jeu, qu’elle savait loin d’être jouer.

L’homme n’allait certainement pas se satisfaire de si peu, Erin le savait pertinemment, non pas parce qu’elle pensait l’avoir cerné, mais parce qu’elle savait que dans la situation inverse, elle ne pourrait s’en contenter. « Je n’ai aucune idée de pourquoi il est là. » Sans jamais regarder le quarrie, Levi fixait du regard le plus âgé, incapable de savoir si elle devait réellement se justifier ou non face à lui. Après tout, si elle cherchait trop à se défendre, elle pourrait donner l’impression d’avoir des choses à cacher, ce qui ne ferait que la mettre d’avantage dans l’embarra. Bien sûr, si les ennuis commençaient à devenir trop important, elle pourra toujours faire en sorte de renverser la situation en attaquant directement le plus âgé, mais cela sous-entendra au passage que sa mission toucherait à sa fin. L’idée d’échouer l’effrayait, tout autant par rapport à Aaren qu’à sa mère, qui aux dernières nouvelles étaient toujours portée disparue. La peur au ventre, et durement ravalée, Erin faisait face au danger, comme la guerrière qu’elle avait toujours été.

Gabriel la menaçait pour lui faire peur, pour la voir trembler, mais malheureusement pour lui, il n’était pas tombé sur la bonne brebis. Erin ne faiblissait pas et comme pour se faire mieux entendre, elle se pencha légèrement vers lui, tout en soutenant son regard. « Je ne suis plus Erin et je ne suis plus de la carrière. » La petite Levi qui restait au second plan semblait prendre en assurance, et pour la première fois depuis son arrivée dans la tribu, elle acceptait de montrer un peu plus de férocité. En prenant ce fichu vaccin, elle avait déjà prouvé son dévouement, mais s’il en fallait plus, elle était prête à le faire.

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erin rodrigo
« kill or be killed »

Il pouvait choisir de la croire et ne pas insister davantage, ou bien il pouvait agir tout à l’inverse. Comment savoir quelle décision était la bonne à prendre, quand il avait si peu de cartes en main ? Qu’il la malmène un peu trop fort et, si elle était réellement aussi innocente que ce qu’elle prétendait, les retombées sur lui pourraient fort se montrer désagréable, quand il n’était déjà pas vraiment en état de grâce au sein de leur groupe… L’erreur pouvait être faite dans les deux sens, excès de zèle ou de naïveté, et les conséquences dans chacun des cas lui paraissaient peu enviables.
Restait toujours la possibilité de cuisiner le prisonnier mais, à en juger par son état et son comportement, Rodrigo savait d’ores et déjà qu’il ne lui serait d’aucune utilité : des cas comme lui, il en pleuvait régulièrement en prison, des p’tits gars atterris là pour on ne savait trop quelle connerie stupide et qui, une fois nez à nez avec plus gros qu’eux, étaient prêts à dire et faire tout ou n’importe quoi pourvu que ça leur épargne quelques désagréments.
Celui qu’il tenait actuellement sous son joug était clairement fait de cette étoffe : en dehors de ce qu’il avait laissé échapper avant de se retrouver dans cette si fâcheuse posture, rien de ce qui ne franchirait la barrière de ses lèvres ne serait digne de confiance.

L’affirmation de Levi, son assurance si fière au vu de la situation et des suspicions de son partenaire et son attitude laissant clairement entendre qu’elle ne comptait pas se laisser intimider par deux-trois insinuations, tout cela fit germer en lui une nouvelle idée quant à la manière de se sortir de tout ça. Non pas qu’elle l’eût convaincu – en témoigna le grognement dubitatif rétorqué en guise de réponse à ses propos – mais, si elle n’était pas en mesure de le faire avec les mots, peut-être les actes seraient mieux efficaces.
Rodrigo se releva et, maintenant son emprise sur le fugitif, força ce dernier à faire de même. Une fois tous deux debout, son couteau quitta la proximité de la gorge et tandis que les secondes s’étiraient éternellement, il tendit la lame, manche vers l’avant, à Levi. « Puisqu’il est pas avec toi… » L’invitation était on ne pouvait plus explicite et, pour Levi, c’était là l’occasion de prouver sa loyauté : qu’elle le connaisse ou non, il était tout bonnement impensable de laisser repartir l’individu vers les siens, pas avec toutes les informations qu’il détenait. Lequel individu, sentant bien que sa vie était en train de se jouer à cet instant précis, recommença à se tortiller dans la poigne de fer qui le maintenait sans la moindre pitié ; sous l’emprise de la peur, il se mit à bégayer alors qu’il tentait de mendier sa survie.
Rodrigo l’ignora, se contentant simplement de lui tordre le bras d’une manière suffisamment douloureuse pour qu’il ait une bonne raison de geindre. Et, la main toujours tendu vers sa camarade dans l’attente qu’elle se saisisse de l’arme ainsi offerte, il reprit : « Pas la tête. » Non pas pour le sadisme de refuser au quarry la possibilité d’une mort rapide et définitive mais parce qu’un corps tué et laissé sur place pouvait encore parler à qui le trouverait là. En tant que rôdeur, les preuves partiraient avec lui et la scène de crime ne serait rien de plus qu’une clairière un peu trop piétinée.
Mais encore fallait-il pour ça que Levi se plie à ce qui lui était demandé – avait-elle seulement déjà tué un homme ? Toujours rivé à elle, le regard du lazarus se durcit quelque peu tandis qu’il attendait sa décision, parfaitement conscient néanmoins qu’elle pouvait tout aussi bien saisir l’occasion pour le tuer, lui, alors qu’il lui offrait son couteau de chasse sur un plateau d’argent.

survit depuis le : 06/04/2018

février 2019 +Erin devait faire ses preuves, elle le savait et pour la première fois depuis son arrivée, elle pouvait le faire. Si tomber sur un quarrie au beau milieu d’une chasse à l’homme tombait à priori très mal pour elle, la chasseuse savait pour autant que cette rencontre pouvait jouer en sa faveur si elle la jouait rusée. Malheureusement pour le pauvre homme, être malin pour Erin sous-entendait opter pour un sacrifice bien choisi afin de sauvegarder le bon déroulement de la mission. Tuer un quarrie pour aider la carrière, une idée qui ne ferait sûrement pas l’unanimité, pas même pour le bourreau défini. Derrière son regard impassible et son visage déterminé, la blonde se retrouvait tiraillée, incapable de se décider sur la manoeuvre à suivre. D’un côté, elle pourrait se jeter sur le plus âgé pour sauver son comparse, et de l’autre le condamner par elle-même, afin de devenir une membre une fois pour toute un membre de la tribu. Lorsque la lame de Gabriel s’offrit à elle, la demande se faisait plus formelle et le temps venait à manquer pour se décider.

Fuck. D’horribles actes, elle en avait déjà commis. Sa place en enfer était déjà toute faite, inutile de mettre en péril une mission pour trouver une quelconque rédemption. De toute manière, dans cette situation, le bon choix n’existait pas et quoi qu’il puisse arriver par la suite, la chasseuse saura en assumer les conséquences. Pour le moment, la blonde devait veiller à son intégration, afin de pouvoir collecter des informations primordiales pour la carrière, ainsi que pourquoi pas, quelques pistes au sujet de sa mère toujours portée disparue. Après un bref instant d’hésitation, elle attrapa le couteau qu’on lui tendait, serrant avec un geste manifestement habitué le manche, avant de venir planter la lame dans la chair du pauvre Eddie. Dans des sanglots terribles, il tomba finalement au sol, laissant les deux bourreaux en tête à tête. « Satisfait ? » Sans le savoir, le quarrie venait peut-être de permettre à son clan de garder l’avantage par rapport aux autres au sujet de Lazare, du moins, c’était la vision que la blonde donnait à sa mort, pour lui trouver un sens.

Un jour, elle payera pour toutes les âmes arrachées, que ce soit celle-ci ou toutes les autres. En attendant, Erin venait d’exécuter les ordres du plus âgé, prouvant sa loyauté et surtout sa détermination. Dans cette chasse à l’homme, elle venait d’abandonner en partie l’image de la gamine égarée pour celle d’une redoutable guerrière, ce qui pouvait autant lui porter préjudice, que inversement. Aussi dangereuse qu’utile pour la tribu, son cas allait peut-être faire un peu parler, et ainsi faire bouger les choses. Idéalement, Erin aimerait pouvoir participer d’avantages aux quêtes de groupes, afin de côtoyer plus de membres et mieux comprendre ce nouveau et mystérieux groupe. « On devrait retrouver les autres ? » Avec nonchalance, elle essuya la lame du couteau sur son jean délavé, avant de finalement la tendre à son propriétaire. Assurée, la chasseuse les fixa du regard, comme pour essayer de comprendre si la conversation était close ou non.

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survit depuis le : 07/02/2019

erin rodrigo
« kill or be killed »

Rodrigo la scrutait avec l’attention à toute épreuve d’un prédateur guettant les moindres faits et gestes de sa proie, le corps tendu dans une attente patiente (plus ou moins) mais aux abois. Dans sa poigne, l’homme n’était guère plus à ses yeux qu’une vulgaire poupée e chiffon, un accessoire jetable sur le point de remplir l’objectif pour lequel il avait été conservé en l’état jusqu’ici. Il ne prêtait attention à aucune de ses plaintes, aucunes de ses gesticulations – lesquelles n’étaient de toute manière pas en mesure de représenter pour lui une quelconque menace, du moins pas tant que le prisonnier était gardé dans son entrave – et seule la décision que la jeune femme s’apprêtait à faire semblait attirer son intérêt.
Parce qu’à l’instar du tableau dépeint ci-dessus, Levi n’avait rien d’une proie. Et si les secondes avaient paru durer une éternité après qu’il lui eût offert sa lame, il ne s’écoula en réalité qu’un très bref instant avant qu’elle ne s’en saisisse pour exécuter l’ordre tout juste commandé. A la perfection, et sans un seul frisson d’hésitation ou de dégoût.
Cette attitude à elle seule venait de faire gagner à la nouvelle recrue un ou deux échelons dans l’estime de l’hispanique et, si l’exploit n’était certainement pas du genre à intéresser la concernée, il n’en était pas moins réel. Suffisant, en tout cas, pour que l’autre décide de baisser un peu sa garde avec elle, se montrer légèrement moins circonspect.

Le corps commença à se faire lourd, les jambes de la victime désormais incapables de supporter le poids de celle-ci maintenant qu’elle plongeait irrémédiablement vers la fatalité de son destin ; Rodrigo relâcha sa prise, laissant l’étranger s’affaler à terre dans son propre sang et tout l’air de ne pas se soucier de lui plus qu’il ne se serait soucié d’un vulgaire nuisible écrasé à coups de pied.
Parce que c’était là ce que les années avaient fait de lui : une sorte de monstre courant après les vestiges de son humanité tout en s’évertuant à les piétiner avec des actes de la sorte. Un meurtre gratuit, inutile et de sang-froid.
(Longtemps qu’il avait cessé de songer à ce qu’Isabella penserait de lui à présent.)
Non, il se corrigea mentalement tandis que ses yeux contemplaient machinalement les derniers soubresauts d’agonie de l’homme poignardé. Un acte nécessaire, pour Lazare. Pour eux.

L’éclair d’un rayon de soleil brièvement capté dans les mouvements de la lame d’acier agita un vieux réflexe primitif en lui, tandis que ses muscles se contractaient à l’instinct. Pour rien, toutefois : Levi lui rendit le couteau et il s’en saisit dans la foulée, rengainant celui-ci dans le vieil étui de cuir usé en même temps qu’il haussait les épaules devant la question qu’on venait de lui poser. « On rentre » répliqua-t-il, bourru et laconique. Et d’amorcer aussitôt un mouvement sans autre forme de procès, abandonnant sur place le cadavre avant que celui-ci n’ait la bonne idée de se réanimer.
Quant à prévenir les autres participants de la battue, il ne s’en embarrassa pas malgré les quelques signaux sonores qu’il aurait pu user afin de communiquer avec les moins éloignés d’eux. Pas pour rien que Rodrigo avait l’habitude de faire cavalier seul : en équipe, il faisait un partenaire terriblement piètre. « Tu devrais sortir plus souvent, il lâcha sans se tourner vers elle, ayant perçu les bruissements de pas indiquant qu’elle le rattrapait sur son flanc gauche. T’es plus douée pour ça que pour faire les comptes. » Pas un compliment, encore moins une invitation à la conversation : rien de plus qu’une constatation balancée par-dessus une épaule d’une voix pas plus chaleureuse qu’à l’habitude. Par ailleurs, ce seraient sûrement là les derniers mots qu’il daignerait bien lui décrocher d’ici à leur retour sur l’avant-poste.

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