(II) It's been a while

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Jenna & Adam

« it's been a while »

La vie reprenait son cours, parce qu’elle n’avait pas le choix, et Adam avait la nette conscience de pouvoir s’estimer chanceux vu tout ce qui s’était passé. Chanceux, d’abord, d’avoir pu trouver refuge dans un endroit qui avait tenu le coup faces au déchaînement de la nature – vu ses longs mois d’errances, il serait resté à peine plus longtemps sur les routes ou l’ouragan serait arrivé à peine plus tôt qu’il ne donnait pas cher de sa peau et le simple fait d’y penser coulait un frisson le long de son échine ; Adam n’avait certes pas imaginé sa mort comme ça.
Chanceux, ensuite, d’avoir été épargné, de ne pas avoir récolté de blessures trop grave même malgré son entêtement à braver la tempête. Certains n’avaient pas eu cette veine.
L’olympien, en attendant, donnait son aide là où le besoin s’en faisait sentir malgré sa paume amochée qui le tiraillait méchamment dès lors qu’il forçait un peu trop dessus. Et, en même temps, à moins de bannir totalement de son quotidien l’usage de sa main jusqu’à ce que la plaie soit complètement refermée, il n’avait guère d’autre choix. Du bonheur des blessures mal placée… Et puis, geindre et jouer les manchots était hors de question, pas quand d’autres étaient dans des situations autrement pires que la sienne.

Que la porte de la maison qu’il partageait avec Ryan s’ouvre sans effort à la première pression sur la clenche n’éveilla chez lui aucun soupçon : depuis les coups de boutoirs de l'ouragan, le mécanisme ne fonctionnait plus très bien ; souvent, il fallait batailler plusieurs minutes durant pour verrouiller convenablement la porte et Adam, en ce qui le concernait, abandonnait généralement au bout de quelques secondes, las de se battre avec un verrou alors que tout le monde ici avait sûrement bien mieux à faire que chercher à s’introduire chez ses voisins.
Refermant en silence la porte derrière lui, il se débarrassa de son blouson dans l’entrée, y abandonna également ses grolles boueuses et alla s’effondrer dans le canapé après un rapide passage dans la cuisine afin de récupérer un verre d’eau. Ou plutôt, voulu s’effondrer, mais fut bien obligé de voir ses plans se faire bousculer par un élément qu’il n’avait pas du tout prévu.

Il avait fallu qu’il se retrouve face à face avec Jenna pour qu’Adam réalise, enfin, qu’il n’était pas tout seul dans la baraque. D’abord, il n’avait pas prêté attention à la silhouette dans un coin de son champ de vision tandis qu’il pénétrait dans le salon, assumant qu’il s’agissait la de Ryan. Evidemment, l’illusion n’avait tenu que le temps pour l’image de remonter jusqu’au cerveau – une fraction de seconde, infime – et puis Adam s’était figé tout net dans son avancé pour lui faire face, enfin, la surprise non dissimulée dans son expression. « Jenna. » Il la dévisageait sans vraiment y croire et, après un silence peut-être un peu trop long, le prénom dans sa bouche avait eu un drôle de goût à la fois doux et amer. Il ne savait pas trop s’il était heureux de la voir là ou non, plus de quatre ans s’étaient étalés depuis leur dernier face à face et tout semblait un peu compliqué, désormais. « Qu’est-ce que tu fais ici ? » Question stupide, il connaissait déjà une partie de la réponse : ce n’était certainement pas pour Ryan qu’elle se trouvait là, après tout. « Wyatt a craché le morceau, hein ? » Le ton ne se voulait pas agressif pour un sou, plutôt neutre avec une trace d’amusement qui traînait dans le fond. Finalement, les coins de sa bouche se relevèrent sur un léger sourire tandis qu’il prenait place dans le canapé sans avoir fait un pas de plus vers elle, préférant encore maintenir une distance tout à fait raisonnable entre eux deux. « Si j’avais su que tu ferais le chemin jusqu’ici… » Il laissa sa phrase en suspens, pas bien sûr lui-même de savoir comment la terminer, pas bien sûr de savoir ce qu’il aurait fait en toute connaissance de cause. Après tout n’avait-il pas choisi, lui, de ne rien lui dire ?

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retrouvaille {n} the joy (or pain) of meeting or finding someone again after a long separation; rediscovery.

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Convaincre Abel de la laisser retrouver un semblant de liberté tout à fait relatif à ses côtés ne fut pas une mince affaire (surtout compte tenu de l’humeur massacrante de son aîné). Pourtant, elle n’a pas lâché l’affaire, coriace et déterminée, il a cédé, à bout de l’entendre rechigner. Une victoire comme une autre. Après tout, il fallait bien qu’il se rende à l’évidence, il ne peut décemment la garder à l’abri (ou plutôt enfermée) au sein du ranch. Elle en devient folle, ce n’est pas humain. Elle a du mal à gérer cette surprotection constante, elle pensait que cette dernière s’estomperait après la naissance de Lou, il n’en est cependant rien. Et, elle a pertinemment conscience que cette sortie n’est pour l’instant qu’une exception, surement qu’elle aurait dû se confronter à un non catégorique si la sortie en question n’impliquait pas la propre présence de son frère, au moins peut-il la garder à l’œil tout au long du trajet menant à Olympia. Même si, soyons honnêtes, muni de sa canne et de la douleur constante lui vrillant la jambe, il n’est plus spécialement le " protecteur " idéal. Et, de toute façon, elle sait très bien se défendre toute seule, comme une grande, elle n’a pas besoin de garde du corps contrairement à ce qu’il peut bien penser. Après tout, elle a tenu deux années sur les routes, elle a par la suite assuré de nombreux raids, elle en est toujours revenue en un seul et unique morceau, ça doit bien vouloir prouver quelque chose ! Enfin, pour elle, oui, pour lui, non manifestement, enfin ça ne suffit pas en tout cas à brimer ce soudain instinct fraternel surdéveloppé.

Elle est plutôt rassurée de le voir s’éloigner sans piper mot, Abel, au moins dispose-t-elle du champ libre pour quelque temps. D’ailleurs, une pensée de compassion l’envahit à l’égard de Peyton, elle lui souhaite bien du courage pour survivre à leur entrevue étant donné la sale humeur collant aux basques de son aîné. Une pensée cependant passagère, après tout, l’Olympienne a choisi de son plein gré de se taper le grand manitou du ranch, qu’elle assume désormais ses tendances masochistes. Elle hausse les épaules, tendant les rênes d’Athos au premier cavalier venu les ayant escortés jusqu’ici. C’est fou à quel point Olympia à ce don pour la rendre ainsi nostalgique. C’est comme avant par ici, ou presque. Ça lui manque, ce calme, ce sentiment d’apaisement. Elle a pourtant parfaitement conscience que tout est une question d’apparence. Olympia peut s’écrouler du jour au lendemain tout comme la Crimson Valley. Lou ne connaîtra jamais le véritable sentiment de sécurité. C’est peut-être mieux, au moins ne sera-t-elle pas imprégnée de souvenirs datant d’un monde révolu, contrairement à sa mère.
Elle soupire, frappe à nouveau quelques coups à la porte, rien. Peut-être qu’il n’est pas là, Adam, ou peut-être que le garde peu commode lui ayant indiqué cette demeure lui a menti, elle ne serait même pas étonnée. Tant pis pour la bienséance et la politesse donc. La poignée tourne s’ouvrant sur un couloir vide. Elle n’hésite qu’une fraction de seconde avant de pénétrer au sein de la bâtisse, inspectant les lieux d’un air curieux. L’endroit est clairement impersonnel. Cette pensée est interrompue par quelques bruissements de pas. Adam. Elle le voit d’abord avant qu’il ne l’aperçoive. C’est étrange tous ces sentiments refoulés qui refont tout à coup à nouveau surface. Elle n’arrive même pas à les expliquer, ni même à les nommer. Finalement, il a l’air tout aussi bousculé qu’elle. Le mutisme les gagne un bref instant durant lequel ils restent là, plantés comme deux imbéciles, à se dévisager. La situation en est presque comique. « Je suis venue copiner avec les Olympiens. » Qu’elle rétorque, une esquisse de sourire rivé aux lèvres. Ce qui en soi n’est autre que la stricte vérité, puisqu’il en est désormais un d’Olympien. « Touché. » Wyatt est probablement le seul, outre Caden, au courant de la relation la liant autrefois à Adam. Il n’a pas pu lui cacher le retour de ce dernier, s’empêcher de lui lâcher le morceau. « Tu aurais pris tes jambes à ton coup ? » Elle plaisante bien sûr, même si dans le fond, elle a peut-être raison, qui sait. « Ou alors, tu aurais pris la peine de te raser peut-être ? » C’est bien la première fois qu’elle se sent gênée et ce, depuis des années. Elle ne sait plus exactement comment se comporter face à lui, elle ne le connait plus après tout et lui non plus d’ailleurs. « Je ne sais pas très bien ce que je fiche ici. Peut-être que je voulais m’assurer de la véracité des propos de Wyatt. » Peut-être qu’elle souhaite tout simplement le revoir, c’est aussi simple que ça.

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Jenna & Adam

« it's been a while »

Entendre sa voix réveilla en lui un drôle de sentiment, une sorte de nostalgie qu’il croyait révolue depuis le temps. Enfin, il savait bien qu’il n’avait jamais vraiment tourné la page du ranch en ce qu’il n’avait pas pu, de toutes les années passées ensuite, retrouver un endroit où il se sente à ce point à son aise. Olympia était en bonne passe de faire exception, la ville lui plaisait bien ainsi que retrouver ce semblant d’organisation pas si différent de sa vie d’avant mais… ce n’était pas pareil. Il y avait des histoires attachées à cette voix, des souvenirs. Quelques bons moments, parmi les rares auxquels il avait eu droit depuis que le monde était devenu ce foutoir incommensurable. Il ne s’était pas attendu, non, à ce que tout lui revienne dans la gueule d’un coup comme ça. Un rire lui échappa, alors qu’il portait machinalement une main à sa joue et à la barbe de quelques jours qui commençait à s’y faire un nid. « Bonne question… » Difficile de juger, maintenant qu’il se trouvait face à elle. Difficile de présumer de sa réaction si on lui avait laissé ne serait-ce que cinq minutes pour s’y préparer. Inutile de prétendre, en tout cas : de toute façon ce genre de mensonge ne lui avait jamais bien réussi et elle l’aurait percé à jour en moins de temps qu’il n’en fallait pour le dire, instaurant dès lors une gêne désagréable dont ils pouvaient très bien se passer dans l’immédiat.

« Wyatt dit bien des conneries, mais il mentirait pas sur ça. Pour quoi faire ? L’est pas stupide, à trouver ça drôle ce genre de farce. » Et puis surtout, Wyatt avait été son ami, pour le peu de temps qu’ils avaient passé ensembles sur les terres du ranch. « Tu sais, il reprit avec toujours ce coin de sourire pour tirer ses lèvres, tandis que ses yeux se perdaient un instant dans le vague de quelques souvenirs pas si vieux, j’ai bien cru qu’il allait me buter, pendant quelques secondes. Il avait l’air vraiment en colère de me trouver là. » Son regard se releva, retourna se fixer sur celle qui était présentement au centre de son attention. « Enfin, bref. Il a changé d’avis, et a préféré jouer les commères à la place, faut croire. » Quoique du moment qu’il ne s’en était tenu qu’à elle, ce n’était pas réellement un problème. Ce n’était pas Jenna, qu’il redoutait au sein du trio des Rhodes, ni même Caden, qu’il aurait été franchement heureux de revoir. Il n’avait même pas eu d’appréhension pour elle : en lui coupant l’herbe sous le pied comme elle l’avait fait en s’invitant chez lui, elle ne lui avait même pas laissé ce luxe. « Alors, dis-moi : comment tu vas, Jenna ? » Vaste question, et en même temps elle englobait bien plusieurs années. Sûrement qu’il y avait des choses à dire, depuis le temps, alors ils n’allaient tout de même pas rester là à se contempler dans le blanc des yeux ? Et puis, ça valait bien un début comme un autre, et il était difficile de savoir par où commencer quand on avait autant de choses à rattraper. Jenna se tenait devant lui, à moitié une inconnue, à moitié une amante laissée derrière lui avec une histoire terminée en vrac et qui lui avait laissé un sale goût d’inachevé dans la bouche. Elle avait continué sans lui et fondé sa famille, de ce que l’autre femme lui avait dit et lui, eh bien… disons que quels qu’aient pu être ses sentiments à son égard à l’époque, il n’avait pas passé quatre ans à les entretenir, à les polir au coin du feu. Alors il était curieux, sincèrement, de savoir face à qui il se retrouvait aujourd’hui.
Et cette fois au moins, aucune urgence ne pressait le départ de l’un ou de l’autre. Le temps qui leur avait si cruellement manqué la dernière fois, semblait à présent s’étirer lascivement. Adam était chez lui, sa maison. Et si ça lui faisait encore tout drôle, d’avoir enfin un véritable pied à terre depuis tout ce temps, il aimait l’idée de pouvoir enfin se sentir quelque part chez lui, une place durable avec des murs qui le maintiendraient au chaud cet hiver. Sa toile de tente, qu’il s’était trimballée tout ce temps, était remisée dans un placard et ne lui manquait absolument pas.

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Elle ne saurait dire exactement qui est le plus gêné des deux. Lui, surement. Elle, elle ne l’est que rarement, il faut croire que cette rencontre n’est autre que l’exception à la règle. Elle ne cherche même pas à se cacher derrière une assurance feinte. Elle n’a pas envie de jouer la comédie, pas avec lui, même pas après toutes ces années d’absence. Elle a l’impression qu’un fossé s’est creusé entre eux, elle aimerait le combler d’un pas, que tout redevienne comme avant. Mais, rien n’est comme avant, rien ne le sera jamais. Fatalité comme une autre, décevante fatalité. La vie a continué après le départ d’Adam, forcément, et les années se sont écoulées sans que rien ne semble vouloir les remettre sur le même chemin. Elle ne l’a pas oublié pour autant, le manque s’est tout simplement estompé avec le temps, jusqu’au jour où il a fini par être relégué au rang de simple fragment du passé, un chapitre clos. Il a été la clef de quelques trop rares bons souvenirs. Elle lui en est reconnaissante. Elle se rend compte maintenant à quel point il était important à l’époque, il a été de ceux l’ayant aidée à tenir bon sans même le savoir. Puis, il est parti, tout comme Cirilla, tout comme Aaren, ils sont chacun parti à leur manière. Et, elle a subi cette perte.

Elle doit le reconnaître, elle s’est trouvée une piètre excuse en guise de justification concernant sa présence ici, aujourd’hui, à Olympia. Vérifier les propos de Wyatt, peu convaincant, très peu même. Elle était tout simplement trop curieuse, trop impatiente, à l’idée de le revoir. Sans parler du soulagement l’ayant gagnée. Mais, elle ne peut tout bonnement pas l’avouer. « Toi, te faisant menacer par un rider. Je vais finir par croire que c’est devenu une sorte… d’habitude. » D’abord Abel, ensuite Wyatt. Il n’a pas bonne réputation auprès des cavaliers. « Ou un rituel. » Elle hausse les épaules, pas bien certaine d’à quel point elle peut, ou non, plaisanter à ce sujet. Peut-être que c’est toujours douloureux, trop frais, pour lui. À moins que la page ne soit complètement tournée. Elle ne sait pas, elle ne sait plus rien à son sujet. « Mais, oui, je suppose que tu tiens là un bon résumé. Wyatt n’aime pas, enfin il n’est tout simplement pas du genre à cacher des choses aux personnes auxquelles il tient. » Elle le défend parce qu’il fait partie de ceux, trop rares, qui l’apprécient sincèrement. Et puis, elle n’est pas celle qu’il doit craindre au sein de la fratrie Rhodes, elle n’est pas Abel.
La question qui s’ensuit est pour le moins attendue et complètement vaste. Par où commencer ? Le début, soit, mais elle n’est pas certaine qu’il veuille entendre certaines choses, les choses douloureuses. « C’est un sujet bien vaste que tu souhaites aborder là. » Elle sourit, ne le quitte pas des yeux, s’asseyant sur le canapé le plus proche. Autant prendre ses aises. Elle croise, décroise ses jambes, plusieurs fois. Triture ses doigts un instant. Elle ne sait pas ce qu’elle est supposée dire. « Je vais bien, je suppose, pour l’instant en tout cas. » Elle a connu des périodes, des moments, pires, alors elle en déduit que c’est ça, aller bien. Enfin, ne pas aller trop mal, c’est aller bien, non ? Elle fronce les sourcils, perplexe, le sujet est beaucoup trop… compliqué. « Je peux te faire un résumé rapide et chronologique de ce qu’a été ma vie ces dernières années si tu y tiens. » Un enchaînement d’événements peu glorieux donc. Il risque de s’en rendre compte rapidement. « Alors… Intrusion des jackals au sein du camp, s’ensuit quelques mois passés à l’ombre dans les sous-sols miteux du centre commercial. Pas vraiment la meilleure période. Retour au ranch, je tombe enceinte suite à une erreur de parcours, Abel décide de m’échanger contre le fils du roi de la carrière, Abel toujours aussi charmant comme tu peux le constater. Puis, vient la grippe, un court séjour à la mine, retour au ranch encore, accouchement, mort du père de ma fille, ouragan et, me voilà à Olympia. » Elle ment peut-être, juste sur la fin, elle est obligée, quelques rares personnes connaissent la véritable identité du père de Lou. Pour le reste du monde, son père n’est autre que le défunt Zed Hendrix, point barre. Elle s’étonne elle-même de la dérision avec laquelle elle aborde les beaux malheurs de son existence, comme si ce n’était rien, que des détails. Le résumé dépeignant sa vie n’est pas envieux, pas du tout. Il est pourtant représentatif de ce nouveau monde jonché par la mort. « Je crois que j’aurais bien besoin d’un verre, ne serait-ce que de l’eau. » Il n'est pas toujours évident de réaliser à quel point la vie est une belle chienne.

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Jenna & Adam

« it's been a while »

« Je peux aussi prétendre que ce qui s’est passé depuis la dernière fois m’intéresse pas, si tu préfères, mais on risque de tomber à court de choses à se dire assez rapidement j’imagine. » Et puis cela aurait été se mentir à lui même : Adam avait un certain désir, à la voir aujourd’hui devant lui, à essayer de rattraper un peu ce temps perdu. Qu’importe, dès lors, si le sujet était vaste, comme elle l’affirmait : sa curiosité n’était pas surjouée, il pouvait dès lors bien prendre un peu de temps pour écouter tout ce qu’elle avait à lui dire. Et Jenna en ce qui la concernait, ne rechignerait sûrement pas devant la demande en ce qu’elle devait bien se douter, en choisissant de se rendre jusqu’à sa demeure, que cela allait forcément arriver.
Néanmoins et malgré le contenu de ses paroles, la manière que la benjamine Rhodes eut de lui raconter ses déboires ne put manquer de lui arracher un petit sourire. De toute évidence, son statut privilégié n’avait pas pour autant rendu sa vie rose mais force lui était de constater que Jenna n’avait pas perdu son sens de la répartie ; le ton un peu acéré de sa voix, alors qu’elle contait des événements qui n’avaient rien d’anodins comme s’il s’était agi là d’un simple enchaînement d’événements sans grands intérêt, avait laissé naître en lui un début d’amusement dont il ne chercha pas à se débarrasser tandis que son regard le trahissait sans la moindre vergogne. « Eh bien de toute évidence, t’as pas vraiment eu le temps de t’ennuyer j’ai l’impression. T’as fait tout ça pour oublier que je te manquais ? » La plaisanterie était facile et Adam ne lui laissa pas le temps de s’embarrasser d’une quelconque réponse qu’il se levait de nouveau pour aller fouiller dans la cuisine adjacente. « T’excusera la qualité du service, il continua quelques instants après tandis qu’il était de retour dans la pièce avec un verre en plastique rempli d’eau claire, mais l’ouragan est reparti avec le service en cristal. » Adam se laissa choir de nouveau dans le canapé, posant ses pieds nus sur la table avec la tranquillité posée coutumière de celui qui est chez soi. L’ouragan, bien sûr, ne les avait pas spécialement épargné ici non plus : s’il était bien heureux d’avoir encore un toit sur la tête et pratiquement aucun dommage, il n’en restait pas moins que les bourrasques ne s’étaient pas privée de briser quelques carreaux pour ensuite s’engouffrer dans la demeure et continuer les dégâts à l’intérieur. « On dirait bien que c’est devenu un peu n’importe quoi au ranch, depuis la dernière fois que j’y ai foutu les pieds. » Le commentaire ne se voulait pas vraiment moqueur, plutôt une constatation face à tout ce qu’elle avait visiblement dû subir. « Tu m’enlèves du regret de mon départ. » Un rictus clairement sardonique, cette fois, pour ponctuer sa remarque qu’il ne pensait pas réellement. Il devait bien avouer, néanmoins, qu’à savoir tout ce par quoi elle était passé il trouvait finalement son train de vie depuis son départ du ranch d’une morne tranquillité.
Et, pour être tout à fait honnête, il n’allait absolument pas s’en plaindre.
« Alors… t’as une fille désormais. Tout n’est pas si mal au final, non ? Ou tu la classe toujours dans ton erreur de parcours ? » Curiosité à peine masquée, Adam avait été père après tout, et il lui avait fallu longtemps pour accepter l’idée de la mort de ses gamins et savoir vivre avec, accepter quand il voyait ceux des autres qu’il n’aurait probablement plus l’occasion d’occuper cette place. Jason avait été parmi ce qui lui était arrivé de mieux dans la vie et il s’était réjoui d’avance à l’idée de voir grandir ce petit bout d’homme, alors sa chute ensuite n’avait été que plus brutale quand Marie était morte en tentant vainement de protéger son petit dernier. Il ne le lui avait jamais pardonné, d’ailleurs, mais sa rancune était sans but, terriblement inutile : les morts se fichent bien de ce qu’ils ont laissé derrière eux.

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Elle a cette étrange impression d’être complètement détachée de sa propre vie, de tous ces évènements marquants, ces évènements qui l’ont forgée, qui n’ont rien de commun. Ce n’est peut-être pas plus mal ainsi. Elle ne veut pas leur accorder trop d’attention, elle ne veut pas y resonger, s’y replonger plus amplement. La plupart, ils sont douloureux, alors c’est plus facile de faire comme si ces derniers n’avaient aucune importance, ça lui permet de prendre de la distance, d’oublier l’effroi et l’horreur qu’a pu être sa vie ces dernières années. Elle a souvent souhaité la troquer contre une autre, changer de corps ne serait-ce que l’espace d’une journée, juste histoire de s’assurer qu’elle n’est pas la seule à traverser l’enfer sur terre. Impossible, malheureusement. Elle lui rend bien volontiers son sourire, à Adam, elle s’emploie même à virer son fameux air hautain lui collant à la peau tel un masque. Il marque un point, il a raison, elle n’a certainement pas eu le temps de s’emmerder depuis son départ, ça n’empêche pas qu’elle l’a souvent regretté. Il lui a manqué, pendant tout un temps. Puis, le manque s’est estompé, au fur et à mesure, au fil du temps, et la vie a repris son cours sans qu’elle ne prenne conscience qu’elle n’y pensait plus, à lui et à leurs moments partagés. Pas le temps pour la nostalgie, n’est-ce-pas ? Mais, maintenant qu’il est là, qu’elle le sait ici, elle a eu cette irrésistible envie de le retrouver, ça a été plus fort qu’elle. « Bon, ce n’est pas vraiment digne de mon statut de sœur du grand Abel Rhodes, mais je m’en contenterai. » Elle saisit le verre, le portant immédiatement à ses lèvres. Elle ne peut que s’efforcer de penser au fait qu’elle serait surement mieux ici, à Olympia, dans une belle maison. À l’exception près qu’elle ne s’imagine pas le moins du monde quitter le ranch. Sa vie est là-bas après tout. Pas envisageable donc comme projet. « Certes, oui. Beaucoup de crasses nous sont tombées sur le coin de la figure. T’as surement bien fait de tirer ta révérence en effet. Peut-être que j’aurais dû en faire de même ! » Il est vrai que c’est un beau foutoir, surtout maintenant, depuis l’ouragan. Non pas que ça ne l’était déjà pas avant, mais ils enchaînent les problèmes, les dégâts, autant matériel que politique. Elle espère bien qu’il ne s’agit là que d’une sale période, qu’ils vont reprendre de l’aplomb. De toute façon, il ne peut en être autrement. « Non, bien sûr que non. Lou, ma fille, est probablement ce qui m’est arrivé de mieux pour l’instant. Disons qu’elle est ma récompense pour toutes ces merdes endurées et encaissées au fil des années. » Si, tout était à refaire, elle ne changerait rien. À présent, elle prend soudainement conscience qu’elle est exactement là où elle a toujours voulu être, elle ne peut pas espérer mieux. Elle se rend compte qu’elle sourit bêtement avant de reprendre la parole, contemplant l’habitacle par la même occasion. « Et toi, alors ? T’es casé avec deux enfants, un chien, une belle maison avec jardin et jolies barrières blanches ? » Le rêve Américain. Objectivement, il le touche du bout du doigt, il dispose déjà de la maison, du jardin et des belles barrières blanches typiques. Ça la rend un peu rêveuse, pourtant elle n’a jamais nourri ce genre de rêves, loin de là. Pour tout dire, elle ne s’imaginait même pas mère avant l’apocalypse. Elle ne pensait tout simplement pas être faite pour ça, ou ne pas le mériter, à moins que ce ne soit un savant mélange des deux. Elle s’est toujours sous-estimée de toute façon.

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Jenna & Adam

« it's been a while »

A voir ce sourire étirer ses lèvres tandis qu’elle parlait de sa fille, il eut envie de lui dire qu’il était heureux pour elle, sincèrement. Se contenta de lui renvoyer ce sourire sans fard tandis qu’il contemplait ce bonheur qu’elle affichait sans complexe sur son visage, dans la lueur de son regard. Il ne l’enviait pas pour ce qu’elle avait et dont on l’avait privé, peu convaincu d’avoir envie de refonder un foyer vu la manière dont il avait perdu les siens, mais ça ne l’empêchait néanmoins pas d’apprécier se retrouver ainsi face à quelqu’un qui avait su continuer à avancer, tirer quelque chose de bien de tout ce merdier. preuve criante que c’était encore possible même après tout ce qui s’était passé. Et peut-être était-ce ça, aussi, qu’il était venu chercher à Olympia, dernier bastion de l’humanité telle qu’elle était avant : l’espoir, les gens qui avait cessé de fuir ou de se cacher, yeux hagards et joues creuses. Il aimait ce qu’il voyait ici, cette sensation de sécurité – il n’était pas stupide au point de ne pas savoir qu’elle n’était que précaire, avait déjà failli, faillirait peut-être encore à de nombreuses reprises dans l’avenir –, ces gens qui vivaient plus qu’ils ne survivaient et cesser de s’inquiéter de savoir où l’on irait demain.
La plaisanterie de Jenna, pourtant, jeta un froid alors qu’une ombre passait sur son visage. Le silence fut peut-être un peu plus long, un peu plus pesant que prévu, avant qu’un petit rire forcé ne finisse tout de même par sortir de sa bouche et qu’il chassait cette expression soudainement plus grise. « Pas sûr que Ryan soit partant pour jouer les mères de famille mais bon, je pourrais toujours lui suggérer l’idée à l’occasion. » Elle pouvait pas savoir, forcément, qu’elle avait touché à une corde sensible avec cette réplique pourtant plutôt anodine à première vue, et il ne lui en tiendrait pas rancœur pour ça : après tout il ne lui avait jamais parlé de Marie, ni de leurs gosses ; sa femme, même s’il n’en avait jamais réellement été amoureux, avait tout de même tenu une place importante dans sa vie. « J’vais me contenter de la baraque en attendant, le reste je te le laisse de bon cœur. J’ai déjà donné une fois. » Après coup, c’était assez facile de renvoyer ça comme s’il ne s’agissait ni plus ni moins que d’un peu d’humour pour faire écho à celui de son interlocutrice. L’envie toujours très présente, sûrement, de ne pas risquer de susciter le moindre intérêt chez Jenna à ce sujet. Adam avait toujours été quelqu’un de très discret sur sa vie antérieure à l’apocalypse, peu enclin aux confidences, et il ne tenait pas spécialement à ce que cela change aujourd’hui. « Donc, il reprit assez rapidement en changeant le sujet de conversation tant qu’il paraissait encore être léger, tu as fait le chemin jusqu’ici simplement pour t’assurer que j’étais bien installé cette fois ? » Un sourire un peu taquin au coin des lèvres, pour tirer de sa voix un accent un peu amusé. « Qu’est-ce qu’on va dire de moi, quand la rumeur disant que la benjamine Rhodes a passé l’après-midi chez moi va commencer à se répandre dans la ville. » D’accord, dans l’immédiat cela ne faisait guère plus qu’une grosse poignée de minutes que la cavalière se trouvait ici mais l’idée restait la même et son air un peu chagrin n’en était pas moins faux. en ce qu’il se foutait parfaitement de qui pouvait bien dire quoi à ce sujet. : Adam ne craignait pas trop les retombées, se sentant suffisamment protégé derrière les barricades d’Olympia. La nouvelle pouvait bien aller jusqu’à tomber dans les oreilles du frère de son invitée surprise, qu’il n’aurait en théorie pas trop de tracas à se faire. Et de toute façon, il faudrait bien que celui-là l'apprenne un jour…

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Elle est loin d’être dupe, Jenna, elle saisit parfaitement l’allusion lâchée à la volée. J’ai déjà donné une fois. Lèvres pincées, trahissant sa culpabilité, elle s’en veut immédiatement. Elle ne savait pas. Il a toujours été distant et secret, Adam, le genre de personne qui laisse le passé derrière lui, qui n’en parle pas, qui ne le remue surtout pas. Surement que ce dernier est trop douloureux. Elle ne sait pas grand-chose de lui en fin de compte, déjà à l’époque il la laissait volontairement dans le flou, se montrant évasif concernant sa vie avant la fin du monde, la maladie, le réveil des morts et tout le reste. Il est tel un puzzle dont il lui manque une grande partie des pièces, autrement dit un puzzle incomplet. Elle n’enchérit pas à ce sujet, ça ne la concerne pas après tout. Qui est-elle pour remuer le couteau dans la plaie ? Personne. Ils ne sont que des inconnus dans le fond, des anciens amants séparés par plusieurs années. Elle n’est pas en droit de lui demander quoi que ce soit.
Il change de sujet en un éclair et elle s’en voit ravie, soulagée surtout. Elle n’aurait pas su comment réagir, surement qu’elle aurait été maladroite. Heureusement, la catastrophe est évitée. Il est plutôt doué, Adam, pour ce qui est d’esquiver. Elle sourit, rougit légèrement, porte son verre à ses lèvres pour camoufler son semblant d’embarras. Elle n’a pas de réponse à lui fournir. Pourquoi est-elle ici aujourd’hui ? Pour remettre le passé au goût du jour ? Surement que c’est trop tard pour ça. Peut-être qu’elle est là parce qu’il a compté plus que ce qu’elle ne le pense. Leur histoire s’est terminée d’une manière tellement abrupte, peut-être qu’elle n’a jamais correctement tourné la page, elle n’en sait rien. « Probablement que ta réputation risque d’en pâtir. » qu’elle rétorque une fois le verre reposé sur la table basse. C’est certain qu’au sein d’Olympia les Rhodes n’ont pas bonne réputation. Ils sont considérés comme des tyrans, après tout. Et, elle est indubitablement associée à Abel, qu’elle le veuille ou non. « Et qu’ils penseront que tu pactises avec l’ennemi local. » Plutôt ironique connaissant le passé d’Adam avec le ranch et les Rhodes. C’est plutôt tout l’inverse. Trêve de plaisanteries. Elle ancre ses prunelles aux siennes, prête à troquer son sarcasme contre un élan de sincérité. « Peut-être que tu m’as manqué inconsciemment, je n’en sais trop rien. » Elle hausse les épaules, elle se sent un peu bête, un peu trop sentimentale. Mais il n’y a personne pour la juger, personne pour assister à ce bref instant de sentimentalisme, aucune chance que sa réputation de garce soit brisée. « C’est juste que ça m’a fait bizarre de te savoir toujours en vie et à quelques pas du ranch. C’était… inattendu. » Pas qu’elle sous-estimait son instinct de survie, c’est surtout que la vie en tant que solitaire est compliquée et risquée. À son sens, la survie réside désormais en la notion de communauté. C’est trop difficile d’affronter le monde extérieur et ses aléas tout seul. C’est à en devenir fou. Après, peut-être n’était-il pas seul, peut-être a-t-il rejoint un autre groupe entre-temps, elle ne sait rien – pour ne pas changer. « Je n’ai pas franchement réfléchi, j’ai saisi l’occasion en apprenant qu’Abel devait se rendre à Olympia. Je me suis dit que j’allais venir à ta rencontre et aviser par la suite. » Aviser quoi ? Bonne question. Ce n’est pas comme si elle espérait reprendre là où ils se sont arrêtés, pas vraiment en tout cas, peut-être que oui tout au fond d’elle. Elle est un peu perdue en réalité, tout se mélange dans sa caboche, il la déstabilise.

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Jenna & Adam

« it's been a while »

Tu parles d’une réputation… Avec même pas deux mois d’ancienneté au sein d’Olympia, Adam n’avait certes pas à trop s’inquiéter de la solidité de cette dernière ni même de l’impact que pourrait bien avoir ce genre de rumeur dessus. Il savait qu’il était assez apprécié (il faisait tout pour il faut dire, et son coup de main lors de l’ouragan n’était pas non plus passé inaperçu) mais il restait quand même le mec qui vivait avec un ex-jackal – et osait bien s’entendre avec lui, de surcroît. Enfin, il n’avait de toute manière pas le moindre intérêt pour ce genre d’histoire et n’avait balancé ça que dans l’idée de détendre l’atmosphère. « Tu parles d’un ennemi local… Il étouffa un léger rire, continua : t’es pas la première et sûrement pas la pire à avoir foutu ses pieds à l’intérieur de cette baraque. » Et l’autre y a même une piaule. Il étouffa la remarque qu’il avait manqué de laisser échapper à propos de l'identité de Ryan, Jenna n’avait pas besoin d’être rassurée quant au fait qu’elle n’était pas la personne la moins fréquentable – d’un point de vue olympien relatif à cette idée absurde de réputation entachée et qu’il ne partageait donc pas – et elle n’avait certainement pas besoin d’être au courant que son colocataire et ami était un ancien de Stonebriar (pour ce qui était de sa propre, et brève, fréquentation du mall, il garderait bien évidemment sa bouche scellée). Surtout si, d’après ses dires, elle y avait fait un séjour qu’il n’imaginait pas être des plus agréables. « Bref, y a pas vraiment de quoi se formaliser là-dessus si tu veux mon avis. » Son sourire continua de flotter sur ses lèvres, un peu évasif, tandis qu’un léger silence tranquille prenait doucement ses aises.
Et puis l’aveu de la cavalière de le surprendre, au moment où il ne s’y attendait pas le moins du monde. Sa sincérité le prit de court, après les quelques répliques échangées sur le ton de la plaisanterie, et il ne chercha d’ailleurs pas à s’en cacher tandis que le sérieux était revenu s’installer au fond du regard qu’il gardait braqué sur elle. « Qu’est-ce que tu veux que je te dise, il rétorqua en haussant les épaules, quitter le ranch ne m’a pas empêché de continuer à survivre et à tirer mon épingle du jeu. » Peut-être que tu m’as manqué… Les mots trouvaient un écho curieux chez lui même après tout ce temps loin d’elle mais, après tout, il ne fallait pas s’en étonner : si c’était la nostalgie qui avait poussé l’homme à finalement revenir sur ses pas après ses années d’exil, alors Jenna en était une des raisons. « Et je suis content que tu l’ai fait, il admit sans fard et sans gêne aucune. Une surprise, c'est sûr, mais une bonne. » Et le timing avait été parfait, bien qu’uniquement dû à la chance : à imaginer le ce scénario de retrouvailles avec l’autre habitant de la maison présent entre ses murs, Adam supposait sans peine que le résultat aurait été quelque peu différent. « Je mentirais en affirmant que j’ai pas pensé à toi en revenant m’installer dans le coin. » Il pouvait bien faire preuve de cette même sincérité, puisqu’elle avait eu l’honnêteté de s’ouvrir à lui alors, tant pis si ça les mettait dans une situation ambiguë. Cette rencontre toute entière l’était, de toute manière, et ce depuis qu’il avait pénétré la pièce dans laquelle elle l’attendait. La faute à ce foutu passé laissé en plan, sans aucun doute. « Mais je m’imaginais mal me pointer comme une fleur sur vos terres, encore moins venir frapper à ta porte. » A supposer bien sûr qu’on l’eut laissé entrer sans lui coller au préalable une balle entre les deux yeux. « Et puis, Wyatt m’avait déjà dit pour ta gosse alors me ramener comme ça, au beau milieu d’une famille… Je me suis dit qu’on avait pas besoin de ça, ni toi ni moi. » Parfois, ça valait mieux de laisser le passé à sa place sans tenter de le remuer. Et même si la famille en question n’existait pas vraiment d’après les dires de son interlocutrice mais ça, il ne le savait pas avant qu’elle ne le lui dise quelques minutes plus tôt.

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retrouvaille {n} the joy (or pain) of meeting or finding someone again after a long separation; rediscovery.

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Peut-être qu’elle se livre un peu trop, ce n’est pas dans ses habitudes, elle se sent exposée et elle n’aime pas ça. Il a raison, la vie continue, la vie en dehors des limites du ranch, loin du contrôle d’Abel, ou plutôt la survie, même si elle ne l’envisage pas vraiment. Et, elle ne doute pas qu’il ait su tirer son épingle du jeu, qu’il est doté de multiples ressources, Adam, elle ne l’a jamais sous-estimé. Un instant elle craint que sa sincérité ne soit pas récompensée, elle anticipe déjà le malaise et puis, finalement, le soulagement l’envahit. Il a pensé à elle, il est content de sa présence ici au sein d’Olympia, il ne l’a pas oubliée. Pour sûr, il n’aurait surement pas franchi l’entrée de la Crimson Valley, pas sans se confronter à Abel. Elle a un peu le sentiment qu’il se défile, à moins que ce ne soit la gêne. Elle sourit à l’évocation du terme famille, elle est bien loin de la famille traditionnelle, bien loin du fameux rêve américain aussi, bien qu’en réalité elle s’en contrefiche, la seule chose qui compte c’est Lou, Chloe, Silas, ses frères. À leur manière, ils sont une famille, peu importe leur degré de dysfonctionnalité. « Non, c’est vrai, surement qu’on n’a pas besoin de ça. » Même maintenant. Ce n’est jamais judicieux de remettre les anciennes histoires au goût du jour de toute manière. La plupart du temps c’est voué à l’échec. Et, sincèrement, elle en a plus que marre d’enchaîner les échecs, ils commencent à se succéder, elle aimerait à présent s’échapper de ce cercle vicieux, ne serait-ce que pour sa fille. « Bon, peut-être que je devrais m’en aller. » Elle se redresse, terminant son verre d’eau dans un même temps, tandis qu’elle esquisse un pas ou deux en direction de la sortie. Est-ce qu’elle est en train de prendre la fuite ? ça y ressemble sacrément en tout cas. Un court instant, son regard se perd au travers de la fenêtre, capturant au passage un Abel Rhodes les traits déformés par la colère et la dégaine fermée à souhait. « Finalement, peut-être que je vais rester encore un moment. » Hors de question qu’elle fasse le trajet jusqu'au ranch en sa compagnie. Elle préfère encore affronter sa nostalgie et les sentiments étranges qui vont de pairs avec cette dernière. « On passe à plus corsé ? » La question s’échappe de ses lèvres, alors qu’elle attrape une bouteille de rhum traînant sur une vieille commande. Quitte à passer du temps ensemble, autant essayer d’éclipser cette gêne constante régnant désormais entre eux.

« Enfin, comme tu peux le constater, je suis toujours le vilain petit canard Rhodes. » Qu’elle s’exclame, haussant les épaules tandis qu’elle ne peut s’empêcher de rire face à cette fatalité. Voilà presque une heure entière qu’ils échangent, discutant de tout et de rien, le rhum aidant et dissipant leur embarras, ou plutôt leur trouble respectif. La distance s’est envolée au profit d’une certaine proximité, alors qu’elle la rejoint dans le canapé et que sa main flâne, sans vraiment en avoir conscience, sur la cuisse de l’Olympien. « Quoi ? Qu’est-ce qu’il y a ? J’ai quelque chose de coincé entre les dents ? » La question résonne dans la pièce tandis qu’il la fixe de ses prunelles indéchiffrables. C’est complètement stupide mais ça lui procure un bien fou, d’être regardée de la sorte, pas comme celle qui s’est faite engrosser par un carrière, ni comme la détestable benjamine Rhodes, ou comme la névrosée (selon Abel). Elle a l’impression qu’il la voit telle qu’elle est, tout simplement, c’est difficile à expliquer. « Depuis quand est-ce que tu as perdu ta langue exactement ? » reprend-t-elle tandis qu’il la fixe éternellement. Soudainement, elle prend conscience de leur proximité, de ses propres doigts effleurant son jean, elle hésite à briser le contact, pour autant elle n’y fait rien, ancrant ses iris à ceux d’Adam. « Tu penses que ce serait vraiment stupide de se laisser éventuellement gagner par la nostalgie du passé ? » Il s’agit surement de la question la plus importante de ces retrouvailles, celle qu’ils se posent depuis le début.

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Jenna & Adam

« it's been a while »

Son rire répondit de bon cœur à celui de Jenna, il y avait tout de même pire comme vilain petit canard que la benjamine Rhodes si on lui demandait son avis. Lui-même n’avait jamais vraiment compris comment elle avait pu être (était encore, visiblement) sous-estimée de la sorte même par sa propre famille. L’alcool avait réchauffé l’atmosphère, déliant les quelques tensions entre eux deux, cet espèce de blocage qu’il y avait de ne pas savoir si la personne en face de soi était un étranger ou non ; la complicité semblait avoir regagné un peu de son terrain d’antan tandis qu’ils avaient cessé de se tenir chacun à un bout de la pièce comme si trop de proximité était susceptible de leur faire du mal.
Adam n’était pas ivre, on en était même loin, mais il avait accueilli avec plaisir le léger engourdissement du rhum tandis que les mots avaient plus de facilité à passer entre ses lèvres, que les réactions lui venaient plus naturellement. Qu’elle s’assoie, soudainement tout à côté de lui, ne le dérangea pas du tout alors que les deux corps se frôlaient légèrement. Mais il est vrai que le contact de la main contre sa cuisse eut l’effet de le sortir de cette sensation de confort ouatée dans laquelle l’alcool l’avait doucement pongé ; un peu surpris, son regard se baissa sur la baladeuse puis remonta jusqu’à se river à celui de sa compagne, muet. Depuis quand est-ce qu’il avait perdu sa langue ? Sans doute depuis que les doigts de la cavalière s’évertuaient, quoi qu’inconsciemment, à réveiller des souvenirs soigneusement remisés avec le temps, des souvenirs qu’il s’était efforcé de garder à distance depuis le début de cette conversation parce qu’ils n’avaient plus vraiment leur place ici, après toutes ces années.
Pourtant, à cette instant précis, il n’était plus sûr de rien.
La dernière question de Jenna trouva un écho en lui, répondant de ce fait à la propre interrogation qui lui agitait les pensées. « Peut-être », il lâcha finalement après tout ce silence alors que sa main droite se levait, tranquille, pour se trouver une place contre la joue de son interlocutrice. « Et peut-être que c’est une très mauvaise idée. » Il se pencha vers elle pour l’embrasser, impulsion soudaine dénuée de la moindre hésitation tandis que son autre main se portait sur celle qui s’attardait encore contre sa cuisse. Une mauvaise idée, peut-être, en ce que ce n’était pas forcément judicieux de s’abandonner aux bras de la nostalgie, cette dernière étant particulièrement propice à faire naître des regrets sournois ensuite. A savoir, en revanche, si cela lui importait réellement… c’était une tout autre histoire. Les lèvres se séparèrent, mais Adam ne s’écarta qu’à peine de Jenna, juste ce qu’il fallait pour laisser filer encore quelques paroles dans cette intimité soudaine empruntée à leur passé commun. « Mais si tu veux simplement savoir ce que j’en pense, alors j’en pense que je m’en fous. » Au moins pour aujourd’hui, au moins pour cet après-midi. Rien ne les empêcherait ensuite de blâmer l’alcool qui, au fil de la conversation, leur avait insidieusement rappelé qu’ils n’avaient pas eu droit à un adieu digne de ce nom, à une fin propre, et que cela avait peut-être été juste une manière de remédier à ça. Retourner quelques années en arrière juste l’espace de quelques heures afin de balayer les vieux regrets poussiéreux stockés dans un coin. Ses doigts redessinèrent le tracé de sa mâchoire, le pouce vint s’égarer contre la lèvre inférieure de la cavalière tandis que les regards s’affrontaient silencieusement. Et puis il scella de nouveau leurs bouches et son autre main se referma, sur sa cuisse, autour de celle que Jenna y avait laissé traîner avec un soudain élan de vigueur. Stupide, oui, sûrement. Mais il était un peu tard pour faire marche arrière à présent.

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retrouvaille {n} the joy (or pain) of meeting or finding someone again after a long separation; rediscovery.

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Une mauvaise idée. Elle ne peut le nier. De toute évidence, son existence toute entière - surtout le chapitre postapocalyptique – n’est autre qu’une succession de mauvaises idées. Une de plus, une de moins, elle n’est plus réellement à ça près. Elle pourra toujours songer aux conséquences de ses actes, aux regrets, par la suite, non ? Tout remettre à plus tard, à après, ça lui semble parfait. Une solution de secours comme une autre. De toute façon, Jenna ne serait pas Jenna si elle se mettait à réfléchir plus amplement avant d’agir. Elle est impulsive, elle l’a toujours été. Elle ne sait pas vraiment ce qu’elle attendait, ce qu’elle espérait, de ces retrouvailles mais soudainement tout lui parait plus clair, malgré les années, l’ambiguïté ne semble pas s’être estompée. Alors, fatalement, ils en arrivent à ce point de non-retour. Céder à leurs pulsions ou non. Satisfaire leurs envies autrefois enfouies ou non. Tout est une question de choix. Pour autant, ce dernier lui parait vite fait. Elle n’a pas vraiment la foi de résister à ses propres ardeurs. Et, ce n’est pas Adam qui risque de la contredire, pas du tout. Elle ferme les yeux alors qu’il scelle leurs lèvres, profitant de cette proximité retrouvée. Ce serait mentir que de nier que ça ne lui a pas manqué. Peut-être qu’elle ne devrait pas se fier à la nostalgie, cette dernière est plutôt fourbe, mais elle a bel et bien la sensation qu’il est trop tard désormais. Il s’en fout. Il semble bien qu’elle aussi, elle ait chassé la plupart de ses doutes il y a de cela quelques secondes, alors qu’il remettait leur histoire au goût du jour. Elle l’observe, silencieusement, les prunelles vissées aux siennes. Elle frissonne au contact de son pouce contre sa peau, ses lèvres, elle soupire, il lui en faut soudainement plus, là, tout de suite. Elle a les sens en émois, sur le qui-vive, comme si ces derniers n’attendaient que ces retrouvailles depuis des années. Elle ne tarde pas, n’hésite pas, à intensifier leur baiser tandis qu’il étreint une nouvelle fois sa bouche. La main libre, effrontée, se glisse déjà sous le t-shirt, retrouvant sa silhouette joliment dessinée. Elle bascule en arrière, l’entraînant avec ferveur dans sa pseudo chute, pressant son corps échauffé contre le sien. Elle le veut, c’est indéniable. Tant pis pour la raison, elle est remballée au placard, comme toujours, ce sera pour plus tard les remords.

Mains levées vers le ciel, elle s’étire, dégourdissant les muscles endoloris par leurs quelques ébats. Elle jette une œillade à Adam, basculant sur le côté pour mieux lui faire face, elle prend appui sur son avant-bras, les doigts libres effleurant le buste de son ancien – nouvel ? – amant. Autant l’avouer, elle ne sait plus vraiment où elle en est, où elle se situe actuellement. « Alors, comment je dois le prendre, ce qu’il s’est passé, comme un adieu ? » Comme un nouveau, deuxième, départ ? Ce n’est pas une question piège, pas vraiment, elle le taquine. Même si, dans le fond, peut-être qu’elle veut savoir. « Un double adieu ? » Elle parcourt du regard la chambre de l’Olympien, elle n’a pas vraiment eu le temps ni même l’occasion de s’y attarder plus tôt puisqu’ils ont finalement délaissé le vieux canapé pour mieux réitérer leurs ébats en ce lieu. « En tout cas, tu n’as pas perdu en endurance. » Elle arque un sourcil évocateur, rictus en coin. Elle ne sait pas vraiment si elle doit partir, détaler maintenant et sans plus de cérémonie. C’est toujours délicat comme situation, peut-être qu’il ne veut plus l’avoir dans les pattes plus longtemps, elle ne lui en voudrait pas ou surement que si en réalité, ce n’est pas franchement flatteur de se faire jeter hors du lit une fois son coup tiré (grande spécialité Abel). Mais bon, elle pourrait comprendre qu’il le veuille. De toute façon, il va bien falloir qu’elle parte un jour, à moins qu’elle n'attende qu’Abel revienne la chercher pas la peau des fesses… Non, il vaut mieux éviter.

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Jenna & Adam

« it's been a while »

Le silence, après tout ça, ne fut pas désagréable, un calme éphémère, simple moment où la seule présence de l’autre suffisait maintenant qu’ils avaient fait taire cette faim réveillée par l’alcool et les vieux souvenirs remis au goût du jour. La voix de Jenna s’insinua tranquillement dans cette quiétude sans la perturber outre-mesure et il recentra son attention sur elle, sur son corps offert sans grande pudeur à la lumière de l’après-midi qui filtrait de la fenêtre. Finalement, son regard remonta jusqu’à se river à celui de la jeune femme et il lui décocha un sourire en coin vaguement amusé de sa remarque, plus légère, que la question posée à peine plus tôt. « Hmm, il acquiesça, ravi de savoir que je satisfais toujours à tes exigences. » La voix un peu taquine, avant qu’il ne se redresse sur son séant puis s’extirpe finalement du cocon confortable que représentait le lit. Il récupéra caleçon et pantalon, se rhabillant sommairement tandis que son esprit s’occupait à la réponse, la vraie réponse, que Jenna attendait toujours. Le fait était qu’il ne savait pas trop quoi lui dire, il n’avait pas spécialement envie de la voir tourner les talons sur ces entrefaites mais il aurait été absurde de prétendre qu’une simple après-midi avait suffi à effacer plusieurs années d’éloignement et d’absence et elle serait certainement du même avis que lui à ce sujet, après tout aucun des deux ne s’était arrêté de vivre dans l’attente de l’autre.
La ceinture bouclée, Adam revint s’asseoir sur le bord du lit et c’est presque machinalement que sa main revint s’égarer contre la peau nue. En un sens c’était plus facile maintenant, de ne plus avoir à se comporter vis-à-vis d’elle sans trop savoir ce qu’il convenait de faire, ou non. D’avoir cédé aux plaisirs de la chair leur conférait ce droit, au moins pour ce qu’il leur restait de temps à passer ensemble aujourd’hui, de s’approprier mutuellement le corps de l’autre. « Je suis pas bien sûr que j’aurais su partir si j’avais eu droit à ce genre d’adieu, la dernière fois. » Mais, d’une certaine manière, l’urgence qui les avait alors pressé avait facilité son départ en ce qu’il n’avait pas eu le temps de s’attarder, de donner trop de place à son hésitation et à ses sentiments de l’époque. « Mais si c’est ça que tu veux… » Il n’avait rien à y objecter, ne pouvait pas se targuer de connaître la Jenna qui se tenait présentement en face de lui aussi bien que celle qu’il avait fréquenté ce qui semblait être une éternité plus tôt. Il ne pourrait même pas affirmer qu’il aurait des regrets si elle choisissait de franchir la porte pour ne plus revenir ici, parce que ceux-là l’avaient déjà bien assez bouffé, mais prétendre l’inverse n’était pas plus véridique : il avait été heureux de la retrouver, sincèrement, n’avait pas spécialement envie de la voir disparaître une seconde fois. Pour autant, cette envie n’était-elle pas simplement dû qu’aux vestiges de sentiments passés ? Et est-ce qu’il ne valait pas mieux, alors, se contenter de ce qu’ils avaient eu aujourd’hui en guise de digne conclusion ? L’olympien se pencha vers elle, ses doigts s’amusant à replacer derrière son oreille quelques mèches de sa tignasse ébouriffée par leurs ébats précédents. « J’ai une proposition alternative. » Il lui vola un baiser autrement plus chaste que ce que la chambre venait de voir, tranquille, et rassasié dans ses gestes. « Disons un adieu. » Inspiré par l’alcool, la proximité, la résurgence d’une mémoire commune qu’ils avaient dépoussiérée ensembles. « Et des retrouvailles. » La seconde fois ne pouvait pas être une erreur, ils pouvaient difficilement prétendre que celle-ci n’avait pas été absolument volontaire du début jusqu’à la fin. L’olympien se leva, laissant une main traîner encore quelques secondes sur son épaule dans le mouvement puis s’écarta d’elle, brisant un peu cette proximité retrouvée. « Tu devrais te rhabiller, je sais pas quand est-ce que Ryan va rentrer… » Ou s’il était déjà revenu, difficile à savoir puisqu’il avait eu autre chose à faire que d’écouter d’éventuels bruits dans le reste de la maison et que l’autre olympien ne se serait certainement pas incrusté en sachant ce qui se passait. Enfin, on parlait de Ryan donc… En guise de conclusion à ses paroles, un t-shirt atterrit en moulon sur le lit, ramassé par terre et balancé sans hâte.

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Elle sourit, apaisée, se gorgeant de cette atmosphère douce et chaleureuse, de la quiétude. La taquinerie tranche avec la question plus sérieuse laissée en suspens quelques instants plus tôt. Elle n’est pas certaine que ses exigences soient si difficiles. Mais, elle n’est pas mécontente de satisfaire ces dernières avec une personne qu’elle apprécie, malgré les années écoulées. Elle est à l’aise, avec Adam, elle se sent elle-même, elle n’a pas à se cacher. Pourtant, sous ses grands airs, elle a perdu confiance en elle, du moins pour ce qui est des relations charnelles et sentimentales également. L’échec cuisant qu’a été son aventure avec le roi de la carrière lui laisse un goût amer, elle n’arrive pas à tourner la page. Elle pose les yeux sur Lou et fatalement, elle pense à lui et surtout, à ses mensonges. Mais, à cet instant, elle se sent libre, sereine et en confiance. Alors que dans le fond, elle ne sait plus rien de l’ancien cavalier, mais elle n’arrive pas à se méfier de lui, à camper sur ses positions. Il est une véritable bouffée d’air frais. C’est plutôt inattendu, elle apprécie la surprise. Elle soupire à regret tandis qu’il s’extirpe des draps. D’ailleurs, elle ne se prive pas de la vue qu’il lui offre sans pudeur. Elle tire la moue alors qu’elle l’observe se rhabiller. Elle n’a pas envie de revenir à la réalité, pas déjà, pourtant il faudra bien qu’elle s’y heurte d’un moment à l’autre. Peut-être que c’est le moment, elle a déjà grappillé assez de temps comme ça.

Elle s’étire, toujours allongée sur le lit, pendant qu’il se rassoit finalement à ses côtés. Un léger frisson lui parcourt l’échine alors que ses doigts glissent contre sa peau nue. Elle aimerait que ce moment s’éternise. « Heureusement alors que je n’ai pas eu l’occasion de t’offrir un tel adieu, t’en aurais perdu la tête. » Au sens littéral comme figuré, mais surtout littéral. Abel n’aurait surement pas hésité à lui faire porter le chapeau, à l’utiliser comme exemple, à lui ôter la vie. Qu’il soit coupable ou non. D’ailleurs, elle ne connait toujours pas le fin mot de l’histoire. Qu’est-ce qui a bien pu troubler sa mission ? Qu’est-ce qui a bien pu le troubler au sein de la mine ? Elle n’a pas besoin d’obtenir des réponses, pas maintenant, peut-être plus tard. Elle ne sait pas vraiment si ça compte, si elle a besoin d’apprendre ce genre d’informations. Ce qu’elle veut, ce qu’elle ne veut pas, elle n’en a pas la moindre idée. Est-ce qu’elle veut partir ? Non ou peut-être que oui, peut-être que c’est préférable de revenir dès maintenant à la réalité. Pas tant qu’elle n’a pas sa réponse, la réponse qui compte. Elle est toute ouïe alors qu’il reprend la parole, s’amusant avec quelques mèches de sa chevelure brune désormais en bataille suite à leurs ébats. Une alternative, vraiment ? Il dispose de la moindre parcelle de son attention à cet instant précis alors qu’il s’empare avec douceur de ses lèvres. Un adieu, bien. Elle reste de marbre face à cette réponse, un peu déçue peut-être. Des retrouvailles. Elle sourit cette fois, un sourire franc. Elle est satisfaite, soulagée. Elle ne s’attendait pas à ce que sa réponse compte autant. Il s’écarte, encore une fois, elle soupire, encore une fois également. « C’est la première fois qu’on me demande de me rhabiller aussi rapidement je pense. » Elle délaisse finalement le lit sur cette taquinerie, partant en quête du reste de ses vêtements une fois son t-shirt revêtit. « Je vais m’éclipser avant qu’il ne revienne alors. » Elle enfile sa lingerie, bataillant ensuite un instant avec son pantalon. Elle n’a pas encore retrouvé sa ligne d’antan, encore quelques kilos à perdre histoire de pouvoir à nouveau respirer dans ses jeans. « Il faut que je discute avec Abel de toute façon, même si j’imagine déjà d’où il tire sa mauvaise humeur. » Peyton Yates. Surement qu’il a encore dû ‘l’énerver, jouer au con. Alors, forcément, il s’est pris un retour de bâton. Une fois entièrement vêtue des pieds à la tête, elle reporte toute son attention sur Adam, s’approchant de lui sans le quitter du regard. « Mais, puisque ce sont des retrouvailles également, je pense revenir prochainement. » Elle glisse ses mains le long de la nuque, arrachant un doux baiser à l’Olympien. « Si, tu retrouves mon soutien-gorge, garde-le au chaud. » Elle se détache finalement, la mine amusée, déguerpissant sur ces quelques mots.

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