And here we are again (ft.Ichabod)

 La ballade chez les Crimsons riders ne s'avérait pas être une partie de plaisir. Heaven le sentait car elle avait beau avoir intégré le groupe depuis 2015, elle n'était pas la plus à l'aise avec leurs sorties nocturnes (ou non) où tuer devenait le plus infime mais récurrent des stratagèmes. Les Crimsons riders avaient le don de terroriser le reste des survivants pour asseoir leur pouvoir. Ils avaient décidé aujourd'hui de se rendre dans cet oasis perdu pour "faire du rôdeur". Les Crimsons avaient sacrément envie de descendre quelques rôdeurs ou humains ayant malencontreusement choisi cet endroit pour un peu de détente en ces jours ci. Pourtant, Heaven n'était pas des plus à l'aise. Bien qu'elle fût vêtue d'un haut imprimé et un pantalon noire assez large avec des baskets, elle n'était pas la plus à même à réfléchir sérieusement. Il fallait qu'elle soit réactive, attentive et rapide. Dans sa tête, c'était plutôt un sacré bordel qui s'affichait. Il y avait déjà cette humaine qu'elle avait descendu, croyant - à tort- qu'elle était infectée. Elle n'aimait pas tuer histoire de le faire mais elle avait hésité avant de lui tirer dessus. Rien que pour cette hésitation, elle savait que n'importe quel Crimson rider se moquerait d'elle. Qui plus est, le pire était sûrement que la jumelle de sa victime venait d'entrer dans le camp des Crimsons riders. Elle n'aurait jamais cru que la culpabilité puisse la poursuivre aussi loin. Elle était seule, désespérée et toujours plus tourmentée.

L'arme à la main, elle marchait doucement, réceptive au moindre son qui pourrait les alerter. Elle était aux avants du groupe, les cheveux noirs revenant sur son visage avec le vent qui se levait. Elle les balayait d'un coup de tête assez brusque, histoire de rester concentrée sur sa mission. Elle essayait de faire le vide, de se rappeler chaque seconde pour quelle raison elle était avec eux. Elle avait beau être impressionnée par le semblant d'ordre et de sécurité qu'ils instauraient; elle avait peur de leurs méthodes. Elle qui oeuvrait tant pour les autres, elle se retrouvait dans une communauté, à les protéger du reste du monde. C'était pour les plus proches contre les autres. Elle était un bouclier, une arme bienfaitrice.

Heaven savait que le temps qu'elle passait avec les Crimsons riders était béni. Quelque part, elle avait été sauvée de sa condition de solitaire. C'était une jeune femme qui avait horreur de la solitude. Elle aurait pu croire un temps pouvoir survivre, au gré de ses compagnons de voyage éphémères. Elle avait la tête dure, le corps résistant à toutes les épreuves qu'elle avait pu traverser depuis la mort de ses parents. Les voir en charogne à ces créatures démoniaques l'avait plongé dans un désarroi terrible. Elle n'avait plus foi en l'autre, si bien que de lutter pour survivre devint une réalité accablante. Elle avait beau être forte, fière et débrouillarde... Le simple fait d'être seule lui attirait beaucoup d'inconvénients. Elle avait dû régir son quotidien en ne comptant que sur elle même, se frayer un chemin parmi les autres, infectés ou non. Son désir d'être toujours entourée ne s'estompait pas, alors même qu'elle vagabonda plusieurs mois sans personne. Finalement, la dernière opération avait été un pur échec. Si elle n'avait pas trébuché, si elle n'avait pas brisé le bras de ce crimson rider, elle aurait été comme eux. Réduite à un état léthargique, despotique, critique. Elle se rendait bien compte qu'elle leur devrait tout à jamais. Elle savait qu'elle n'aurait jamais le droit à l'erreur, qu'importe la raison. Elle resterait sur ses plates bandes, gardant sa place et essayant de la mériter tous les jours. Voilà ce à quoi elle tendait à présent.

Alors que les Crimsons riders avançait doucement, toujours plus méfiants et agressifs, l'un d'eux fit signe à Heaven de se diriger vers l'oasis. Il connaissait les planques par coeur et si ils pouvaient éliminer quelques êtres humains en chemin, ils ne se gêneraient pas. Heaven baissa la tête, s'exécutant presque immédiatement. Le fusil à l'épaule, elle avait chaud. A mesure qu'elle avançait, elle sentait les gouttes d'eau de transpiration venir s'incruster dans sa nuque. Ses cheveux mis longs noirs venaient se coller sur ses joues, rougies par la chaleur. Elle respirait difficilement mais n'arrêtait en aucun cas sa route. Elle continua de marcher quand elle s'arrêta. Elle fût obligée de retirer sa casquette pour passer une main sur son visage. Ce fût là qu'elle le vit. Un homme justement à l'oasis. Elle devait le prendre par surprise. Elle voyait de là le butin qui l'attendrait. Elle décida de sortir son fusil, sans le charger. Elle marcha en catimini avant d'atteindre la destination. Ses pas, silencieux et millimétrés vinrent s'accélérer en grandes échappées à mesure qu'elle l'approchait. Elle ne pût s'empêcher d'avoir le coeur battant plus vite. Elle avait envie et si peur à la fois. Elle remarqua qu'il s'était accroupi, ce qui lui donnait l'avantage. Elle allait pour lui sauter dessus quand elle fût pris de court. L'attrapant par le bras, l'homme la posa à terre avec violence. Sa tête toucha le sol alors qu'elle écarquillait les yeux, croisant son regard.

Ce regard, elle s'en souvenait comme si c'était hier. Deux yeux noisettes ornaient son visage viril, assigné d'une barbe de trois jours mal taillée mais dangereusement sexy. Elle sentit son coeur rater un battement, sa respiration reprenant peu à peu son cours. Elle le regarda, comme pour percevoir en lui ses intentions. C'était pas gagné. Alors qu'elle était clouée au sol, le fusil au bras droit ne lui servait plus à rien. L'homme lui paralysait le bras, l'empêchant de se défendre. Elle se dit qu'à part discuter, elle n'avait plus d'autre option. Elle en avait aussi tellement envie. De lui dire qu'elle l'avait reconnu et qu'il était... non, elle ne le lui dirait pas la suite. Elle dit alors , levant les yeux au ciel.

« Encore toi, le brun ténébreux. ». Elle voulait peut être le faire sur un ton humoristique mais elle craignait que son visage se ferme davantage. Alors, elle ajouta, comme pour se persuader qu'il la lâcherait. « Je sais pas ce que tu vas me faire mais je te conseille de me lâcher!». Un poil autoritaire, c'était culotté sachant qu'elle était en mauvaise posture. Tant pis, elle tentait le tout pour le tout.