Après s’être couvert les poignets et la moitié des avant-bras de larges bandes de cuir et les avoir solidement harnachées avec du vieil adhésif industriel, Gabriel s’empare d’un sabre pillé dans les décombres d’un musée colonial. Si son équilibre ne vaut pas les armes récentes, sa lame est facile à aiguiser ainsi qu’à entretenir. Il aurait adoré descendre avec une arbalète, mais les munitions manquent et la recharge est lente. Or, une fois au rez-de-chaussée, chaque seconde deviendra cruciale. C’est pour les mêmes raisons qu’il a opté pour un automatique à neuf cartouches, coincé à sa ceinture, plutôt que pour son révolver et cela en dépits de leurs longues étreintes romantiques dans le fond de quelques gorges. Il emporte, enfin, un couteau long, logé dans sa botte, et un fusil dont le canon a été scié au plus court. S’il doit réellement s’en servir, Gabriel le sait, ce ne sera que pour se dégager de la manière la plus désespérée qui soit ou pour commettre un maximum de dégâts avant de mourir. Et cette idée n’est pas pour lui déplaire.
En tous les cas, elle ne lui fait pas peur.
Il embrasse Marisa à la tempe avec négligence – il ne doute pas de survivre. Ça ne peut pas être pire que l’arène. Son excès de confiance est adorable, surtout quand les masses de chair putréfiée s’accumulent où qu’on porte le regard et qu’il n’est plus possible d’errer nulle part dans Stonebriar sans devoir supporter les râles et les exclamations trainantes des rôdeurs. « Jusqu’à ce que la mort nous sépare, ou quelque chose comme ça… » Il a un sourire désinvolte, quand lui et ses comparses délaissent le premier étage pour les escalators immobiles. Ils ne descendent pas exactement dans l’aire de jeu : pour ça, il faut emprunter un couloir annexe, qui ouvre sur le hall dès les portes tirées. Ce qui, à ce stade, signifie un goulot d’étranglement. Pour Gabriel, c’est une stratégie de guerre très suffisante. « Pas d’armes à feu jusqu’à ce qu’on n’ait plus le choix. » Sinon, plutôt que la marée, ce sera le raz-de-marée.