asher fran
«ils ne me veulent pas du bien»
La pluie roulait, coulait le long de ses bottes, éclaboussant la terre boueuse à chacune de ses foulées.
« Saloperie ! » Elle avait hurlé comme la première des pucelles effarouchées, ce qui ne lui ressemblait pas en temps normal – en tout cas, elle ne voulait pas admettre pouvoir être effrayée comme la petite fille qu’elle avait été à une époque lointaine. Un coup de batte bien placé dans la tête du walker et le cadavre s’effondrea en même temps qu’une giclée de sang poisseux et noirâtre vint consteller son visage et son tee-shirt. Putain de zombies de merde. Dégueulasses, infâmes, immondes choses. Aussitôt Fran s’essuya grossièrement les joues avec ses mains mouillées et pesta contre la substance crasse. La météo quasiment nocturne l’aidait au moins à pouvoir effacer ses traces et celles des corps décédés qu’elle enjamba sans trop traîner.
Dernière fois qu’elle pillait cet endroit de mort. Rien que l’odeur aurait du la renseigner sur l’aspect glauque du lieu. Surprise par la foultitude de morts-vivants qu’elle avait du affronter pour parvenir à s’échapper à travers fourrés et sentiers en pointillés, Fran renifla alors qu’elle remettait son butin un peu plus haut contre son épaule. Le poids lourd de sa récompense lui mit un peu de baume au cœur ; au moins elle ne revenait pas les mains vides, même si elle était dans un état qui en disait long. Son pied écrasa une branche, grésillement du bois qu’elle n’entendit pas, trop absorbée par la surveillance des alentours. Dur labeur nécessaire pour la commerçante et mécano, qui ne pouvait évidemment pas compter sur des miracles du ciel pour obtenir un arrivage décent avec lequel elle pourrait continuer à vivre au Ranch.
Son dos sursauta lorsqu’une ombre imprévue se sépara de la végétation pour lui faire face. Le sac de sport glissa dans la foulée, son ouverture s’écartant pour vomir l’aperçu de quelques objets trouvés et volés. Obstacle sur la route aux épaules plutôt larges, d’environ un bon mètre quatre vingt centimètres minimum aux bras plus épais que ces vieux troncs noueux qui les cernaient, et dont les yeux de glace l’observaient elle et sa pitance avec un air de prédateur pas encore complètement décidé. Un adversaire ou simplement un pauvre hère ? Rien qui ne valait qu’elle baissa sa garde si rapidement.
« Bordel. » souffla sous le coup de la surprise avant de dévoiler ses dents dans l’esquisse d’un sourire sarcastique.
« Nan, moi c’est la Belle au Bois dormant et j’viens justement de sortir de ma sieste. » Elle éluda sans détour ses cris apeurés, pas spécialement motivée à passer pour la poule mouillée qu’elle n’était clairement pas. C’était juste ce temps orageux qui rendait tout plus stressant, plus
flippant. Une sensation pas désagréable et électrique qui poussait à l’urgence, à l’adrénaline.
L’homme ne s’embarrassa d’aucune formalité et jaugea le sac à terre. De plaisantin, Fran passa à légèrement agressive. Pas question de se faire dérober
son dû par un inconnu même s’il n’était pas encore venu à l’offensive. Elle avança une botte farouche devant elle pour ramener à elle le sac et chasser la main baladeuse qui aurait pu traîner un peu trop longtemps.
« Plutôt ouais. Mais on touche avec les yeux, merci. » Il était loin le doux visage de la princesse qu’il avait entendu hurler précédemment. A la voir, elle prenait plutôt des allures d’Amazone que d’héroïne de contes pour enfants. Ce n’était ni les tâches résiduelles d’hémoglobine sur sa batte, ni son air revêche qui disaient le contraire.
« Qu’est-ce que tu veux ? » Partager peut-être ? Ca sûrement pas. Francesca n’était pas Robin des Bois.