little sister | lenny

+ Après une sortie en forêt assez banale, Nino reprenait doucement, mais sûrement la direction de la mine, pressé de retrouver son petit chien d’amour. Encore trop petit pour l'accompagner en terre sauvage, Poutine restait la plupart du temps à la mine, sans pour autant manquer d’amour et d’attention. En effet, quand l’éclaireur quittait la mine, il s’assurait toujours que l’animal soit en bonne compagnie et qu’à son retour il ne manque de rien. Une nouvelle responsabilité qui lui imposait certes bien plus de nouvelles tâches, mais qui en retour le comblait d’amour et de bonheur. D’ailleurs, même si le faire entrer dans la mine ne fut pas chose facile, il se trouvait finalement être une source de tendresse pour beaucoups de survivants, ce qui après les derniers événements, ne pouvait s'apaiser un peu les tensions. Bien sûr, même si la plupart de habitants se plaisaient à offrir quelques caresses à l’animal, Nino ne s’en déchargeait pas pour autant, cherchant continuellement des objets ou fournitures qui rendrait la vie à la mine moins monotone pour Poutine. D’ailleurs, avant de rentrer, l’ancien montagnard souhaitait passer rapidement et discrètement au marché de la carrière et ainsi peut-être trouvé un bidule à rapporter.

Avant cela, il lui fallait encore traverser un bon morceau de la forêt, ce qui sous cette chaleur pouvait prendre encore une voir deux bonnes heures. Heureusement pour lui, quelques nuages commençaient à s’amasser dans le ciel, annonçant très certainement une soirée orageuse qui pour le coup ferait peut-être un peu redescendre le thermomètre. Une aubaine pour les éclaireurs qui pourront ainsi reprendre leurs expéditions un peu plus lointaine, sans craindre le coup de chaud ou la déshydratation. Néanmoins, pas du genre à se faire de faux espoirs, Nino préférait garder un rythme de marche économique, tout en optimisant au mieux ses ressources en eaux. Une prudence dont tout le monde ne faisait pas forcément preuve dehors, d’autant plus ceux qui s’habituaient un peu trop à la vie en communauté et qui en oubliait la cruauté du monde extérieur.

Alors qu’il arrivait au bord d’un petit point d’eau qu’il connaissait très bien, le brun remarqua un homme assis les fesses dans l’eau, visiblement préoccupé par sa jambe. En s’approchant, Nino remarqua une plaie sérieusement ouverte au niveau du tibia, qui ne ressemblait en aucun cas à une morsure. Après avoir estimé les risques, l’éclaireur s’avança doucement en direction de l’homme pour lui apporter un peu d’aide -du moins s’il était en mesure de lui en offrir. « Tu t’es bléssé ? » La question aussi stupide soit-elle permettait au moins un minimum de lancer le dialogue et de montrer qu’il venait totalement en paix. Visiblement peu paniqué à l’idée de voir débarquer un parfait inconnu, l’homme dégagea simplement sa jambe de l’eau pour montrer sa blessure, avant de la replonger dans le liquide sûrement apaisant, mais absolument pas médical. « J’ai marché dans un piège à loup… J’ai essayé de rentrer, mais… Enfin bref. » Même si cela ne lui était jamais arrivé, Nino imaginait assez facilement la douleur que pouvait ressentir l’homme et après une vague hésitation, lui suggéra son aide. « Si tu veux, je peux t’aider à rentrer chez toi ? » La proposition étonna sans surprise l’autre, qui chercha du regard l’embrouille. « Tu as dis que tu voulais rentrer chez toi, alors allons-y ? » Bien décidé à rentrer chez lui avant la tombée de la nuit, Nino ne laissa pas vraiment le choix à l’homme, qui accepta finalement cette aide précieuse en se relevant pour venir s’appuyer contre l’éclaireur.

« Je viens d’Olympia. » L’appartenance de l’homme à ce groupe ne l’étonnait pas le moins du monde, pour dire vrai il en aurait même mis sa main à couper. En effet, les habitants de ce groupe profitaient indéniablement d’un confort de vie plus que attrayant, qui à défaut de les préparer à la vie dehors, les rendaient moins sauvages et plus abordables. « Allons-y alors. » Ni une, ni deux, les deux hommes se mirent en marche, tout en essayant de rester prudents. Après une bonne demi-heure de marche, les deux hommes arrivèrent enfin au niveau des murs de la ville et se firent sans surprise aborder par les gardes. Heureusement pour lui, le blessé encore conscient assura qu’il lui venait en aide et rapidement on les conduisit jusqu’à l’infirmerie du groupe. Une fois l’homme arrivé à bon port, une femme visiblement proche du blessé le remercia sincèrement avant de lui offrir gracieusement de l’eau. Un cadeau certes simple qu’il accepta volontiers, avant de ressortir du bâtiment et ainsi se poser un peu sur le petit banc qui se trouvait sur le perron. Un peu fatigué par cette marche, il profita de cette petite pause pour desserrer un peu ses chaussures et souffler un peu, tout en contemplant les maisons qui entourait l’infirmerie.

+ Installé sur le banc qui occupait le perron de l’infirmerie, Nino guettait le ciel d’un oeil inquiet. S’il prenait la route maintenant, il sera à la mine avant la tombée de la nuit, mais complètement trempé et s’il attendait encore trop longtemps il pouvait dès lors abandonné l’idée de dîner avec tout le monde sans pour autant avoir la certitude d’être au sec. Un dilemme assez problématique, qu’il préféra résoudre rapidement, persuadé que la première idée était toujours la bonne et que quand on avait un plan, il fallait s’assurer de le suivre jusqu’à terme. Dès lors, le brun se releva, vérifia un peu le contenu de son sac et surtout de sa gourde, avant de sortir une sorte de k-way qui à défaut d’avoir du style le protégera un peu de la pluie qui n’allait pas tarder à s’abattre. Une fois habillé de son nouvel accoutrement et prêt à repartir, une petite voix l’interpella dans son dos en l’appelant par son prénom. Un peu surpris et surtout curieux de savoir ce qu’un olympian pouvait bien lui vouloir, l’éclaireur se retourna en direction de la petite voix, avant de finalement se figer totalement.

Malgré les huit années qui s’étaient écoulées, Nino n’avait ni oublié les doux traits qui composaient le visage de sa petite soeur, ni oublié l’amour et le manque qu’il ressentait à son égard. Avant même qu’il n’arrive à formuler une phrase, cette dernière le captura dans ses bras, serrant de toutes ses forces, sûrement tout aussi chamboulée que lui. Dans son état un peu second, l’éclaireur arriva finalement à reprendre le contrôle de son corps et ainsi répondre à cette embrassade sincère. « Lenny, je te croyais morte... » Peu importe son optimiste à l’égard d’un jour pouvoir retrouver sa petite soeur, une partie de lui avait toujours été convaincu du contraire et maintenant qu’il la tenait dans ses bras, il réalisait à quelle point cette dernière avait pris le dessus sur l’autre. Le calin dura des minutes entières, sans qu’aucun ne parvienne à formuler le moindre mots, le tout sous le regard curieux de quelques passants.

Quand la brune lâcha prise, Nino garda sa main, comme par peur de la voir disparaître à nouveau. Des questions, ils en avaient des milliers chacun et il leur faudra bien plus qu’une soirée pour rattraper le temps perdu. Néanmoins, il fallait bien commencer par quelque part et malgré la confusion, Lenny proposa un bon commencement. « J’ai trouvé un olympien dans la forêt, il était blessé et je l’ai ramené. Et toi tu fais quoi ici ? Tu vis ici ? » Et si depuis tout ce temps, ils avaient vécu l’un à côté de l’autre, sans jamais se croiser. Une idée aussi dramatique que ironique, qui donnerait au plus âgé autant envie de rire que de pleurer. Après avoir cherché pendant toutes ses années sans jamais rencontrer la moindre piste, il la retrouvait finalement en parfaite santé complétement par hasard, et même si l’idée l’énervait un peu, il était tout de même heureux de pouvoir la tenir de nouveau dans ses bras.

Savoir que sa cadette vivait effectivement entre ses murs le rassurait encore plus, persuadé que de tous les groupe Olympia restait le plus confortable et surtout le moins hostile. Bien sûr, il aimerait pouvoir la garder à ses côtés pour toujours, mais inutile de précipiter les choses. La savoir en sécurité et en bonne santé lui suffisait largement pour l’instant, peu importe le groupe et les conflits qui pouvaient exister entre les communautés. « Tu es là depuis quand ? » Même si la réponse ne changera rien, la question le démangeait indéniablement, bien que quelque part, elle l’effrayait un peu. En effet, s’il venait à apprendre que depuis tout ce temps elle se trouvait juste sous ses yeux, il s’en voudrait éternellement.

+ Encore incapable de réaliser que sa petite soeur se trouvait encore parmi les vivants, Nino continuait de la serrer contre lui, comme pour s’assurer une fois de plus qu’il pouvait sentir son coeur tambouriner sa cage thoracique. Toute aussi chamboulée que lui, Lenny n’en menait pas large et s’accrochait à lui tout aussi fermement qu’une moule accroché à son rocher, sûrement par peur de le voir disparaître à la fin de cette étreinte. Après des années passées loin de l’autre, ils avaient tous deux fini par faire le deuil, ou du moins acceptés l’idée de ne jamais se revoir et même s’il était heureux du contraire, il ne pouvait cesser d’accuser un peu le coup. « Moi aussi... » En effet, après avoir passé plus de quatre années à arpenter les terres arides du texas, à la recherche de la moindre brunette de son âge, Nino finalement baissé les bras et ainsi commis ce qui ressemblait à la pire erreur de sa vie. En décidant de lâcher l’affaire, il avait peut-être manqué de peu l’arrivée de sa petite soeur dans le secteur ou peut-être même bien pire, complètement loupé ce qui se cachait sous son nez. Une idée qui lui briserait indéniablement le coeur, persuadé qu’il aurait dû être là pour elle. Car même si la brune semblait en bonne santé et parfaitement en sécurité entre ces murs, Nino ne doutait pas un instant que sa route fut tout aussi sinueuse que la sienne et que derrière ce sourire lumineux, se trouvait bien des maux. Néanmoins, malgré la culpabilité, il refusait fermement de gâcher leurs retrouvailles et accepta un instant de prendre un peu de recul sur la situation.

Maintenant qu’il pouvait la contempler de tout son long, Nino s’attardait sur des détails stupide, à commencer par sa carrure plus imposante que celle qui lui connaissait. Un changement peu surprenant dans ce nouveau monde, qui quelque part le rassurait un peu. Même si elle restait pour toujours sa petite soeur adorée qui courrait en couche culotte dans le couloir, Nino restait satisfait de voir qu’elle pouvait se débrouiller seule pour survivre. Jamais il n’avait douté de sa force d’esprit et à en voir les regards que lui portaient certains passants, il n’était visiblement pas le seul à s’inquiéter pour elle. En effet, en la voyant en pleine conversation avec un inconnu, plusieurs habitants ralentissaient le pas, comme pour s’assurer que tout allait bien pour elle. Un comportement qui prouvait encore une fois son lien à cette communauté, dans laquelle elle semblait parfaitement à sa place. Inquiète pour l’homme qu’il avait ramené, Lenny détacha un instant son regard de lui, afin de s’assurer par la fenêtre que tout allait bien. Une réaction qui fit vaguement sourire le plus âgé, heureux de voir que sa soeur n’avait rien perdu de sa gentillesse. « Je crois oui ? Du moins, il est vivant. » Même s’il n’avait pas la moindre idée du réel état de santé de l’homme, Nino le savait au moins encore vivant, ce qui dans ce monde faisait toute la différence.

Une fois certaine que son camarade respirait encore, la brune reposa automatiquement ses yeux sombres sur l'éclaireur qui n’avait pas bougé d’un iota. Tout aussi curieuse que lui, la plus jeune ne tarda pas à lui renvoyer sa question, sûrement désireuse de savoir avec qui et où il passait son existence. Malgré les tensions actuelles entre Olympia et son groupe, Nino n’hésita pas une seule seconde avant de répondre à la question, bien décidé à rassurer lui aussi un peu sa soeur. « A la mine. » Face à la réaction de la brune, Nino compris que cette dernière connaissait effectivement l’endroit, ce qui une fois de plus, confirmait l’idée qu’elle se trouvait depuis suffisamment longtemps dans le coin pour connaître les environs. D’ailleurs, après plusieurs minutes de suspens, la fatidique réponse tomba, laissant ainsi un verdict sans appel. « Sept ans… » Le souffle un peu court, Nino resta un instant silencieux, avant de finalement serrer un peu plus fort la main de la plus jeune qui ne réalisait sûrement pas encore l’ironie de la situation. « Ca fait six ans qu’on vit à côté sans jamais s’être croisés... » Tel la lune et le soleil, les deux enfants weaver s’étaient toujours loupés de peu, jouant finalement sans le savoir au chat et à la souris.

Puis comme la situation n’était pas encore assez risible, Lenny annonça au même moment être elle-même retournée à Aspen. Une fois de plus, ils s’étaient ratés et maintenant qu’il y pensait, il se maudissait de ne pas avoir attendu un peu plus longtemps dans la vallée, afin peut-être de lui épargner la vision d’horreur qu’elle avait trouvé en poussant la porte de l’appartement de son frère. En effet, dans la précipitation, Nino n’avait malheureusement pas pu enterrer le corp calciné de sa mère, qui aujourd’hui encore devait reposer sur la table du salon. Un souvenir encore douloureux pour le jeune homme, qui malgré la volonté de se montrer le plus honnête possible avec sa soeur, se retrouvait bien incapable de revenir sur cette période de sa vie. Trop honteux de parler du meutre de sa mère, Nino baissa un peu les yeux, contemplant impuissant ses chaussures abîmées, avant de finalement reposer son regard dans celui de sa soeur. « De… de mauvaises choses, mais ça peut attendre je pense ? Parle-moi de toi ? Tu vis seule ? Tu as quelqu’un ? Des enfants ? » Un jour, il reviendra sur ce passage, mais inutile de se précipiter et rendre ce moment plus triste qu’il ne devrait l’être. Une esquive qui sans surprise, ne sembla pas ravir la plus jeune et ce malgré sa volonté évidente de ne pas le brusquer non plus. « Tu m’as tellement manqué Lenny… Je me sens tellement nul de ne pas t’avoir retrouvé... » Même s’il était heureux de la retrouver, Nino ne pouvait s’empêcher de se sentir ridicule, persuadé d’avoir échoué dans son rôle de frère et de ne finalement pas mérité ce moment.

+ Main dans la main, les frères et soeurs Weaver ne cessaient de se scruter, à la recherche de la moindre information perceptible sur l’autre. Rattraper le temps perdu ne sera certainement pas tâche facile et si pour le moment l’heure était aux joies des retrouvailles, les regrets eux ne tardèrent pas à pointer le bout de leurs nez. Tout comme lui, Lenny accusait un peu le coup, forcée de constater ses erreurs et surtout réaliser à quel point elle était passé à côté de l’essentiel. Cependant, malgré l’amertume évidente, la brune s’efforçait de diluer l’information avec un brin d’humour, sûrement pour essayer de rendre la situation moins dramatique. Durant six ans, ils s’étaient inlassablement ratés, comme coincés dans une sorte de boucle maudite et maintenant qu’ils en sortaient, Nino éprouvait certaines difficulté à sourire sincèrement. Néanmoins, afin de ne pas inquiéter sa soeur, il lui adressa un petit sourire triste, avant de venir la recoiffer rapidement. « La prochaine fois, tu devrais te cacher dans le placard, ça sera moins dur ? » Même si elle ressemblait en tous points à la petite soeur qu’il avait perdu, il savait pertinemment que cette dernière avait changé avec le temps et que comme lui, elle était devenue une nouvelle personne. En quelques secondes, il ne pouvait pas encore mettre le doigt sur les changements opérés chez sa cadette, mais il se doutait bien qu’ils finiront par lui sauter au visage. « Ok, moi non plus. » Sans familles et amours, ils restaient des âmes encore plus ou moins solitaires et même s’il aurait été heureux d’apprendre que sa soeur vivait désormais paisiblement avec une famille heureuse, il était tout de même ravi de ne pas avoir manqué trop d’étape dans la vie de cette dernière.

Emplie de geste affectueux, les deux bruns restaient plantés sur le perron de l’infirmerie, perdus entre un sentiment de joie indéniable et une amertume sincère. Alors qu’il s’excusait déjà de ne pas l’avoir retrouvé plus rapidement, la brune ne tarda pas à surenchérir, se sentant visiblement tout aussi coupable que lui. Même si continuer les recherches aurait peut-être effectivement mené les deux âmes à se retrouver plus tôt, Nino ne pouvait absolument pas lui reprocher d’avoir baissé les bras après ce qu’elle avait traversé. Trouver le corps calciné de sa mère n’avait pas dû la rassurer sur la destiné des autres membres de sa famille et comme n’importe quel être humain, la brune avait fini par résigner et arrêter de croire bêtement en l’impossible. Une faille qui s’expliquait assez facilement et même s’il aurait préféré qu’elle continue à y croire, il ne lui en tenait pas rigueur. « Tu pouvais pas savoir que j’étais là… C’est pas grave. » Malgré la culpabilité évidente, les deux frères et soeurs semblaient bien décidé à ne pas laisser le négatif l’emporter sur ce moment finalement heureux, si bien que rapidement, la jeune se dépêcha de changer un peu le sujet.

L’invitation à dormir ne tombait pas vraiment à pic vis-à-vis de son programme de la journée, mais comme il n’avait pas la moindre envie de la quitter aussi rapidement, il accepta sans rechigner. En rentrant, il s’excusera auprès de ceux qui l’attendaient à la mine et surtout, s’activera à combler d’amour sa petite boule de poils. « Je… Ok, mais je pourrais pas trainer trop longtemps demain maintenant. Sinon Joey va s’inquiéter ? » Joey appartenait depuis toujours à leur vie et même s’il n’était pas à proprement parler un membre de la famille, il ne doutait pas un instant qu’ils seront l’un comme l’autre ravis de se savoir mutuellement en vie. « Il sera content de te savoir en vie tu sais ? » Tout comme lui, Joey avait parcouru toute ce chemin pour la retrouver et même si elle n’était pas sa soeur, il avait lui aussi espéré la retrouver à chaque détour de route. Malheureusement, avec le temps, Joey avait fini par perdre espoir et lorsqu’ils s’étaient installé à la mine, il avait plus ou moins arrêté d’évoquer son prénom, sûrement par peur de raviver la peine de l’éclaireur.

+ Rattraper le temps perdu n’allait pas se faire en quelques heures, mais il fallait bien commencer par quelque part. Un bilan de leur situation amoureuse et familiale s’imposait d’office, attestant au passage que chez les Weaver, la famille avait toujours été un élément primordial. Et même si dans ce monde l’idée de fonder une famille semblait dérisoire et plus que compromise, Nino espérait tout de même pouvoir un jour y avoir le droit, sans pour autant se précipiter. « Des jolies filles peut-être, mais pas de mini-Nino. Par contre j’ai un chiot, c’est pareil ? » Poutine ne possédait peut-être pas de jambes et de bras, mais cela ne le rendait pas moins important aux yeux du brun qui le comptait désormais comme une réel membre de sa famille. D’ailleurs, après avoir perdu ses parents et plus ou moins sa soeur, Nino avait dû remodeler ce terme et ainsi composer sa propre famille avec ceux qui l’entourait, comme Joey par exemple. Les liens qui unissaient les hommes aujourd’hui pouvaient parfois être bien plus solide que ceux du sang et même s’il aimerait retrouver ses parents, Nino se voyait assez heureux de ce qu’il possédait, encore plus maintenant qu’il pouvait de nouveau serrer sa petite soeur dans ses bras.

Tout Lenny, l’éclaireur se sentait stupide d’avoir rater pendant tout ce temps un détail si important. L’ironie de la situation n’amusait encore personne et face à l'amertume de sa soeur, il ne pouvait que se sentir encore plus bête. « Je me sens encore plus stupide que toi je pense. » En effet, en tant que éclaireur de la mine, il aurait espéré un peu mieux de son intuition et de sa chance. Malheureusement pour eux, il fallait croire que leur vie s’apparentait plus à la machine infernale qu’au monde des petits poneys. Néanmoins, malgré la colère, l’amertume et la tristesse, ils devaient l’un comme l’autre aller de l’avant et profiter au maximum du moment présent. Passer la soirée avec sa soeur semblait être le minimum syndical et alors qu’elle commençait à s’inquiéter face à son manque d’enthousiasme, il préféra être honnête. « C’est surtout qu’on m’attend, mais je peux rester cette nuit. La prochaine fois, je ferais en sorte de rester plus longtemps promis. » Même s’il était heureux de retrouver sa soeur, il ne pouvait pas tourner le dos à la mine qui depuis le temps comptait réellement sur lui. Demain matin, il retourna chez lui et racontera ce moment à ses proches, avant d’organiser sa prochaine visite à Olympia et ainsi profiter réellement de sa présence.

En attendant, les weaver devaient se contenter d’une soirée et d’une nuit ensemble, ce qui après des années sans se voir representait déjà beaucoup. L’un comme l’autre se montrait ouvert à la conversation, du moins pour parler du positif, ce qui pour le moment lui suffisait largement. En attendant le nom de Joey, la plus jeune adressa un sourire sincère, visiblement ravie de savoir qu’un autre élément de sa vie passée se tenait encore debout chez les vivants. « Oui, depuis Aspen. Il te cherchait aussi tu sais, ça nous donnait un but. » Depuis, son ami avait perdu espoir et même s’il ne lui en voulait pas le moins du monde, il comptait bien lui rappeler son erreur à son retour. Si Nino apportait de bonnes nouvelles, il en était autant de sa soeur, qui visiblement n’était pas arrivée seule à destination. « Elvis et Milan, je vois. C’est super que tu sois pas seule non plus. » L’un comme l’autre pouvait encore compter sur de vieille connaissances, un atout non négligeable dont peu de survivants profitaient. Néanmoins, en l’entendant parler, il avait rapidement compris qu’elle aussi avait rencontré son lot de pertes, si bien qu’il préféra ne pas insister trop longuement.

Excitée à l’idée de le retrouver pour de bon, Lenny enchaînait les questions et les propositions, sans même lui laisser le temps de répondre, ce qui l’amusait d’ailleurs beaucoup. Malgré les années, elle restait toujours aussi énergique et pétillante, un détail qui ne manquait pas de le rassurer. « Oui, on a tout le temps maintenant. » Alors qu’elle était déjà en train de l’inviter pour le repas et lui demander ce qu’il voulait dîner, Nino lui attrapa doucement la main, avant de descendre les marches du perron de l’infirmerie. « Comme tu veux ? Mais j’avoue je serais pas contre un truc chaud. » Manger un plat cuisiner et chaud serait un véritable don du ciel avant de reprendre la route demain matin, surtout s’il était préparé par sa brune préférée. Après quelques minutes de marches, ils arrivèrent finalement aux abords d’une maison, vers laquelle Lenny approchait. Étonné face à la bâtisse qui comparé à son compartiment dans la mine ressemblait à un palace, Nino se stoppa. « C’est ta maison ? » En plus d’être en sécurité, sa sœur profitait d’un confort évident qu’il n’aurait finalement pas pu lui offrir. Soudainement, l’éclaireur se demanda s’il était réellement à la hauteur de sa nouvelle vie et surtout si c’était une bonne chose qu’il réapparaisse dans cette dernière. Un doute qui faisait naître en lui des idées noires et avant de se voir plongé dans un questionnement ultime, le brun poussa un long soupire pour se reprendre, avant de suivre sa sœur jusqu’à la porte d’entrée.  

+ Dès qu’il aborda le sujet du chiot, Lenny se mit à rire, sûrement attendri par cet acte qui lui ressemblait bien. Enfant déjà, le montagnard adorait ramener des animaux à la maison pour leur offrir un peu d’amour, ce qui ne plaisait pas toujours à ses parents d’ailleurs -après tout, voir débarquer des chiens errants dans le hall du gîte n’était pas forcément bon pour les affaires. « Je l’ai trouvé dans un restaurant abandonné. Il s’appelle Poutine. » A défaut d’avoir fondé une famille ou retrouvé sa petite soeur, Nino avait au détour d’une sortie sauvage, adopté un adorable compagnon de route. Enfin, de route restait un très grand mot étant donné qu’avec sa petite taille il ne risquait pas de parcourir beaucoup de kilomètres dans un milieu aussi hostile. Par peur de le perdre, l’éclaireur doutait d’un jour réellement apporter son chien en mission, d’autant plus sous cette chaleur étouffante. Néanmoins, rien qu’une fois, il fera peut-être l’effort de l’amener jusqu’à Olympia pour le présenter à sa soeur, mais aussi pour qu’il profite de cette espace bien plus confortable que la mine pour jouer. « Je vais essayer, il sera content de voir une nouvelle tête. » Même s’il trouvait toujours aisément un compagnon de jeu à la mine, cela ne pourrait pas lui faire de mal de rencontrer de nouvelles personnes pour jouer.

Cependant, avant de revenir à la Olympia, Nino comptait bien profiter de son séjour, aussi bref soit-il. En rentrant, il se contentera d’expliquer les raisons de son absence, qui seront sans aucun doute plus qu’appréciées par ses semblables. « Non t’en fais pas, ils diront rien pour une nuit. » Retrouver de la famille en vie n’arrivait pas tous les jours, n’importe qui pouvait comprendre son désir de rester un peu plus longtemps ici, malgré les tensions qui pouvaient subsister entre leurs groupes. De toute manière, dans le cas contraire, Nino savait qu’il pouvait compter sur Joey pour le couvrir le temps de son absence et ainsi éviter les embrouilles ou rumeurs inutiles. Cette amitié, aussi veille soit-elle continuait de le faire avancer et même si pour le moment ils vivaient en sécurité, l’éclaireur savait qu’ensemble ils étaient plus forts et que si tout venait à disparaître, ils repartiraient ensemble sur les routes américaines. Un ensemble qui allait d’ailleurs s’agrandir d’une nouvelle personne et pas de moindre ; Lenny, la soeur disparue et tant cherchée. « Oui, on est allé dans ton appartement et tout. » Pendant longtemps, la brune avait été leur seule et unique raison d’avancer dans ce monde, et même si au bout d’un moment ils avaient cessé de naviguer à travers tous l’état, ils continuaient quelques part d’y croire.

La nouvelle fera sans aucun doute plaisir à son ami d’enfance, et même s’il ne pouvait rien promettre, Nino était presque certain que ce dernier ne tardera pas à pointer le bout de son nez à Olympia pour revoir le joli minois de la plus jeune. « Il sera content, il viendra sûrement te voir aussi. » Cependant, bien qu’il aurait été ravi de pouvoir partager ce moment avec l’autre montagnard, le brun appréciait tout autant pouvoir disposer d’un petit moment rien qu’à eux pour converser et essayer de retrouver ce lien qu’ils possédaient auparavant. Partager un repas restait sans aucun doute la meilleure des idées pour se redécouvrir l’un et l’autre. « Le meilleur ? Rien que ça ? » Loin d’être difficile en nourriture, Nino acceptait volontier n’importe qu’elle plat qu’elle pourrait lui faire, déjà trop heureux de pouvoir de pouvoir à nouveau dîner avec elle.

La maison dans laquelle vivait sa soeur disposait d’un confort indéniable qui en plus de le rassurer, lui donnait presque envie de s’installer à son tour. Malheureusement pour l’éclaireur, il aimait bien trop son groupe pour leur faire faux bond. « Non j’avoue, c’est vraiment pas mal, tu dois être bien ici. » Curieux et surtout peu habitué à ce genre d’environnement, Nino promenait son regard un peu partout, comme un enfant qui visitait sa nouvelle maison. Pendant qu’il jouait les touristes, Lenny s’activait déjà en cuisine, visiblement pressée de pouvoir passer au plat principal. « Besoin d’aide ? » Peu enclin à la laisser tout faire, Nino déposa son sac à dos sur le parquet de la maison et se dirigea vers l’évier de la cuisine pour se laver les mains. Une fois prêt, il attrapa les différents ingrédients demandé par sa soeur, afin de concocter un repas de retrouvailles. Durant le repas, les deux Weavers s'autorisent quelques confessions, principalement centrées sur leurs groupes et le rôle qu’ils y occupaient, histoire de mieux cerner le présent de chacun. Néanmoins, malgré l’envie mutuelle de connaître le passé de l’autre, ils omettaient l’un et l’autre d’aborder trop longtemps le passé, sûrement pour ne pas venir ternir ce joli tableau.