intrigue générale (15/02) - consideration

♔ Malini & Iris

Considération

La maladie qui secouait le Texas faisait travailler d’arrache-pied infirmières et médecins. Les patients se bousculaient à leur porte, parfois pour presque rien, un rhume, une toux passagères – mais il valait mieux prévenir que guérir – et d’autre fois pour des cas plus grave. La grippe. Un mal dont ils n’avaient pas besoin, une nouvelle épreuve de la nature. La sélection naturelle semblait frapper, fort, remettre un peu d’ordre dans une humanité qui avait sans doute trop déconné auparavant. Mais ils avaient déjà bien assez payé, survivre sur ces terres rongées par la mort n’était pas simple, pourquoi les accabler encore plus ? Iris soupira légèrement. Il y avait plus de cavaliers que n’importe qui d’autre (hormis les Olympiens, mais l’inverse aurait été inquiétant), et – en règle générale – cela ne la dérangeait pas. Elle était tolérante, indulgente, savait passer outre l’apparente absence de civilités des cavaliers du moment qu’ils l’écoutaient (qu’ils écoutaient l’infirmière) et ne mettait pas tout le monde inutilement en danger ou qu’ils ne dispersaient pas leurs microbes partout. Si elle avait eu le cœur à rire, elle aurait presque pu faire une petite comparaison entre leurs hôtes et des gueux. Mais ce n’était pas le moment.

Pourtant, aujourd’hui, si elle continuait à s’occuper normalement de ses patients, elle évitait avec application de s’approcher trop près de Malini. Pas qu’elle ne l’appréciait pas, au contraire, et c’était même ça le problème. Elle n’avait pas grand-chose à reprocher à la jeune femme, si ce n’était, peut-être, d’avoir eu la chance de se rapprocher de Bass comme elle n’aurait jamais la chance de s’en rapprocher. Elle avait aperçu, pas grand-chose, un geste tendre peut-être, l’échange d’un regard… Mais cela avait été suffisant pour faire comprendre à Iris que Malini ne faisaient pas partie de celles qui auraient droit à un « merci, bisous, salut », et sans qu’elle ne le veuille vraiment, son cœur semblait s’écraser au fond de sa poitrine. Alors, pour ne pas montrer sa blessure, peut-être, elle évitait Malini. Ce n’était pas à la jeune femme qu’elle en voulait, au fond, mais à Bass. Bass qui avait mangé le respect tout cru au point non seulement de la renvoyer de la pire des manières qui soit mais, en plus, de ne pas lui avoir dit qu’il… avait quelqu’un. Peut-être tout cela n’était-il pas officiel, peut-être n’y avait-il rien encore, mais elle avait bien compris qu’elle avait continué à espérer quelque chose, pour rien. Et si elle avait réussi à passer outre ce qu’il s’était passé quelques mois plus tôt, tout venait de remonter à la surface.

Iris sursauta légèrement lorsqu’elle entendit les paroles de Malini, adressée à elle. L’infirmière avait tout fait pour éviter une confrontation avec la jeune femme. Pas d’échange de regard, de sourires, de paroles, rien. Ses efforts pour faire comme si tout allait bien venaient d’être détruit par cette intervention qu’elle ne pouvait décemment pas ignorer, une fois de plus. Prenant sur elle pour ne pas paraître aigrie ou quoi que ce soit, elle releva enfin le visage vers l’indienne avec un léger sourire, avant de lancer un regard à Silas, réfléchissant quelques instants. « C’est vrai que son état s’est nettement amélioré. D’ici deux, trois jours, il devrait être remis sur pied. » Désirer leur départ prompt et rapide n’allait pas de pair avec son travaille d’infirmière. Et puis, cela ne changerait rien aux sentiments que Bass avait (ou n’avait pas) à son égard, alors elle reprit : « Mais il serait tout de même plus prudent d’attendre une petite semaine avant de reprendre la route avec lui, je pense. Il a besoin de repos pour ne pas risquer de retomber malade. »

♔ Malini & Iris

Considération

Il était quasiment évident que Malini allait remarquer qu’Iris n’était pas comme d’habitude. Qu’il y avait un problème quelque part, qu’elle avait un problème avec elle, si elle ne parvenait pas à reprendre contenance et à passer outre ces pensées indésirables qui fusaient dans son esprit. Calme-toi, Iris. Ça ne vaut pas la peine de s’énerver pour ça, ou de le ressasser sans cesse : elle était pourtant bien plus douée à ça qu’elle ne voulait se l’avouer. Ressasser. Repenser, encore et encore, parfois même s’attarder sur des détails que les autres personnes concernées avaient – généralement – déjà oublié. Elle grimaça légèrement aux paroles de Malini, avant d’hausser légèrement une épaule : « Oh, je n’ai rien contre le Riders, ils restent des êtres humains comme nous, et s’ils ont besoin d’un peu d’aide, je ne vois pas pourquoi on la leur refuserait, tant qu’il n’y a pas de problèmes. » Elle était sincère, évidemment. Pour elle, peu importe que ses patients soient des cavaliers ou des olympiens : seul les Jackals la ferait un peu grincer des dents, mais…

Les relations entre les deux camps n’étaient cependant pas au beau fixe, en ce moment, et les tensions étaient de plus en plus palpables. Ils étaient plusieurs, encore certainement les plus naïf, à ne pas être tendu en présence de leurs sauveurs / occupants selon la personne à qui vous le demandez. La question de Malini la met d’ailleurs légèrement plus mal à l’aise : parce qu’elle n’en savait fichtrement rien. Elle n’était plus sûr que tout se passe aussi bien qu’avant, maintenant qu’ils avaient subi les pires affronts en se pensant invulnérable entre leurs murs. Cette épreuves, et celles qui suivraient, avaient changé la mentalité de plusieurs de ses compagnons, évidemment. Et Malini, comme Silas, étaient des otages de choix si soulèvement des Olymiens il y avait. « Honnêtement, je ne sais pas. J’ai envie de croire que non, et je pense que pour le moment la situation est assez stable, mais… » elle eut un sourire désolé « Il paraît que je suis un peu trop naïve. Cependant, je ne m’inquiète pas, pour le moment. »

Elle haussa une épaule, décidée à reprendre ses activités, mais Malini ne lui en laissa pas le temps. Alors qu’elle allait se détourner, la jeune femme se lance, de but en blanc. Ne pas tourner autour du pot pouvait être une qualité. Pouvait. Iris serra légèrement les dents, parce qu’elle avait voulu éviter cette confrontation, la recruteuse du ranch n’y étant après tout pour rien. « Tu n’as rien fait, ce n’est pas toi, je t’assure. » Le ton de l’infirmière avait été un peu sec, et elle s’en voulu. Elle s’en voulait, parce qu’elle n’aimait pas réagir comme ça, avoir les nerfs à fleur de peau et les mêmes réactions (ou presque les mêmes) qu’elle avait pu avoir au lycée lorsqu’il y avait des histoires de garçons. Elle était adulte, merde, et même si elle avait été blessée, elle devait passer outre. « C’est Bass… Mais, c’est rien. » Elle se força à sourire, avec l’impression d’être ridicule. Elle pensait avoir dépassé tout ça, mais se rendre compte de la complicité qui unissait les deux recruteurs avait rouvert la vieille blessure de la manière dont Bass l’avait rejeté. Et ça faisait mal plus qu’elle ne l’aurait pensé.

♔ Malini & Iris

Considération

Elle sait qu’un moment, ça va forcément péter, mais elle prie pour que tout se passe bien. La rancœur et la lassitude pouvaient pousser les Olympiens à faire un pas de travers, mais les habitants du ranch ayant pris leur quartier à Olympia pour plus ou moins longtemps n’étaient pas des anges non plus. Personne n’était à l’abri d’une erreur, et la moindre étincelle pouvait provoquer un feu de forêt : elle en avait conscience. Iris était-elle réellement naïve, parce qu’elle pensait, espérait, voulait que tout se passe bien ? C’était certainement à débattre, car elle n’était pas inconsciente. Mais elle savait que cela ne ferait que repousser le véritable but de leur discussion, à savoir… Pourquoi l’infirmière semblait-elle soudainement distante, pourquoi cet air aigri, presque rancunier ? Et Iris souhaitait éviter cette confrontation, le plus possible. Parce qu’elle se trouvait ridicule de ressentir tout cela à nouveau, soudainement. Parce qu’elle trouvait ses réactions idiotes. Parce qu’elle ne parvenait pas à faire le vide dans son esprit, à ranger tout ça dans des boîtes, à passer à autre chose. Elle avait cru avancer, faire son deuil après la réaction du grand gaillard à son baiser, et pourtant elle en était encore là, perdue, en colère, peinée, emprisonnée dans un mélange de sentiments qui lui retournait le cerveau et dont elle voulait désespérément se débarrasser. Elle n’avait finalement fait que fermer les yeux sur le problème pour l’oublier, plutôt que de le traiter.

« Non ! » Elle s’était défendue un peu trop vivement pour que cela soit réellement crédible. Elle n’était pas amoureuse de lui, n’est-ce pas ? Elle l’aimait… Pas comme ça. Sachant qu’elle n’aurait sans doute jamais sa chance avec lui, elle ne voulait pas mettre des mots sur ce qui faisait battre son cœur d’un léger stresse, froncer ses sourcils d’agacements. Traiter le mal par le mal n’était pas toujours la meilleure des solutions. Iris n’est pas la seule retournée par leur discussion, apparemment, car le choc de la réalisation fait reculer Malini – pourtant, elle continuera de nier. Elle ne peut pas l’avouer, ni à elle-même, et surtout pas à la jeune femme face à elle. Iris a eu le temps d’observer Bass, lorsqu’ils passaient du temps ensemble, lorsqu’il avait été cloué à l’infirmerie. Elle savait ce qu’elle avait vu, et l’affirmation de Malini ne pouvait pas la rassurer ; peut-être n’étaient-ils qu’amis pour la jeune femme, mais la tendresse qu’elle avait vu dans le regard de Bass était plus que de l’amitié. « Ce n’est pas grave. » Elle était un peu amère, mais ne voulait pas le laisser paraître. Toutes ses émotions la prenaient à la gorge et elle se concentra pour parvenir à articuler : « Ce n’est pas à moi de choisir quoi que ce soit pour lui. Et si vous êtes… Amis, tant mieux, mais ça n’a pas l’air de… » Elle se coupa au milieu de sa phrase, trouvant malvenu d’énoncer quoi que ce soit alors qu’elle-même n’osait regarder ses sentiments en face. « Disons que ça ne s’est pas très bien passé. Ce n’est pas de ta faute, et je suis désolée que ça te retombe dessus, ça devrait rester entre lui et moi. » Elle ne voulait pas en parler, elle voulait oublier, elle voulait s’échapper sans un regard en arrière, s’enfermer, et ne ressortir que lorsque Malini ne serait plus là. Pourtant, elle ne fit rien, et devrait composer avec tout ça, ne quittant pas la recruteuse du regard en essayant de s’adoucir un peu.

♔ Malini & Iris

Considération

Quoi qu’elle dise, il semblait à Iris qu’elle s’enfonçait un peu plus, inexorablement. Qu’elle dévalait une descente beaucoup trop pentue, beaucoup vite, et que l’arrivée en bas allait être fracassante. Qu’elle glissait vers quelque recoin sombre qui n’arrangeraient rien à la situation : bref, qu’elle n’allait pas s’en sortir comme ça, en tournant le dos, en refoulant ses émotions, en jouant à l’autruche comme elle avait l’habitude de le faire. Parce que sa vis-à-vis était plus perspicace que Lucas, à moins que son frère ait juste la gentillesse de ne pas trop la pousser à se livrer lorsqu’elle n’en avait vraisemblablement pas envie, mais elle avait toujours fait passer le bien des autres (et en particulier celui de ses proches) avant le sien, et cela n’allait pas cesser de si tôt. Pourtant, aujourd’hui, elle était face au mur, elle se le prenait de plein fouet. Acculée, obligée de parler avec Malini, précisément la personne avec laquelle elle aurait préféré éviter le sujet, à jamais. La vie était faite de surprises qui n’étaient pas toutes bonnes. Malheureusement. Il lui semblait pourtant avoir attiré l’attention de la recruteuse – dans le bon sens du terme. Etonnamment, celle-ci ne semblait pas se moquer, mais curieuse, intéressé, et cela intimida presque l’infirmière. Elle n’avait pourtant pas fait grand-chose pour, elle aurait presque préféré que Malini lui crache dessus, peut-être cela l’aurait-il débloqué, agacé, peut-être aurait-elle pu s’énerver à son tour et décharger toute cette tension… Mais peut-être était-ce mieux ainsi : elle n’était pas violente, elle était même anti-violence. Elle avait peut-être juste besoin de souffler un peu.

Et pourtant, la jeune femme en face d’elle avait raison, et le fait qu’elle ait « envie » de l’écouter tendait à prouver ce qu’Iris avait cru surprendre. Avait surpris. L’infirmière pris une grande inspiration, et baissa légèrement les yeux, mais la dernière question de Malini la fit sursauter : « Oh, non ! Il ne m’a pas touché, il ne ferait jamais ça. » D’aucune façon, d’ailleurs, se mit-elle à penser. Mais Bass ne lui ferait pas de mal, elle le savait. Elle secoua légèrement la tête, hésitant un peu à poursuivre. Parler lui ferait certainement du bien, mais en avait-elle envie ? Surtout à sa rivale directe ? Mais Malini était-elle réellement sa rivale alors qu’elle savait le combat perdu d’avance ? Peut-être était-ce, au contraire, un pas de plus vers la délivrance. L’infirmière se mordit distraitement la lèvre, pesant le pour et le contre, avant de se décider. Elle n’allait pas s’épancher, mais parler un peu, pourquoi pas. Si c’était cette femme que Bass désirait, et qu’elle ne le voyait pas, il serait cruel de la laisser aveugle, pour lui. Même si c’est ce qu’elle-même avait vécu. Et même si ça lui crevait le cœur, au fond, ne désirait-on pas le bonheur des personnes que l’on aimait, peu importe la nature de cet amour ? « Il m’a... Repoussé. » Iris plissa un peu les yeux. Dit comme ça, cela lui semblait encore plus ridicule. « Mais il m’a laissé espérer, aussi. Il… Il a juste fui, il m’a fuit pendant plusieurs semaines, avant de revenir, comme avant, comme s’il ne s’était jamais rien passé, comme si tout était redevenu normal. »

Elle haussa une épaule, parce que si elle, elle en avait été blessée, elle ne savait pas vraiment ce qu’on pourrait en dire, d’un point de vue extérieur. Elle avait mal vécu cet abandon alors que, même si un plan strictement amical, Bass était l’une des personnes les plus importantes pour elle. Il l’avait évité, fuit, puis il était revenu, à nouveau protecteur, à nouveau ange gardien… A nouveau grand-frère. Elle aurait peut-être dû voir ça sous cet angle dès le début. Peut-être. « C’est la manière dont il te regarde. Peut-être que tu ne t’en rends pas compte, mais il ne te regarde pas comme il me regarde, comme il regarde Elanor, ou n’importe quelle personne qu’il a pris sous son aile et qu’il s’est mis en tête de protéger. Son regard ne trompe pas… »

♔ Malini & Iris

Considération

Iris n’aurait su dire si parler de tout ça la soulageait ou non. La vérité était qu’il y avait tout de même quelque chose d’assez étrange dans l’idée de se livrer, même partiellement, à Malini. Elles n’étaient, après tout, pas proches. Si elles en étaient venues à s’apprécier, elles n’étaient pas des confidentes l’une pour l’autre, et leur position vis-à-vis d’un même homme, de Bass, pouvait même les mettre en conflit. Mais mettre des mots sur les émotions qui l’envahissaient n’étaient pas spécialement agréable – mais ce n’était pas désagréable non plus. En fait, elle n’aurait su dire quel effet cela avait sur elle. L’infirmière avait trop l’habitude de tout garder pour elle, de soigné sa psyché toute seule avec du temps et de la réflexion, et trop peu celle de se décharger. Elle se sentait mitigée : comme si exprimait ces blessures-là à voix haute leur donnait une réalité tangible, rendait certaines choses qu’elle ne voulait comprendre, faisait ressortir des démons enfouis qu’elle avait mal enfermé. Mais, d’un autre côté, elle en retirait un certain soulagement. Iris n’aurait su dire comment, ni à quel degré, mais c’était comme un poids s’ôtait de ses épaules. Peut-être pour revenir plomber son cœur lorsque cette étrange scène se terminerait et qu’elle aurait tout le temps d’y repenser.

Iris hausse légèrement une épaule à la remarque de Malini sur les hommes. En d’autres circonstances, cela lui aurait peut-être arraché un sourire, mais les deux femmes semblaient aussi mal à l’aise l’une que l’autre. Peut-être auraient-elles dû s’en rendre compte et mettre un terme à cette discussion mais, pourtant, elles continuent. Et lorsque la brune face à elle reprend la paroles, Iris se surprend à avoir un regain d’espoir. Une poignée de seconde, un coup de vent qui passe avant de s’éloigner, elle se dit brièvement que si Malini a quelqu’un dans sa vie, alors il y avait encore une chance que Bass puisse s’intéresser à elle. Mais elle brise rapidement l’illusion ; cela ne veut rien dire. Ce n’est pas parce que Malini en aime (ou en a) un autre que Bass va cesser de la regarder comme il le fait. Elle devrait être bien placé pour le savoir. Un instant, l’idée d’aller mettre Bass au courant lui effleure l’esprit puis, elle s’évapore. Iris n’est pas comme ça. Quand bien même cela pourrait éviter à Bass de tenter des choses inutiles et de souffrir comme Iris avait souffert, ce n’était pas ses affaires. Et elle était bien placé pour savoir que parfois, apprendre ce genre de chose de quelqu’un d’autres, ça faisait bien plus mal.

« Ce n’est pas parce que tu as quelqu’un que ça empêche les autres de… » De t’aime ? De te vouloir ? L’infirmière laisse traîner sa phrase, pas certaine de comment elle voulait la terminer, mais cela ne laisse que peu de place au doute. Malini est intelligente, elle comprendra certaine d’elle-même. Iris détourne vaguement le regard pour le faire glisser sur la pièce, autour d’eux, s’arrêtant sur l’enfant, avant de revenir à la recruteuse. A-t-elle réellement envie de parler de Bass ? Ou plutôt : a-t-elle vraiment le droit d’en parler ? Ne serait-ce pas trahir son ami ? Elle est un peu perdu, et durant quelques seconde, son regard se voile un peu. « Ouais. Deux ou trois. » Grand frère, c’est bien le mot. C’est sans doute ce qu’elle aurait dû se dire, ce qu’elle aurait dû penser, dès le début. « Il est attentif. A l’écoute. Présent. Protecteur, comme un… Grand frère. » Elle retient une légère grimace, et fini par pencher légèrement la tête. « Tu t’intéresses tout de même pas mal à lui. » Pas un reproche, une constatation. A qui mentait-elle en disant qu’il n’y avait rien entre eux deux ?

♔ Malini & Iris

Considération

Si leur discussion s’enfonce, s’envenime, d’une certaine manière, même si aucune colère ne semble sur le point d’exploser, peut-être allaient-elles, toutes les deux, finir par ouvrir les yeux sur la réalité de leur sentiment ou, au moins, de la situation. Elle n’en serait, peut-être, que plus pénible. Le malaise allait peut-être se faire ressentir, plus que maintenant – et il était déjà pourtant bien présent. Elles se font face mais chacune à l’air de ne pas trop savoir comment réagir, naturellement. L’air est lourd, l’ambiance pesante, la tension palpable. Pas qu’elles se détestent, et c’était peut-être ça le pire. C’était peut-être justement parce que les deux jeunes femmes en étaient venues à s’apprécier, avant qu’Iris ne se rende compte de l’attirance de Bass pour Malini, qu’à ce moment précis chacune des deux ne savaient plus trop sur quel pied danser, comment faire face à cette conversation qu’elles tenaient alors que personne ne semblait réellement disposé à la tenir. Les dernières paroles de l’infirmière furent brutales de vérité, mais l’effet qu’elles firent à la recruteuse du ranch n’était pas vraiment l’effet qu’avait prévu. A vrai dire, elle n’avait rien calculé du tout, ce n’était pas dans ses habitudes, trop gentille, apparemment. Elle se sentait presque désolée pour Malini – elle l’était certainement, au fond, malgré tout.

« J’en conviens. » Elle réussit à arracher un léger sourire amusé à Iris, pour quelques secondes. Avant le retour du malaise, comme une spirale infernale, une mite qui grignoterait lentement mais sûrement les liens qu’elles avaient commencé à tisser ou, du moins, l’entente qu’elle observait. Les paroles que lui adressa ensuite Malini la surprirent autant qu’elles la soulagèrent, quelque part. La jeune femme avait raison, sans doute valait-il mieux en rester là pour le moment. Laisser quelques heures, une journée entière peut-être, le temps que tout ça se tasse, qu’elles aient le temps d’y réfléchir, de se poser, d’avancer. Iris ne voulait pas gâcher tout ça, même si elles étaient peut-être loin encore de pouvoir se considérer comme amies, elle ne voulait pas commencer à avoir d’ennemies, ou de rival, surtout pas pour des choses aussi stupides. Elle pouvait prendre sur elle, et elle prit une grande inspiration pour se détendre un peu avant de répondre dans un sourire, plus sincère et détendu que depuis le début de cette conversation, touchée malgré tout.

« Merci, Malini. » elle hésita un instant. Elle ne voulait pas mettre la recruteuse à la porte pour autant, mais peut-être était-ce qu’elles voulaient, toutes les deux. L’infirmière fini par hausser légèrement une épaule pour répondre prudemment : « Ce n’est pas que je ne te veux pas.. ‘‘dans mes pattes’’. Et ne t’inquiètes pas, je… Ca passera. » elle hocha doucement la tête, peut-être pour se convaincre elle-même plus que son vis-à-vis. « Peut-être qu’il serait mieux, en effet, de… Clore cette discussion, pour aujourd’hui. » Elle se retint de se balancer d’un pied sur l’autre, et passa une main dans ses cheveux pour ajouter : « Mais, si jamais tu veux repasser, rester, ou quoi que ce soit... Ne t’en empêche pas. » Iris hocha légèrement la tête pour appuyer ses paroles : elle saurait faire avec. Et après une bonne nuit de sommeil, ça irait mieux, de toute manière. Non ?