Et tu veux vivre, mais c'est trop tard. C'est la fin mon ange, il fait déjà noir. Fais tes adieux, c'est fini ce soir.
A quoi ça rime ? Non, vraiment, c'est une question qui l'obsède. Il essaie de s'imaginer la vie avant l'apocalypse, et même s'il n'a plus le moindre souvenir de ce à quoi ressemblait son quotidien, il tente quand même. Déjà alors, quel était le sens qu'il donnait à ses journées ? Qu'est-ce qui le poussait à vouloir respirer ? Peut-être qu'il avait quelqu'un dans sa vie, quelqu'un qui voulait vraiment dire quelque chose, quelqu'un qui comptait, qui lui donnait envie de continuer. Mais là, maintenant que le monde se résume à des morts qui reviennent à la vie et dont la seule envie c'est de vous bouffer, il se demande réellement à quoi ça rime, pourquoi il persiste à vouloir survivre, pourquoi il se donne les moyens de ne pas dépérir. Au mieux, il trouvera un groupe de personnes avec qui partager ses journées, des gens qui offriront un peu d'animation aux jours mornes qu'il passe, mais plus ça vient et plus il se rend compte que les gens, il n'aime pas ça. Tout ce qui n'est pas lui, il a envie de le détruire, de le casser, de l'exploser de la manière la plus vile qui soit pour regarder les morceaux se briser contre le sol et s’en délécter, tel le salop qu'il est. Alors pourquoi continuer ? C'est l'instinct qui le lui dicte, c'est lui qui le pousse à essayer; essayer de se trouver de la bouffe, essayer de butter pour de vrai les maudits rôdeurs qu'il croise chaque jour, ceux qui essaient de ne faire qu’une bouchée de son corps amaigri.
Pourquoi se pose-t-il cette question ? Il faut dire que là, il est plutôt dans la merde; dans une merde noire, comme jamais ça n'est arrivé auparavant. Il a voulu lancer un petit raid dans un supermarché, en sachant très bien qu'il n'y aurait plus grand chose à se mettre sous la dent, mais il a quand même tenté. Et le voilà qui se retrouve coincé dans la réserve, avec des macchabées qui essaient par tous les moyens d'enfoncer la porte pour venir le dévorer, venir arracher sa chair de leurs dents pourries pour s'en régaler. Il essaie de réfléchir mais il n'y a pas la moindre issue, même pas une fenêtre dans cette putain de pièce minuscule par laquelle il pourrait s'échapper. Ils doivent être au moins dix, derrière cette foutue porte, et il sait que si jamais il l'ouvre, il va se retrouver dépassé, sans le moindre moyen de s'en sortir. « Putain, Mo... Réfléchis, réfléchis, réfléchis... » grogne-t-il pour lui-même, incapable de trouver la moindre idée brillante pour se sortir de ce pétrin. C'est donc ça, sa fin ? Il n'y a plus d'issue, c'est là qu'il va finir ? Soit il mourra de faim dans cette pièce où il ne se trouve rien d'autre que des vieux dossiers jaunis par le temps à se mettre sous la dent, soit la porte finira par céder et il terminera bien par se faire bouffer par l'un des rôdeurs parce qu'il ne pourra pas tous les éliminer en même temps avec sa machette. Il rage, parce qu'il sait qu'il mérite mieux. Il mérite de partir avec un grand "boom", il mérite d'exploser à la gueule de quelqu'un, pas de finir comme une merde sur le sol d'un supermarché miteux, oublié de tous, transformé en l'une de ces bêtes décérébrées. Ouais, il a bon dos le sens de la vie, parce que même s'il ne trouve pas le moindre sens à tous ça, face à la perspective imminente de sa mort, il sait qu'il ne veut pas crever. Il ne veut pas tomber dans l'abandon, dans le néant, dans le rien. Il veut vivre et ça lui est refusé, parce qu'il est coincé, parce qu'il n'y a plus d'issue. Il ne va pas prier, non. Dieu, c'est des conneries, c'est de la poudre aux yeux. « PUTAIN. » qu'il hurle, à pleins poumons, pour qu'on l'entende, parce qu'au final, il se fout d'attirer d'autres rôdeurs, il sait qu'il est déjà condamné. Il finit par s’asseoir dans un coin de la réserve, les genoux repliés contre son torse, attendant sa propre fin.
Accueil
Un grand 
