Remontage de bretelle (ft. Victoria)

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Les choses semblaient s'être calmées ; les tensions semblaient s'être apaisée, mais la réalité du terrain n'avait pas tardé à rattraper Anita, et on venait lui faire part d'un incident. Douglas avait visiblement eu des problèmes avec certains éléments de la mine qui s'étaient montrés indisciplinés, et lui avait donné quelques noms. Elle avait prit ses responsabilités à coeur, et avait donc fait ce qu'elle avait à faire ; c'est à dire convoquer, discuter et sanctionner les potentiels fauteurs de trouble.

La journée avait donc été pénible, parce qu'elle considérait qu'il s'agissait plus d'une corvée pour un leader que quelque chose de vraiment excitant et intéressant ; mais les choses allaient peut-être le devenir, puisque les différentes auditions qu'elle avait menées faisaient ressortir un nom. Et un nom qui ne lui plaisait pas ; Spellman.

Anita appréciait vraiment la jeune femme ; elle pouvait la qualifier d'amie d'enfance, même si cela ne se voyait pas vraiment. Par les temps qui couraient, avoir ce genre de personne sous la main était rare et elle ne pouvait s'en estimer qu'heureuse ; d'autant plus qu'elle lui évoquait le souvenir de son père, qui était à la base de leur rencontre et de leur lien. Mais si elle devait la rappeler à l'ordre, elle le ferait sans problème ; avant de la juger, elle comptait bien obtenir sa version des faits et c'est pour ça qu'elle l'avait convoqué, malgré l'heure qui commençait à être tardive. Elle n'était pas stressée ; mais elle faisait les milles pas dans la partie de sa chambre qui était son bureau. L'heure approchait, en fait, et elle n'avait pas envie de s'asseoir pour devoir se lever et aller ouvrir la porte ; elle n'était pas du genre immobile à ne rien faire, alors elle tournait en rond, ce qui lui permettait de se dégourdir les jambes après une journée passée assise.

Elle jeta un coup d'oeil à sa montre, et remarqua que l'heure allait passer ; au même moment, des bruits de pas dans le couloir menant à sa chambre lui fit lever la tête. Elle s'arrêta, s'étira la nuque en faisant basculer sa tête à droite puis à gauche, puis se dirigea vers la porte ; de l'autre côté, les pas étaient de plus en plus proche. Elle n'attendit pas qu'on toque à la porte pour ouvrir, et c'est assez énergétiquement qu'elle tira celle ci vers elle, en annonçant alors même que son premier mouvement n'était pas terminé :

« Bonsoir ; rentre et installe toi »

Elle ne précisa pas pourquoi elle était là ; peut-être que la concernée allait en douter et conforter Anita dans l'idée qu'elle avait fait quelque chose de mal si elle essayait d'emblée de se justifier. Son ton n'était pas agressif, d'ailleurs ; il était assez neutre au final, comme à son habitude. La leader attendit donc patiemment que la femme entre, afin de pouvoir fermer la porte derrière elle et aller s'installer à son bureau.

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Être convoquée dans le bureau d'Anita était de mauvais augure après les récents événements. Elle savait combien la cheffe des mineurs chérissait l'ordre et la stabilité, un héritage de son passé militaire que Victoria ne comprenait que trop bien, ayant elle-même été élevée par un soldat. Et dernièrement, Vicky n'avait pas été un exemple brillant d'ordre et ne parlons même pas de stabilité. C'est qu'elle avait frappé Douglas, sans ménagement, et comme il l'avait fait remarqué : c'était quelqu'un d'important ici. Est-ce qu'elle le regrettait ? Pas une seule seconde. Il s'était comporté comme un sombre connard et elle avait eu bien du mal à reconnaître le jeune homme qui lui donnait des cours particuliers et avec qui son père prenait plaisir à faire "plein d'activités de mec." Activités qu'elle n'avait jamais rechigné à faire pourtant, mais dont le plaisir s'en trouvait décuplé visiblement quand il s'agissait d'un garçon. Mais ses problèmes avec son père et avec Douglas attendraient qu'Anita lui remonte les bretelles.

Elle avait bien conscience qu'il y avait des limites aux passes droits qu'elle pouvait obtenir. Elle ne cherchait pas absolument à en avoir, mais l'espérait quand même. Alors qu'elle arpentait les couloirs, elle tentait de mettre au point un argumentaire qui serait convaincant. Mais il n'y avait rien qui puisse justifier ses actes. Elle allait devoir simplement baisser les yeux et s'excuser platement et promettre simplement qu'elle allait surveiller son tempérament et espérer s'en sortir avec une tape sur les doigts.
Mais est-ce qu'elle s'y tiendrait ? Est-ce qu'elle arriverait à réfréner les pulsions de rage qui la prennent ? Parfois, c'était en dehors de tout contrôle. Elle se souvient nettement du soulèvement au coeur quand Douglas lui avait attrapé fermement le bras. Elle se souvient bien de la colère sourde et surtout soudaine, qui monte et entre en éruption sans crier gare, sans laisser le temps de réfléchir. L'agressivité qu'elle ressentait était au-delà même de sa compréhension. Victoria Spellman avait toujours été maîtresse d'elle, une qualité indispensable pour évoluer à Washington, là où les apparences supplantaient absolument tout. Mais maintenant, c'est à peine si elle maîtrisait le ton de sa voix, qui s'amenuisait quand elle se sentait dépassée ou alors s'élevait quand elle voulait se défendre. Si sa mère avait été là pour la voir dans cet état, elle lui aurait sûrement asséné une bonne gifle et lui aurait intimé de se ressaisir.

S'imaginer Josie Spellman et son regard méprisant en coin lui donne un peu d'aplomb alors qu'elle arrive finalement devant les quartiers d'Anita. Cette dernière devait la guetter car elle lui ouvrit avant même que Victoria ait pu s'annoncer. La brune obéit à son injonction et alla s'installer, un peu raide mais le visage fermé, ne trahissant pas la pointe d'inquiétude qui perçait sa poitrine. Quoi faire ? Attaquer directement le sujet ? Dévier sur autre chose ? Jouer les innocentes ne servirait à rien, il n'y avait aucune chance que l'incident ne soit pas parvenu aux oreilles de son amie d'enfance. "Je suppose que tu m'invites pas commémorer le bon vieux temps autour d'un verre." Et elle regrette déjà son approche, espérant que la cheffe n'y voie pas une tentative de s'absoudre de ses mauvaises actions en invoquant leur vieille amitié. "Je pense déjà savoir pourquoi je suis ici. C'est à propos de Douglas Reed n'est-ce pas ?"
Elle lance son nom comme s'il s'agissait d'un simple inconnu au coeur de leur dispute. C'est qu'elle a encore bien du mal à se mettre en tête qu'il s'agit bien du jeune homme que sa famille avait pris sous son aile. Et en soi elle n'avait pas tort, il ne s'agit plus de la même personne. Tout comme Anita n'est plus forcément la même qu'avant et ça insinue un soupçon de doute dans l'esprit de Vicky.