be a voice, not an echo (eli)

début avril 2019

Il avait besoin de sortir de la ville, s'échapper de tout ça quelques instants. Il avait l'impression d'avoir besoin d'alcool. En quelques mois, tous les souvenirs physiques de l'attaque d'Olympia par les sbires de Lazare avaient été effacé, guéri, reconstruit, et la plupart des séquelles enfouies par les nouvelles venant d'ici et d'ailleurs. Pourtant, à la maison, tout semblait tourner en rond, lui particulièrement, incapable de ce qu'il devait faire pour empêcher Elanor de devenir un fantôme un peu plus chaque jour. Elle avait finit par remanger, se lever, sortir de la chambre puis de la maison, mais il voyait bien qu'il manquait quelque chose, comme une étincelle qui peinait à se rallumer à l'intérieur d'elle, et ça, il n'arrivait pas à y remédier. Comme si tout ce qu'il avait fait jusque là – faire taire les cauchemars la nuit, lui préparer de quoi s'alimenter, l'accompagner dehors – n'avait été que des pansements vainement appliqué sur une fracture ouverte, à peine de quoi éloigner les mouches qui pourraient être attirés par l'odeur du sang. Mais il n'arrivait à rien d'autre. Arrivé à la carrière, il prit presque sans s'en rendre compte le chemin pour aller au caveau, laissant son corps le guider plutôt que son esprit. Il n'était ressorti que quelques fois d'Olympia pour ne pas croiser la route d'un cavalier un peu trop grégaire ou d'un sbire de Lazare, et la dernière fois qu'il était passé par la Carrière, c'était lors de la prise de la mine. Une éternité qu'il n'avait pas descendu les quelques marches qui menaient au Caveau et ouvert la porte grinçante de l'endroit, sans doute que quelques uns des habitués toujours plantés là se demanderaient s'ils ne voyaient pas là un mort revenir parmi les vivants – espérons que non, leurs esprits ramollis par l'alcool seraient capable de sortir une arme pour l'achever. L'endroit en lui-même n'avait pas changé, et Beckett n'en attendait aucun, comme le retour dans un lieu familier et rassurant, presque immuable. Les effluves d'alcool du verre qu'on lui tendit lui chatouillèrent le nez et le cortex des souvenirs qu'il avait pu passer ici. Il se retourna, observant les quelques visages qui peuplaient plus ou moins silencieusement la salle, avant d'en reconnaître un, isolé à une table. La petit sœur du chef de la sécurité du Ranch n'avait pas changé en quelques mois, c'était comme s'il l'avait vu hier pour la dernière fois. « Salut Eli, » il tira la chaise pour s’asseoir en face d'elle, tout en demandant, plus par politesse que réellement intéressé par la réponse « ça te dérange si je m'assois ? » posant son postérieur sur la chaise et son verre sur la table. « Ça fait longtemps, tu vas bien ? »